𝗣𝗮𝗿𝗮𝗺𝗲̀𝘁𝗿𝗲𝘀 𝗱𝗲 𝗹𝗮 𝗰𝗼𝗻𝘀𝗰𝗶𝗲𝗻𝗰𝗲 𝗲𝗻 𝗣𝘀𝘆𝗰𝗵𝗼𝘀𝘆𝗻𝘁𝗵𝗲̀𝘀𝗲 𝗱𝗲 𝗥𝗼𝗯𝗲𝗿𝘁𝗼 𝗔𝘀𝘀𝗮𝗴𝗶𝗼𝗹𝗶 (partie 7) - (Connaissance de soi)
𝗣𝗮𝗿𝗮𝗺𝗲̀𝘁𝗿𝗲𝘀 𝗱𝗲 𝗹𝗮 𝗰𝗼𝗻𝘀𝗰𝗶𝗲𝗻𝗰𝗲 𝗲𝗻 𝗣𝘀𝘆𝗰𝗵𝗼𝘀𝘆𝗻𝘁𝗵𝗲̀𝘀𝗲 𝗱𝗲 𝗥𝗼𝗯𝗲𝗿𝘁𝗼 𝗔𝘀𝘀𝗮𝗴𝗶𝗼𝗹𝗶 - partie 7
🚫 avant de lire cette partie 5, il est impératif que vous lisiez à votre aise, les chapitres précédent 1&2&3&4&5&6 Eddy
📌(partie 2) - (niveaux de conscience / sur la voie du centre)
📌(partie 3) - (Ouverture à l’inconscient)
📌(partie 4) - (Fonctions psychologiques.)
📌(partie 5) - (Rôle de la Volonté)
📌 (partie 6) - (Cadre Systématique)
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Psychosynthèse : Bien plus fondamental que la découverte de l'espace cosmique est celle de notre identification et potentiel, donnant lieu à l'élargissement de la conscience.
Le présent chapitre concerne directement les items quatre, cinq et six du diagramme de l'œuf présenté, c’est-à-dire le champ de la conscience et ses niveaux, et le centre même de cette conscience nommé le moi personnel ou alors le Soi transpersonnel, y considérant respectivement les domaines personnel et transpersonnel.
4. Le champ de la conscience
5. Le moi conscient ou soi personnel
6. Le Soi supérieur, spirituel ou transpersonnel
les autres items sont
1. L'inconscient inférieur
2. L'inconscient moyen
3. L'inconscient supérieur ou supraconscient
7. L'inconscient collectif
📌 Le classement et les nomenclatures des niveaux de conscience varient selon les différentes écoles et auteurs en Psychosynthèse.
La référence à des niveaux ou stades de conscience ne doit pas être comprise dans le sens linéaire du terme. Il ne s'agit pas d'une localisation à proprement dite. On peut cependant imaginer le domaine conscient comme un spectre dont le rayonnement se présente avec des couleurs et intensités différentes !
C'est dans cette perspective que l'on doit considérer les niveaux distinctement identifiés en psychosynthèse par le biais du diagramme de l'œuf où il est question des domaines conscient et inconscient à des niveaux et dimensions distincts.
Le fait de considérer différentes prises de conscience plus ou moins amples ou et intenses et toujours passibles de modification ! Il y a, chez n’importe qui, possède des domaines ou stades plus ou moins conscients dont on doit tenir compte. Mais il ne serait pas correcte d'exprimer qu'il y aurait des individus, les uns conscients et les autres dépourvus de conscience ???
Celle-ci est commune à tous, quoique les degrés soient différents concernant la prise de conscience de chacun !
🚫 avant de lire cette partie 5, il est impératif que vous lisiez à votre aise, les chapitres précédent 1&2&3&4&5&6 Eddy
📌(partie 2) - (niveaux de conscience / sur la voie du centre)
📌(partie 3) - (Ouverture à l’inconscient)
📌(partie 4) - (Fonctions psychologiques.)
📌(partie 5) - (Rôle de la Volonté)
📌 (partie 6) - (Cadre Systématique)
Ici, commence la partie 7
La Connaissance de soi
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
L’appel à la connaissance de soi, est un requis fondamental pour l’identification et l’épanouissement de l’être humain, mais, cet appel est fort loin de constituer une nouveauté !
Que l’on pense par exemple : aux mystères d’Éleusis dans l’antiquité grecque ou à la tradition alchimique très florissante du Moyen-Âge... où l’accent sur l’épanouissement et au développement personnel semblent à cette époque-là, déjà axés sur la question de l’identité humaine.
Pourtant, il y a eu aussi, par la suite, des réticences qui pèsent dans le manque ou le peu d’attention pour la connaissance de soi qui était déjà dispensé.
Peut-être, par réaction surtout contre le gnosticisme, et en rapport avec l’idéalisme et un certain moralisme subséquent.
Il y a eu une sorte d’aversion, voire un tabou historique généralisé envers l’objectif d’approfondir la connaissance de soi, d’où la remarque de Carl Gustaaf Jung :
« La nécessité d’une connaissance de soi-même est impopulaire à l’extrême ! »
Jung y voit alors un sujet que : « la morale tourne en définitif autour de cette ombre psychologique, que l’on s’efforce de nier et dont, à tout le moins, personne ne parle volontiers ! »
Le caractère ésotérique de certaines écoles de pensée, plus ou moins indépendantes de l’orthodoxie prédominante, ont parfois rendu suspicieux leur accent mis sur la connaissance de soi, y incluant plus spécifiquement la question au sujet de notre identification, le : ‘qui suis-je ?’, de même que l’injonction classique du : ‘connais-toi toi-même !’
Toutefois, un tel questionnement et pareille directive s’avèrent universels, en revenant toujours et partout !
La connaissance,
ou cognition, comme telle est bonne et libératrice.
L’orthodoxie ou l’hétérodoxie concernant les différentes gnoses restent l’objet controverse face aux différentes perspectives, approches et croyances !
Il y a toute une variété de concepts et d’attitudes par rapport à la «gnose» en grec 'gnosis', que l’on traduit par connaissance.
Lorsqu’on parle de gnosticisme, il est question plutôt du suffixe : «isme» qui dénote une position extrême, où il y
a, par rapport à la connaissance humaine, une absolutisation qui devient effectivement une forme de réduction de la connaissance, ce qui se trouve souvent attribué aussi aux courants théosophiques.
Hervé Masson :
« le théosophe connaît Dieu de l’intérieur et possède la Gnose immédiate par quoi la divinité et l’univers n’ont plus de secret pour lui ! »
Pourtant, le fait de prendre globalement la ' gnose ' comme une hérésie du savoir correspond à jeter le bébé avec l’eau du bain !
Avec Jacques Languirand et tout en suivant Raymond Ruyer :
« la gnose a été, autrefois, une philosophie religieuse, mélangée de judaïsme, de christianisme et de tradition orientale, qui mettait l’accent sur la connaissance – une connaissance dépassant les limites du rationnel-logique ! »
L’aspect le plus controversé de la gnose a été historiquement l’accent mis sur l’autosuffisance humaine concernant la connaissance, aussitôt que l’on oublie ses aspects pré-rationnel et trans-rationnel.
Par contre, il y a là un aspect existentiel qui n’écarte pas le souci d’une révélation que l’on peut oui ou non trouver, mais qui ne dispense pas le recours à toutes les virtualités du potentiel humain.
De pair avec maintes limitations que l’on puisse attribuer à ses approches, la pensée gnostique a eu le mérite de prendre au sérieux la connaissance de soi, tout en y voyant le fondement d’une philosophie de vie faisant appel à une expérience ésotérique, c’est à dire intérieure et profonde !
Le souci manifesté par rapport à la connaissance de soi est effectivement commun à toutes les cultures.
Selon le Confusionnisme, l’homme ne connaît pas l’homme tant qu’il ne découvre pas la bonté de la nature humaine.
Là-dessus, Confucius aurait ainsi exprimer :
« Il ne me dérange pas que je ne soit pas connu; ce qui me tourmente c’est de pas me connaître moi-même ! »
À l’intérieur de l’hindouisme, la connaissance de soi est fort préconisée.
Pour y arriver, il y a tout un système éducative d’action et de concentration, le yoga respectivement adressé :
- au corps (hatha-yoga),
- à l’âme (raja yoga),
- à la connaissance (jnana yoga),
- au sentiment (bhakti yoga),
- et à la volonté (karma yoga ).
Dans le Bouddhisme, il y a la conviction de la bonté humaine identifié à la nature de Bouddha, prête celle-ci à se manifester, en termes de connaissance de soi, par l’illumination.
Lao Tsê Ching disait :
« Celui qui connaît les autres est un sage; celui qui se connaît soi-même est un illuminé ! »
Dans le Christianisme, la question ‘qui suis-je?’ se pose constamment comme nécessaire et fondamentale chez bien de philosophes et mystiques, notamment à partir d’Augustin.
Celui-ci remarque que :
« les gens s’en vont loin pour s’émerveiller des hauts des montagnes, des ondes immenses de la mer, des larges courants des fleuves, de l’immensité de l’océan, des mouvement des étoiles – mais ils ne s’aperçoivent pas d’eux-mêmes ! »
Augustin se manifeste étonné de l’ignorance par
rapport à nous-mêmes :
« Il est quelque chose de l’homme qui ne connaît pas : c'est l’esprit de l’homme qui est en lui ! »
Depuis la Renaissance et grâce à la mise en place progressive de nouvelles méthodes scientifiques, on assiste en Occident à un phénomène croissant de distanciation concernant la façon traditionnelle d’envisager la nature, puis aussi en ce qui concerne l'humain !
De même que le scientifique sent le besoin d'un certain retrait par rapport à ses objets d'études pour mieux les comprendre.
L'humaniste, qu'il soit anthropologue, sociologue, psychologue ou autre... se place face à l'alternative d'accepter passivement certains modèles dépassés, ou de remettre en question non seulement l'héritage socioculturel mais ses légataires eux-mêmes.
Les grands mouvements de libération et d'émancipation des derniers siècles témoignent bien d'un processus de prise de distance en vue d'une autonomie permettant une identification supérieure, autant d'un passage d'une identification négative à une identification positive, cette dernière étant déjà considérée comme une démarche vers l’auto-identification !
Un tel processus peut prendre place aussi bien dans une collectivité que chez un individu, et il se trouve conditionné par les motivations et démotivations inhérentes à chaque individu, à chaque société, à chaque culture, à chaque époque et à chaque discipline !
Pour ce qui concerne la psychologie moderne, c’est à noter que même chez Freud la connaissance de soi semble être la question fondamentale.
Tel que remarqué par Abraham Maslow :
« la plus grande découverte de Freud est celle-ci :
La grande cause des difficultés psychiques est la peur de se connaître soi-même, de connaître ses émotions, ses pulsions, ses souvenirs, ses capacités, ses possibilités, sa voie ! »
Carl Gustaaf Jung fait voir que :
« la conscience individuelle ou conscience de moi est une conquête tardive de l’évolution ! »
D’abord c’est la conscience de groupe qui prédomine, laquelle, de nos jours, s’avère encore prédominante !
À son avis :
«notre conscience contemporaine n’est qu’un petit enfant qui commence à peine à dire ‘je’ ! »
En consacrant tout une de ses œuvres à la ' connaissance de l’être humain ', Alfred Adler tient compte des implications touchant les rapports sociaux... tout en considérant que :
« les hommes mèneraient entre eux une vie bien meilleure si la connaissance de l’homme était plus grande ! »
Et se dégage, selon lui :
« la nécessité est le devoir, pour la collectivité, d’acquérir et d’approfondir la connaissance de l’homme ! »
Celle-ci devient en même temps une découverte et un défi, une révélation qui implique une transformation.
Alors, ce même auteur est porté à conclure : que le plus difficile pour l'être humain est de se connaître et de se transformer !
Roberto Assagioli, le fondateur de la psychosynthèse pense que :
« la connaissance de l'homme est le point de départ pour toute la connaissance humaine ! »
On peut dire qu'une telle connaissance a été effectivement le grand objectif de sa vie, voire sa grande passion !
En fait preuves, ses recherches et ses activités étendues aux domaines :
- de la philosophie,
- de la métaphysique,
- de la spiritualité,
- de l'anthropologie,
- de la religion,
et surtout :
- de la médecine,
- de la psychologie
- et de l'éducation.
En 1907, Assagioli écrivait :
Nous accueillons avec ardeur l'admonition sévère gravée
au dessus de la porte du temple de Delphes : ' connais-toi toi-même ! '
En plus d’un simple accueil, il fait voir qu’il y est question d’en faire l’objet d’une orientation et expérience existentielle :
« Cela ne veut pas dire tout simplement : ‘analyse tes pensées et sentiments, examine tes actions’; il signifie aussi et avant tout ‘étudie ton Soi le plus intime, découvre ton vrai être, apprends ton pouvoir merveilleux’ ! »
En 1910, tout au début de sa carrière de psychiatre, Assagioli insiste sur le sujet avec conviction que : la connaissance de soi est le commencement et la fin de toute la sagesse humaine !
Plus tard, en 1922, il y revient plus spécifiquement avec son travail intitulé : L’étude de soi !
Convaincu que :
« nous négligeons de chercher à savoir ce que nous sommes et qui nous sommes, de chercher à nous connaître nous-mêmes et à nous posséder ! »
Dans une de ses notes personnelles, on trouve cette
remarque :
« Nous vivons en étrangers par rapport à nous-mêmes. Nous ne nous connaissons pas. Nous ignorons la partie la plus haute et la plus précieuse de nous-mêmes : notre âme ! »
Il remarque, en plus : combien une telle ignorance nous place à l’écart de nous-mêmes :
« Généralement, nous sommes 'hors de nous-mêmes', hors de notre être réel, distraits par mille sensations, impressions, préoccupations, souvenirs, projets d'avenir ! »
C’est notre responsabilité d’être égal à nous-mêmes et cela doit être notre premier objectif !
Mais Assagioli ne se contente pas de soulever le problème de l'identité humaine, et moins encore de regretter l'affligeante réalité de l’ignorance de l'être humain, face à la question cruciale de l'identité de soi.
Il fait de la psychosynthèse une psychologie de l'être guidée par le postulat de la connaissance de soi !
Au moyen de son approche, Assagioli se range parmi les
pionniers de la psychologie humaniste et existentielle représentée surtout en Amérique du Nord, notamment par Gordon Allport, Abraham Maslow et Eric Fromm dont les œuvres sont caractérisées par l'attention tant à l'expérience
d'identification qu'à son concept.
L’approche assagiolienne devient une expression originale et un certain aboutissement du mouvement humaniste existentiel relié à une nouvelle prise de conscience sur l’identification humaine, auparavant moins facilitée par l'état de la culture, tout en contribuant à une prise de conscience et une émancipation de nos jours plus fortement généralisée, quoique parfois superficiellement enracinée !
1 - Anthropologie sous-jacente
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Le fait de la bonté ontologique de la nature humaine est devenu une thèse philosophiquement et psychologiquement défendue ou plus moins rejetée, autant dans la pensée orientale que dans la pensée occidentale.
Ainsi, le confucianisme tel que présenté dans la philosophie de Mencius, fait appel à la moralité :
« non pas parce qu'il faut que nous soyons bons, mais
parce que notre nature (humaine), est la dimension fondamentale de l’humanité, spontanément s’exprime en termes de bonté ! »
Contrairement à Mencius, Hsun Tzu considère fondamentalement mauvaise la nature humaine, tandis
que Kao Tzu la considère ni bonne ni mauvaise en tant que telle !
Alors que l’école de Chuang Tzu prône que la nature humaine est au delà du bien et du mal.
Tu-Way-ming fait voir que dans la philosophie traditionnelle du confucianisme :
« les êtres humains ne sont pas tout simplement des animaux rationnels; ils sont des êtres qui intègrent dans un tout esthétique, politique, social, historique et le métaphysique ! »
Roberto Assagioli, de pair avec Abraham Maslow, Carl Rogers, et les principaux représentants de la psychologie humaniste en général, importe à son approche psychologique ' La Psychosynthèse ' une conception optimiste axée sur une philosophie qui prône la bonté et la beauté foncières du genre humain !
Assagioli n’oublie pas pour autant l'existence de forces conflictuelles :
« Prendre en considération seulement les côtés positifs, en négligeant les aspects négatifs de la nature humaine, est insuffisant - et cela justifie l'hostilité qui rencontrent souvent les conseils superficiellement optimistes sur le moyen de parvenir à la paix de l'esprit ! »
L’optimisme reconnaît le mal là où il existe, mais il le fait dans une attitude positive !
La bonne ou la mauvaise utilisation de notre potentiel provient de la liberté et fait appel à la responsabilité !
Cela ne contrarie pas le principe scholastique de : l’esse qua esse bonum est = ' l’être en tant que tel est bon ! ', la bonté essentiel de l’être, était d’ailleurs déjà proclamée
dans le Confucianisme, par Mencius, plusieurs siècles avant l’ère chrétienne !
Dans la pratique, il n’est pas toujours question de tout à fait remplacer un défaut par sa vertu opposée.
Dans un degré ou l’autre, l’un et l’autre sont souvent présents au niveau de la personnalité, plus ou moins égoïste et orgueilleuse, mais en même temps on reste altruiste et l’humble, au moins au niveau du Soi transpersonnel.
L’important, c’est de reconnaître les deux polarités, tout en y considérant la possibilité des qualités de nos défauts, aussi bien que des défauts dans nos qualités, tout en essayant de réduire le mal et progresser dans le bien !
Assurément, une conception positive de la nature humaine ne doit pas constituer prétexte pour minimiser la tendance du mal chez l’être humain !
Jung considère une telle tendance :
« infiniment plus lourde qu’il n’y paraît ! »,
tout en étant :
« à tort qu’elle est sous-estimée ! »
Cela fait appel à la découverte de l’aspect ombreux de la personnalité destiné à être éclairé et intégré, d’où sa remarque :
« Nous n’atteindrons jamais notre totalité si nous n’endossons pas les obscurités qui sont (vivent) en nous ! »
Cependant, on pourra utiliser une métaphore de mine actuelle et dire que l’ordinateur (le centre de conscience) est correct, même quand les programmes (les contenus bio-psychiques) peuvent faillir.
Kahlil Gibran s’exprime :
« Vous êtes bons lorsque vous êtes un avec vous-mêmes. Pourtant, lorsque vous n’êtes pas un avec vous-mêmes, vous n’êtes pas mauvais ! »
Il ajoute encore la remarque suivante :
« Vous n’êtes pas nécessairement mauvais
lorsque vous n’êtes pas bons ! »
Par contre, Assagioli n’a pas explicitement développé un cadre théorique soutenant une anthropologie particulière.
Toutefois, il y a une anthropologie sous-jacente à sa pensée caractérisant son système psychologique. Elle mérite d’être identifiée pour des raisons de clarté, faute de quoi son système psychosynthétique risque de se perdre dans la
confusion de l'arbitraire.
Au prime abord, on peut avoir l’impression ou même conclure que la psychosynthèse est axée sur un modèle dualiste.
En fait, les désignations et distinctions systématiquement utilisées en termes ou ressemblance de polarités et opposés, tels que :
- moi et Soi,
- personnel et transpersonnel,
- conscient et inconscient,
se prêtent, au moins d’emblée, à une telle perception.
Ce modèle semble caractériser plutôt une phase élémentaire de la psychosynthèse !
Effectivement, tant que prédominent les éléments de ce
qu’Assagioli nomme “ la personnalité ordinaire”, il y a la tendance à sentir et à réagir non seulement en termes de dualité, mais de dualisme pratique !
Plus caractéristique encore de la pensée assagiolienne et donc de son approche psychologique semble, au prime abord, un modèle hiérarchique.
Dans le ' diagramme de l’œuf ' présenté au cours du premier chapitre, il y est question de :
- ' Soi supérieur '
et de ' moi inférieure ',
ainsi que des niveaux :
- inférieurs,
- moyens
- et supérieurs
et autant de la conscience que de l’inconscient.
Assagioli y offre une sorte d’axe centrale ou ' échelle de Jacob ' qui devient l’attirance et le défi permanents de toute la démarche psychosynthétique !
Tout en considérant les composantes humaines :
- corps,
- âme
- et esprit,
le système Assagiolien s’avère particulièrement hiérarchique, donnant :
à l’âme une supériorité sur le corps,
ce qui est très commun non seulement dans la philosophie orientale, mais aussi dans à la pensée chrétienne en Occident !
Cela semble cependant toucher la forme plutôt que la pensée.
C’est un modèle intégrateur, celui qui caractérise effectivement le système psychosynthétique.
Avec Riane Eisler, il faut bien faire la distinction entre les hiérarchies de domination et les hiérarchies d’actualisation, celles-ci toujours en rapport avec l’inclusion en tant que terme de la ' différentiation ' et de ' l’intégration '.
L’échelle y est pour que nous puissions nous en servir et non pas pour y voir une gradation qualitative !
Si au lieu d’une échelle on illustre les différentes composantes de l’humain par des cercles concentriques, il y aura alors le sens de l’intégration dans le tout, plutôt que celui d’une hiérarchie discriminatoire.
Cela va effectivement à la rencontre du sens originel du
mot hiérarchie composé des termes yeros (sacré) et arch (autorité), au sens d’un pouvoir qui pénètre tout et intègre en même temps !
Il n’y est pas question de confondre la bonté avec
la perfection, mais d’affirmer l’intégrité ontologique de la nature humaine !
Cela fait penser à la doctrine néoplatonicienne, laquelle malgré sa teneur dualiste fait preuve d’un optimisme radical au sujet de la partie supérieure de l’âme jamais affectée par le mal !
La conception anthropologique soutient l'approche psychologique d'Assagioli, on peut voir avec Sebastiano Tilli, des inspirations ou une affinité, avec les concepts philosophiques d'Edmund Husserl et de Martin Heidegger.
C'est de considérer encore l'effet initialement subi sous l’influence des travaux d’Edward Carpenter, Hermann Keyserling, Evelyn Underhill et de Richard Bucke, aussi bien que les apports plus ou moins directs provenant de la
pensée orientale.
C’est à considérer en plus l’appartenance hébraïque du
théoricien du système psychosynthétique et donc l’impact de la pensée juive dans sa conception anthropologique !
Compte tenu de la spécificité du Soi et du caractère bio-psycho-spirituel de la nature humaine caractéristiques à l’approche assagiolienne,
Laura Boggio Gilot y voit une anthropologie à la fois :
holistique : où la nature humaine et universelle sont identiques et se trouvent en interaction;
holographique : ayant des niveaux différentiés mais fondamentalement identiques;
hiérarchique : y incluant des degrés complémentaires d’organisation et d’expression ;
transcendante : où la vie est le fruit d’un principe transpersonnel.
En termes de psychosynthèse, il faut comprendre le principe de la complémentarité des domaines :
- individuel,
- interindividuel
- social,
- et universel,
y considérant le niveau personnel et le niveau transpersonnel.
Le fait d’isoler ces éléments les uns des autres ou de les opposer priverait l’approche psychosynthétique de données constitutives et propres à sa spécificité anthropologique.
L'homme Assagiolien véhicule une
conception 'holistique'
ou
systémique qui s’intègre
au sein de la société et de l'univers.
Bruno Caldironi cite :
« cet homme, bien qu'unique et ineffable dans son individualité, ne peut vivre isolé, puisqu'il entretient des rapports d'interdépendance et de subordination avec d'autres individus, avec la société, et avec la propre vie universelle ! »
À la hauteur du Soi transpersonnel, l’individualité et l’universalité se rencontrent sans confusion ni exclusion !
Limiter la psychosynthèse à la pathologie c’est faire du réductionnisme; exclure le pathologique c’est embarquer dans l’idéalisme !
La foi dans le Soi est déjà une lueur de sa lumière, quoique la voie à parcourir reste parsemée de creux plus ou moins obscures.
Néanmoins, la conviction de la bonté essentielle et la conscience du potentiel humain, deux caractéristiques de l'anthropologie assagiolienne semblent constantes et ont tendance à prévaloir autant dans l’éducation que dans la rééducation psychosynthétique.
La conception positive de l’être humain foncièrement
reliée à celle du Soi, dont la réalité est simultanément perçue comme individuelle et collective, particulière et universelle, rende inséparables et conjointement positives, avec l’anthropologie, autant dans la sociologie que dans la cosmologie.
La psychosynthèse fondamentale syntonise ainsi, avec la même dynamique, les dimensions individuelle, sociale et universelle.
Dans cette perspective, Assagioli considère son approche comme étant révolutionnaire, dynamique et créatrice !,
Le système Assagiolien apporte un regard hautement positif de l’humain accompagné de la perspective et de l’exigence d’un rapport harmonieux entre l’individuel, le social et l’universel !
2 – L’énigme de l’identification
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Grande serait la tâche en vue d’un exposé sur la pensée des principaux auteurs donnant origine aux modèles de l’identification humaine.
Il semble cependant important d'offrir un fil historique, un sommaire de données portant à mieux comprendre la pensée d’Assagioli, tout en situant ainsi son ' approche psychologique ' dans un contexte plus vaste.
Cela apportera au ' modèle psychosynthétique ', conjointement des clarifications et une plus grande cohérence et consistance, au moins en termes d'un cadre conceptuel !
Tout ce qui vient d’être présenté au sujet de la connaissance et des voies se revêt d’implications majeures, lorsqu’il y est question de traduire conceptuellement : l’identité humaine.
Deux grands modèles s’émanent de différents courants de la pensée, qui méritent d’être étudiés, dans la mesure où ils tendent à conditionner, favorablement ou non, la connaissance de soi !
Il s’agit :
du modèle dichotomique ou binaire,
et
du modèle trichotomique ou trinitaire,
lesquels on passe à considérer dans leur genèse et en rapport avec la psychosynthèse !
2. 1 Modèle dichotomique: corps-âme.
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
L’héritage culturel se trouve plein d’ambivalences en ce qui concerne les concepts, l’origine, les rapports, aussi bien que les attitudes conséquentes envers la dyade âme-corps.
La plupart du temps, elle s’y trouve associée aux polarités esprit-matière.
Le modèle dichotomique ' corps-âme ' prévaut surtout dans la philosophie orientale en général, et parfois, il y est affirmé
comme dualisme radical, en particulier dans le manichéisme. La tradition védique de l’Orient tends à dévaloriser le corps jusqu’au mépris, par rapport à l’âme y considérée, elle seule, la source de l’identification humaine.
Au-delà des apparences et des doctrines plus élémentaires il y a la conscience, ce n'est pas une disparition, mais plutôt d’une transformation donnant lieu au ' corps de lumière ' !
C’est bon de noter la limite, le bouddhisme prône le
dépassement de la dualité et rejette le dualisme, lorsqu’il présente comme but : l’affranchissement de toutes les oppositions menant à l’expérience ultime de l’unité réelle.
Bouddha aurait parlé à ses disciples d’un corps incorruptible créé à partir du corps corruptible, tout en étant alors le corps
incorruptible doué de facultés transcendantales !
La philosophie du Hatha-Yoga (le Yoga de la terre) promeut l’union avec le Soi transpersonnel par le biais du corps physique, alors conçu comme un moyen et non pas comme un obstacle à l’évolution de l’esprit !
En Occident, la pensée grecque est fortement marquée par une vision dualiste, contrairement à la pensée juive caractérisée par une conception plus unitaire, tandis que la tradition chrétienne s’avère inspirée de toutes les deux.
On trouve le modèle binaire chez des auteurs occidentaux,
nommément dans les philosophies de Platon, dans le néo-platonisme.
La pensée chrétienne a progressivement valorisé le modèle ou conception dichotomique.
La mystique islamique tend également à considérer le corps comme une simple robe de l’âme, voire le lieu de son exile. Il y a toute une spiritualité qui glisse dans le spiritualisme dualiste, portant alors à considérer l’âme comme un oiseau renfermé dans le cachot de la matière !
Carl Gustav Jung, bien informé sur la pensée occidentale et orientale, remarque : « combien, on a été éduqué à voir dans le corps non plus un ami douteux ! »
Toutefois, malgré la portée de la tendance dualiste, Jung se montre convaincu que :
« personne aujourd’hui ne pourrait oser fonder une psychologie sur l’hypothèse d’une âme autonome et indépendante du corps ! »
La psychologie, surtout dans le courant transpersonnel, réagissant contre le monisme matérialiste, semble parfois
fort teintée du dualisme gnostique.
Une fois prise à la lettre, la formule assagiolienne de désidentification :
« j’ai un corps,
mais je ne suis pas mon corps ! »,
souvent utilisée, en un exemple !
Une telle désidentification concernant le corps peut tomber dans une ambiguïté, ou dû moins, dans un ' dualisme utilitariste '.
Assagioli ne semble pas loin d’une telle position, lorsqu’il se sert de la métaphore suivante :
« L’automobile peut être facilement considérée - on pourrait presque dire vécue- comme symbole du corps et aussi de toute la personnalité, donc le moi conscient peut utiliser. »
C’est de même quand il conçoit le corps comme :
« un instrument précieux d’action et d’expérience du
monde extérieur, mais seulement un instrument qui en fin de comptes - n’est pas moi-même ! »
Ailleurs, tout en insistant de ne pas nous identifier avec notre corps et de le considérer “comme un instrument”, Assagioli finit à faire l’appel à une attitude indulgente !
Pourtant, le concepteur de la psychosynthèse rejette clairement le matérialisme organiciste. Déjà en 1929, il s’attaquait aux préjugés matérialiste du siècle dernier, selon lequel la psyché, l’âme, n’était qu’une simple sécrétion du corps !
John Firman fait remarquer l’influence sur Assagioli des systèmes de la pensée néoplatonicienne et gnostique à travers le courant théosophique.
Il y voit toute une tendance commune à :
“considérer la personne humaine comme un ‘soi avec un corps’, plutôt que d'une ‘unité soi-corps’ à caractère holistique.”
Cela porte Firman à voir chez l’auteur de la psychosynthèse une propension vers une conception nettement dualiste à caractère gnostique, au point de considérer : “ dépourvue du fondement ontologique l’unité corps et soi.”
En effet, il semble avoir dans le langage Assagiolien une nette coloration dualiste qui se reflet dans son système psychosynthétique, notamment au sujet du processus de
désidentification.
Cela peut plaire à une conception plus ou moins gnostique de la nature humaine !
Cependant, on peut relativiser un tel langage.
Le dualisme chez Assagioli semble en effet plus proche du vocabulaire utilisé que du cœur de sa pensée en disant :
«C'est de la nature de l'Esprit d'être au dessus de tout dualisme et conflit. Il est Unité. L'esprit renouvelle, coordonne, harmonise et unifie, là où il est présent et actif ! »
La charnière du problème n’est pas au niveau de la distinction entre corps et âme, mais dans leur séparation ontologique.
Nous sommes toujours par nature l’un et l’autre, indépendamment d’en avoir ou non autant la conscience que de l'accepter.
Tant que l’on fait la distinction entre l’âme et l’esprit, tout en prenant celui-ci comme synonyme du Soi, il y aura de la place aussi pour le processus de désidentification et auto-identification concernant notre âme.
C’est dans ce sens que l’on peut prendre distance par rapport à l’âme !
Dans le processus qui mène à l’auto-identification, la phase de désidentification par rapport au corps, ou à n’importe quelle composante ou rôle au niveau de personnalité, nous aide à éviter le piège d’une identification parcellaire.
Toutefois, l’objectif final c’est l’auto-identification au niveau de la synthèse âme et corps.
La désidentification par rapport au corps se fait en vue d'une intégration supérieure, jamais en fonction d'une exclusion quelconque.
Selon Assagioli :
« se désidentifier du corps ne veut aucunement dire le tuer ou le négliger ! Il faut que nous vivions à tous les niveaux une immanence complète à tous les niveaux de transcendance. »
En réalité, corps et âme constituent deux éléments ontologiquement inséparables, à la fois nécessaires et également valables en termes d’identification humaine.
Quoique distincts, ils sont ontologiquement indissociables.
La psychosynthèse s’occupe de l’être humain historiquement
considéré, où il ne peut pas avoir séparément des expériences exclusivement corporelles ou seulement spirituelles.
L’être humain y est toujours caractérisé par les composantes corps et âme !
Nous sommes intégralement : un et l’autre !
Âme et corps participent inséparablement à n’importe quelle expérience humaine.
Ils sont alors conjointement sujet
et objet du vécu humain.
Il s’agit assurément de deux composantes d’un seul tout.
Sans le corps, de même que sans l’âme, il n’a pas d’entité humaine telle qu’il nous est donné de l’identifier dans l’espace et dans le temps.
Ce n’est pas dans le corps, mais plutôt par le corps que nous vivons.
Au niveau de l’esprit, autant le corps que l’âme participent à l’expérience dite du sommet ou mystique.
Celle-ci est au-delà du dualisme.
Au niveau du Soi, il n’y a plus de place pour l’exclusion. Tant qu’on est au niveau de la personnalité, il y a toujours un certain degré de schizophrénie existentielle.
Toutes les conceptions ou méthodes éducatives qui créent une parenthèse soit pour le corps, soit pour l’âme, deviennent aliénantes !
Le théoricien de la ' psychosynthèse ' distingue corps et âme, non pas pour les opposer, mais pour les harmoniser dans l’expérience de leur synthèse.
Celle-ci débute au niveau personnel et peut atteindre le domaine et caractère transpersonnel, au niveau du Soi spirituel.
Sans prôner l’incompatibilité entre âme et corps, Assagioli semble cependant parfois attiré par des concepts hiérarchiques et prisonnier au moins d’un certain dualisme.
il exprime aussi en 1925 :
« Selon la nouvelle mystique, le corps n'est pas un ennemi de l'esprit; tout au contraire, il est ou doit devenir son instrument précieux, son serviteur fidèle et son temple ! »
Toutefois, il ne semble pas du tout incliné à y voir un principe dualiste basé dans l’incompatibilité esprit-matière, lorsqu’il affirme :
« L’esprit et la matière, apparemment et relativement ‘ennemis’, peuvent et doivent s’unir harmonieusement dans une synthèse dynamique et dans l’unité de la vie ! »
Le fait d’entrer ou d’être centrés en nous-mêmes, n’a pas une connotation d’espace physiquement mesurable ou définissable !
Autant dans le corps que dans l’âme humaine, il y a l’appel et la possibilité de la synthèse au niveau de l’esprit, c’est-à-dire du Soi, qui selon Assagioli est : ' synthèse et unité '.
À ce niveau, Assagioli les voit comme :
« des notes différentes non plus en opposition,
mais complémentaires
et
qui s’harmonisent l’une avec l’autre !»
Âme et corps constituent et font appel en même temps à une synthèse plus évoluée, toujours en provenance du Soi, la source de leur unité essentielle et de leur expression particulière.
Autant le corps que l'âme sont à la fois éléments constitutifs de l'identité humaine et véhicules de l'auto-conscience supérieurement révélée au niveau du Soi spirituel, tout en étant celui-ci pareillement un élément constitutif de la même et seule identité.
De par sa propre conception bio-psycho-spirituelle, la
psychosynthèse préconise une acceptation de toutes les composantes de l'être humain, y compris toutes les manifestations et fonctions psychosomatiques !
Inspiré de la légende des centaures : Ken Wilber tient que l’être humain, tout loin de considérer son corps comme un animal sauvage à maîtriser par l’esprit, est effectivement un cavalier en contrôle de son cheval, mais aussi un conducteur qui est un avec son cheval !
Ce n'est pas une psyché divorcée qui contrôle le soma, mais une unité psychosomatique en maîtrise de soi et en gouvernement de soi !
Pire que de perdre le contact avec le corps, remarque-t-il, c’est de : « perdre le contacte avec l’unité corps-esprit ! »
Une telle dichotomie nous porterait à considérer le corps comme quelque chose non seulement extérieure, mais aussi inférieure, où il y a un geste d’impatience de l’âme soucieuse de se débarrasser de son chaînage physique.
Le mépris envers le corps peut atteindre des formes pathologiques de la somatophobie qui vont dès le gêne
jusqu’au masochisme.
Cela affecte le rapport non seulement avec nous-mêmes, mais aussi avec autrui, dans la mesure où le physique doit-être en même temps présence et participation.
Le corps est un amplificateur et non pas pas un réducteur de la conscience.
Sans la valorisation et l’inclusion du corps, on ne peut pas avancer dans les sentiers de l’esprit !
Assagioli remarque :
« Dans le passé, l'approche religieuse et mystique a mis
indûment l'emphase sur la dualité; cela a eu une fonction utile, mais a créé aussi un conflit exagéré (qui, en termes psychiatriques, peut être appelé schizophrénie) entre l'esprit et la matière, entre la personnalité et l'âme.
Les mystiques ont parlé de 'tuer' la personnalité, de 'tuer' le désir, et ainsi de suite... Cela n'est pas sain et n'est plus désormais acceptable par la mentalité moderne. De nos jours, un tel langage n'éveille plus l'intérêt ! »
Tout en tenant compte du domaine religieux, il observe :
« Dans la religion, la conception pessimiste de la nature humaine et l'idée de 'sauver les âmes', couplées à l'épouvantail de la damnation éternelle et l'obsession du péché ont tourmenté un très grand nombre d'êtres humains
et produit toutes sortes de troubles nerveux et psychiques ! »
Un tel pessimisme survient notamment au cours de la chrétienté au sujet de la nature humaine considérée fondamentalement déchue !
Note : Pour la pensée chrétienne la mort est considérée non pas une séparation définitive de l'âme d'avec le corps, mais plutôt une expérience mystérieuse de désidentification ouverte sur la synthèse désignée : la résurrection, celle-ci en rapport à ce qu’on nomme le corps glorieux et aussi le corps psychique.
Augustin maintient que le corps, comme l’esprit, partage de la gloire du Paradis (DeGenesi ad Litt. VIII, I). Il faut d’ailleurs noter que la théologie chrétienne de la résurrection du corps est fondamentalement positive à son égard, quoique mystérieusement voilée et soumise à des interprétations variées.
Ce qui était la nécropole (cité des morts) pour les Grecs, devient pour la chrétienté le cimetière (le dortoir).
En effet le corps y reste toujours à part entière, de pair avec l’âme, tous les deux considérés comme expression substantielle de l’identité humaine. La résurrection traduit une intégration jamais transcendance par rapport au corps physique. C’est à partir de la conscience du corps, que l’on peut découvrir et ouvrir le cœur souvent considéré le logis de l’âme.
Ken Wilber tient compte d’un état de maturité caractérisé par une trans-différentiation dans laquelle corps et âme donnent lieu à l’intégration idéal.
Contrecarrant la fragmentation dualiste, remarque-t-il ailleurs :
« l’individu ne peut plus s’accrocher à ‘la moitié’ du vieux dualisme, tel que, par exemple, son âme et non pas son corps. »
Tout en soulignant la responsabilité que l’on a d’inclure dans le processus d’identification les activités organiques, il tient que :
« peu de gens ont perdu leur mental, mais la plupart ont déjà perdu leur corps ! »
La désidentification par rapport au corps a pour objectif l'intégration à un niveau supérieur; jamais le rejet, ni l'exclusion ou l'opposition.
Au niveau du moi personnel, il y a lieu pour l’intégration, mais c’est au niveau du Soi que la personnalité est élevé au niveau de l’identification transpersonnelle, c’est-à-dire l’auto-identification qui traduit l’union et l’harmonie avec soi-même, avec les autres et avec l’univers.
C’est à noter que l’identification au niveau du Soi constitue l’expérience par excellence d’un vrai chez-nous, à ne pas confondre avec celle de se sentir bien dans sa peau.
En d’autres mots : la preuve d’une bonne identification n’exclut pas les épreuves et malaises de la vie !
Certains auteurs, tels que Meister Eckhart et Hildegarde de Bingen, préfèrent l’idée de concevoir :
le corps à l’intérieur de l’âme au lieu de voir l’âme à l’intérieur du corps !
En réalité : corps et âme ne sont pas des domaines juxtaposés et moins encore des opposés, mais des manifestations d’un seul principe vital.
Dans l’identification au niveau du Soi, ce qui est exclu n’est pas le physique, mais le conflit entre corps et âme. Il serait un contresens d’imaginer, par rapport au corps, une séparation, un jugement de valeur et encore pire, une attitude de supériorité et de mépris venant du Soi, le synonyme de l’âme ou à mieux dire de l’esprit.
Une telle conception et attitude ne se trouvent qu’à certains niveaux des différentes philosophies et croyances !
Certes, il faut bien noter que telles théories, spéculations et doctrines concernant la vie après la vie dépassent le domaine spécifique de la psychosynthèse qui s’occupe de l’être humain dans l’ici et maintenant.
Pourtant, elle ne doit pas se dispenser de prêter attention à l’impact réel de chaque croyance dans les situations concrètes du vécu de chacun, et donc en rapport étroit avec la connaissance de soi !
Tout en faisant la liaison entre l'expérience sensorielle et l'expérience mystique chez les cultures dites primitives, Mircea Eliade met en évidence la supériorité d'une situation primordiale et supérieure des shamans dont les extases se caractérisent par l'ascension autant du corps que de l'âme, sans l'exclusion donc des données sensorielles.
Il y a la permanence de la totalité de l’être humain et subséquemment l’impossibilité de la dichotomie corps-âme.
La conception cartésienne d'une union à peine accidentelle entre corps et âme semble compromettre une telle idée de l'humain.
La séparation et plus encore l'opposition entre corps et âme signifient, par conséquent, un recul sur la voie de la synthèse.
Celle-ci fait appel non pas seulement à leur complémentarité, mais encore à leur union permanente, sous peine de mettre en cause la vraie identité humaine.
L’union radicale corps-âme donne lieu à la remarque de Louis Lavelle :
« Le problème est de savoir comment l’âme et le corps peuvent se séparer, et non pas comment ils peuvent s’unir ? »
La croyance à la résurrection du corps est reliée au principe de leur unité essentielle, faisant appel à une union substantielle qui va bien plus loin qu’une sorte de lien fonctionnel et occasionnel.
Tout ce qui affecte le corps a son impact dans l’âme aussi, et vice versa !
Corps et âme, une fois considérés à la lumière de l'esprit, loin de constituer des éléments antagoniques et en lutte, deviennent, à part égale, des manifestations distinctes et un fondement inséparablement complémentaire de l'identification humaine.
Pour Augustin : le corps est l'époux de l’âme !
Celle-ci ne semble jamais menacée face à la mort physique, lorsqu'on accepte la corporéité dans son sens le plus global, tout en ayant des expressions autres que l’aspect physique ou et somatique.
Les croyances selon lesquelles le corps comprend, en plus du côté physique les dimensions :
- éthérique,
- astrale,
- mentale,
- causale,
- bouddhique ou christique,
- et atmique,
se prêtent à une conception et attitude moins réductionnistes !
La mort et la séparation du corps physique, de même que le remplacement permanent des cellules, n’est pas synonyme de la perte du corps, tout court.
Celui-ci est conjointement élément constitutif de ce qu’on est plutôt que quelque chose que l’on a ! Ce qui en même temps valorise et relativise la formule assagiolienne de la désidentification concernant le corps physique.
On peut dès lors accepter, avec Ken Wilber : le fait d’allier chaque état de conscience à un corps correspondant, parmi ceux que l’on vient de nommer.
Lorsque l’on propose la désidentification par rapport au corps, on doit le faire en fonction d’une vraie identification qui l’intègre dans le vécu en toutes ses étapes et manifestations.
La doctrine chrétienne concernant l’état final en perpétuité d’un corps glorieux semble offrir un appui à cette perspective.
Ce corps de gloire n’exclut pas le corps physique, dès que l’on y admet une sorte de métamorphose !
La position de Roberto Assagioli semble, au prime abord, plutôt ambiguë, lorsqu’il y est question de désidentification par rapport à la composante physique.
John Firman n’hésite pas à voir dans la formule assagiolienne de désidentification :
« j’ai un corps mais je ne suis pas mon corps !» :
comme une manifestation morphologique : la peur de la forme. Cela s'accentue en plus par les formules de désidentification concernant les émotions et le mental.
Une telle désidentification de toute la dimension psycho-somatique porte à concevoir et réduire l’être humain à une sorte de pur esprit dépourvu d’immanence et alors déshumanisé.
Par contre, Assagioli manifeste aussi une attitude morphologique à cet égard, tout en clarifiant :
« la désintensification corporelle ne veut pas dire mépris. Le corps est notre instrument précieux, il est ici le moyen nécessaire pour l’expérience. Il est à considérer comme une réalité vivante, intelligente, imprégnée d’activité psychique.»
Souvent, il y a la tension entre l’idée d’avoir un corps et d’être un corps. De toute façon, c'est une conception à la fois d’immanence et de transcendance qui porte à clarifier que le fait d’être un corps inclut et dépasse la simple possession d’un organisme physique !
Celui-ci constitue élément intégrant et permanent de l’identité humaine.
La décomposition des cellules qui accompagne la vie et qui culmine avec le décès, est loin de constituer une séparation, elle reste une composition qui fait le lien avec l’univers, en termes de co-identification.
Quelle est, effectivement la position fondamentale d’Assagioli ?
Si l'on reprend comme un postulat sa formule de désidentification :
« J’ai un corps, mais je ne suis pas mon corps ! »,
on ne prête pas alors à la psychosynthèse une coloration typiquement dualiste !
Au prime abord, et tel que référé, sa pensée semble plutôt ambivalente à cet égard.
En même temps qu’il déclare l’inclusion totale du corps en psychosynthèse, Assagioli promeut son acceptation en termes qui parfois s’avèrent ouvertement réductionniste par rapport même à son approche.
Si l’on s’attache par exemple à cette réflexion de lui faite dans les termes suivants :
« Si nous considérons le corps comme un précieux et valable instrument d’expression de notre être intérieur, nous pouvons l’aimer, le développer, et en prendre soin, justement comme un Arabe aime son cheval et un Américain aime son car, comme une extension du soi, mais non pas comme le vrai Soi. Je ne suis pas le car. Je ne suis pas mon corps. Le soi détaché est comme le conducteur de l’automobile. On peut dire ‘mon corps’ comme quelque chose d’extérieur, d’objectif, en tant qu’instrument du vrai être ! »
Une telle conception et une telle attitude plus ou moins teintées de dualisme, peuvent bien biaiser toute la théorie et la pratique du processus de désidentification et d’auto-identification, laquelle est incompatible avec une chosification de l’humain, même que partielle. Lorsque le concepteur de la psychosynthèse utilise pour le corps physique l’image d’un scaphandre dont l’âme s’en sert, il semble tout simplement le chosifier !
Mais Assagioli y voit aussi un autre rôle :
« celui d’être transmuté, peu à peu envahi et transfiguré par l’âme ! »
Ken Wilber tient compte du : ' niveau de l’ego ' qui ignore la totalité psychosomatique, où :
« l’homme imagine qu’il a un corps, dont il est en possession de la même façon qu’il possède un car ou une maison. »
En effet – remarque-t-il :
« l'homme applique des droits de propriété à des aspects de son organisme, tout en réduisant alors, à ses propres yeux, sa propre valeur ! »
Dans la triade humaine corps-âme-esprit : on peut parler de vibrations de l’énergie en fréquences différentes, mais
jamais d’entités séparées !
Lorsque Assagioli prône pour la désignation de la " bio-psychosynthèse ", il semble bien tenir compte d'une synthèse des éléments autant physiques que psychiques.
Il remarque, le danger de l'extrême où les identifications au monde émotionnel ou au monde intellectuel prennent tellement de place que le corps est effectivement négligé et même regardé comme une limitation à peine tolérable.
Tandis que l'école organiciste présente la psyché comme un produit du métabolisme cérébral véhiculé par le système nerveux.
Le concepteur de l’approche psychosynthétique, avec Tusques, John Eccles, Kare Raimund Popper, et Sherrington entre autres...
Distingue certes le corps et l'âme, mais pour les considérer comme effectivement inséparables dans le processus d'intégration et d'auto-identification !
Nonobstant des nuances à considérer : la psychosynthèse considérant certains termes utilisés par son fondateur, cependant, elle n'est pas à l'abri d'une interprétation et d'une pratique conséquente à teneur dualiste, eu égard à la désidentification par rapport au corps.
Comment maintenir la formule assagiolienne suivante :
« J'ai un corps, mais je ne suis pas mon corps ! »,
sans renforcer la vieille antinomie du corps et de l'âme ?
Ne reste-t-il pas le Soi, soit-il synonyme de l’âme ou de l’esprit, la seule source d'identification véritable ?
Le mot 'psychosynthèse’, n'évoque-t-il plutôt pas une synthèse essentiellement psychique ?
L’appel au processus conjoint de désidentification et d’auto-identification semble contredire pareille déviance qui demeure cependant toujours possible, tant en théorie que dans la pratique !
Néanmoins, la psychosynthèse prône une conception foncièrement bio-psychologique de la vie, de sorte qu'il n'y a pas de psychosynthèse que ne soit en même temps une
biopychosynthèse.
Assagioli insiste donc :
« Quand je parle de psychosynthèse, cela signifie bio-psychosynthèse, avec pleine d'inclusion et d'acceptation du corps ! »
Bien souvent, on n’a pas même la conscience d’avoir un corps, et moins encore d’être un corps, sauf quand celui-ci réclame de l’attention en vue de ses besoins élémentaires, ou par le truchement de la fatigue et de la douleur !
Pourtant :
la conscience du corps que j’ai est déjà un pas en avant vers l’identité consciente du corps que je suis !
Corps et âme se fondent dans cette prise de conscience, où il y a cependant un troisième élément à considérer.
John Parks avertit :
« N’oublions pas que bio, en psychosynthèse, signifie que l’être humain est un être : physique, psychique, et spirituel ! »
On en parle dans le chapitre suivant !
2.2 Modèle trichotomique: Corps-âme-esprit
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
En vue de mieux préciser et présenter le modèle trichotomique corps-âme- esprit qui semble propre à la psychosynthèse, il faut tenir compte du courant de la pensée qui précède, qui conditionne et qui paraît directe ou
indirectement inspirer ou dû moins être en affinité avec l'approche psychologique assagiolienne.
Le modèle trinitaire ou triparti devient historiquement prédominant.
Adolphe Huxley voit l’affirmation trinitaire de l’humain comme un élément central de la Philosophie Pérenne :
« Tous les interprètes de la ' Philosophia Perennis ' font, sous une forme ou une autre, l'affirmation que l'homme est une sorte de trinité composée de corps, de psyché et d'esprit. »
Note - Il y ajoute la remarque suivante :
« Saint Paul a tracé une distinction fort utile et illuminatrice entre la psyché et le pneuma. Mais ce dernier mot n’a jamais acquis aucune popularité, et le terme psyché, désespérément ambigu, en est venu à être employé indifféremment, soit pour la conscience personnelle, soit pour l’esprit ! »
En d’autres termes :
« L’homme est non seulement un corps et une psyché, mais aussi un esprit. [...]
Le corps est toujours dans le temps,
l’esprit est toujours intemporel,
et la psyché est une créature amphibie,
contrainte par les lois de l’être (de l’homme) d'y s'associer dans une certaine mesure avec le corps, mais capable si la psyché le désire, de ressentir son esprit et de s’identifier à lui, et par l’entremise de son esprit, au fondement divin ! »
Le mot psyché semble pris ici comme synonyme de l’âme, mais tous ne le prennent pas comme tel.
Selon Ignace Lepp : l’âme comprends la psyché, mais elle est plus que celle-ci !
Chez les philosophes et mystiques chrétiens on trouve, dès le début, une formulation trinitaire qui semble concilier chez l’humain la diversité des manifestations dans l’unité de l’être.
Une telle formule semble assez claire dans la pensée de Saint-Paul, laquelle semble s'inspirer ou au moins se trouve en rapport avec l'anthropologie grecque. Il parle alors de :
de ' l'homme charnel ' (sarkikos),
de ' l'homme psychique ' (psychikos),
et de ' l'homme spirituel ' (pneumatikos).
Pour les Grecs : l’immortalité concerne seulement le ' nouss ', c’est-à-dire l’âme supérieure (le Soi, en termes psychosynthétiques) et ne regarde pas le corps (sarx), tandis que pour la pensée biblique elle inclut le corps aussi, mais dans sa composante "pneumatique” qui est incorruptible et immortelle, ayant les propriétés d’un corps glorieux !
C’est dans ce sens qu’on parle de matière lucide et de matière glorifiée.
Origène qui considère l’être humain comme étant la combinaison de corps, âme et esprit, il place l’âme au centre, d'un modèle hiérarchique, en lui donnant le rôle intermédiaire d’une liaison qui se maintient, malgré la mort physique.
Quoiqu’il semble dévaloriser ainsi le corps en le plaçant au fond de l’échelle, il défend la thèse de son intégration comme élément essentiel et permanent de l’identification humaine.
Dans sa pensée, c'est effectivement l'esprit : ' nouss ', fondement qu'il considère préexistant : l'élément décisif.
Dû à la faute, la psyché (âme) est une sorte d'esprit effacé, à laquelle le corps (soma), deviennent la prison du châtiment et de la condition humaine actuelle !
Thomas d'Acquin rejette explicitement la thèse platonicienne du ' animam esse hominem ' (Réduction de l’humain à l’âme).
Augustin Bonaventure adopte aussi le modèle trinitaire et présente le corps comme étant l'époux de l'âme.
Chez lui, l'esprit ' mens, animus ', est plus que le ' nouss ' de la pensée grecque. Il s'agit de la pointe de l'âme ' acies mentis ' qui est le point de contact entre l'humain et le divin !
Parfois l’esprit devient synonyme soit de l’âme, soit de l’intellect.
Celui-ci, désigné mens chez Augustin, correspond au noyau de l’âme, tout en étant distinct aussi du corps et de l’âme comme telle :
« Si, faisant abstraction du corps, nous pensons à l’âme seule, l’intellect [mens] est quelque chose d’elle, comme sa tête, son œil, sa face... mais cela ne se doit point penser à la manière du corps. Ce n’est donc pas l’âme, mais ce qui est excellent dans l’âme est nommé intellect. »
Antoine de Lisbonne, communément appelé Antoine de Padoue, établit lui aussi une certaine distinction de degré entre l'âme et l'esprit :
« L'esprit est cette partie de l'âme qui comprend toute la raison et toute l'intelligence. L'esprit n'est pas l'âme, mais ce qu'il y a de meilleur dans l'âme, la partie principale d'où procède l'intelligence. »
En termes d’analogie : François de Sales distingue trois parties dans l'être humain :
le "degré sensitif" (sensibilité),
la "portion inférieure" (raison),
et la "portion supérieure" (esprit),
tout en comparant cette trilogie au temple de Salomon avec ses trois parvis :
- celui des Gentils,
- celui des Israélites,
- celui des Prêtres.
Au-delà de ces trois parvis, il y a encore le sanctuaire qu'il désigne comme :
la "cime de l'âme",
la "pointe de l'Esprit",
la "suprême pointe".
C'est à ce niveau que l’Esprit qui inclut et qui dépasse l’esprit qu'advient une sorte de synthèse existentielle !
La "suprême pointe", se situe bien au-dessus de l'intelligence, qui transcende toute conceptualisation et qui, en même temps, amène l'âme à s’abandonner à l’Esprit.
Thérèse d'Avila se réfère à :
la très connue différence entre l’âme et l’esprit.
La connaissance d’une telle différence, loin d’ être « très connue ! », semble souvent confuse, et elle-même avoue de ne pas échapper à cette confusion :
« Je ne saurais nommer les vocables; je ne suis pas capable de comprendre ce qu'est le mental ni en quoi il se distingue de l’âme ou encore de l'esprit ! »
Tout me semble une seule chose :
Que ' l’âme ' et ' l’esprit ' sont une même chose, de même que le soleil et ses rayons”, cela semble être sa conclusion, quoi que encore mêlée de confusion :
« Enfin, je ne sait pas ce que je dis ! »
Les termes adoptés ne sont pas toujours rigoureusement les mêmes, d’où souvent une certaine confusion.
Sans trop s'occuper des distinctions et des abstractions philosophiques,
Assagioli a privilégié l'aspect existentiel de ce qu'il appelle :
le "monde intérieur",
la "vie intérieure" ou la "psychologie spirituelle”.
Pourtant, Assagioli fait occasionnellement des distinctions, précises des concepts et prend position face à certaines idéologies. Tout en considérant comme extrémistes les conceptions : matérialistes et positivistes, et aussi en terme de : spiritualisme idéaliste, il tient compte autant du monde bio-psychique que du monde de l'esprit !
Il y a selon lui :
il y a une grande différence entre la psyché et l'esprit humain en tant que réalité faite à l'image et ressemblance de Dieu !
mais il admet la difficulté pratique concernant la distinction des éléments provenant spécifiquement de chacun de ces domaines, puisqu’ils se manifestent ensemble dans l'être humain qui est : une synthèse d'esprit, de psyché et de corps !
À propos du mot ' esprit ', il commente :
« S’il y a un mot qui se prête à l’incompréhension, à la confusion, au malentendu, c’est le mot esprit. »
Pratiquement, Assagioli promeut et s’occupe d’une psychosynthèse effectivement spirituelle, c’est-à-dire opérée par l’esprit, laquelle il caractérise et souligne comme étant déterminée par :
« une spiritualité intégrale qui inclut l’homme tout entier, sans compartiments étanches, sans opposition entre l’âme et le corps, entre vie intérieure et vie pratique, tout en incluant la vie sociale ! »
En d’autres mots, et encore selon Assagioli :
« l'esprit constitue l'élément de transcendance, de supériorité, de permanence, de pouvoir, de liberté, d'intériorité, de créativité, d'harmonie et de synthèse, en toutes les manifestations autant individuelles que sociales. »
Roberto Assagioli, lorsqu’il précise, plus explicitement que jamais, l’origine de sa pensée eu égard au caractère trichotomique du genre humain :
« Dans l’élaboration de la théorie et de la pratique de la psychosynthèse, je puise le soutien et l’inspiration de la tradition hébraïque. La base de la psychologie spirituelle, laquelle je défend et vers laquelle d’autres psychologues se trouvent récemment orientés, est la clarification biblique selon laquelle l’homme a été crée à l’image et ressemblance de Dieu, tout en existant alors chez l’humain un élément semblable à Dieu. De cette base provient l’enseignement traditionnel hébreu de la constitution psychologique de l’homme composée de trois éléments : nephesh, ruah, et neshamah, étant ce dernier celui qui représente son aspect spirituel. »
Le terme ' rhuah ' ou ' ruah ' devient pour Assagioli synonyme de psyché, tout en incluant alors celle-ci comme son noyau le ' neshamah ' ou - Soi spirituel :
« Ma tentative principale a été d’offrir une preuve scientifique au sujet de l’existence de l’activité de l’âme spirituelle (neshamah) dans la psyché (ruah) comme facteur inspirateur et unificateur. »
C’est au niveau du Soi spirituel, c’est à dire : l’esprit - lequel effectivement dépasse la psyché, que Roberto Assagioli situe et fait voir combien le ' processus psychosynthétique ' ne peut plus s’arrêter :
« Souvenons-nous qu’une fois établis les rapports entre la personnalité et l’Esprit, une fois débutée l’œuvre de l’unification, celle-ci ne peut plus s’arrêter, même si nous essayons de nous rebeller, puisque les énergies spirituelles sont plus puissantes que les forces purement psychologiques ! »
La triple distinction : corps, âme, esprit apparaît encore assez explicite chez le fondateur de la psychosynthèse.
Lorsqu’il parle de “bio-psychosynthèse” et la décrit comme étant “une vraie alchimie spirituelle” où “la psyché s’harmonise avec l’esprit incluant le corps” dans l’unité existentielle de tous les aspects de l’être humain !
Cette distinction se rend évidente, quand Assagioli se réfère à :
« l’âme qui exulte à la lumière de l’esprit, tant qu’humainement la personnalité souffre ! »
Cette même distinction ' corps, âme, esprit ' apparaît encore chez Assagioli lorsqu’il souligne, en guise d’un processus croissant de l’identification humaine :
la non-coïncidence, ou plutôt l’indépendance de l’âge biologique,l’âge psychologique et l’âge spirituel !
Au plan existentiel, on y peut considérer alors une sorte de gradation dans la prise de conscience de l’identité humaine, mais toujours dans le sens de l’unité ontologique de ses composantes jamais séparées.
Une telle conception est bien soulignée dans cette autre remarque :
« L’être humain ne peut pas être considéré comme un composé de plusieurs parties séparées – corps, psyché, esprit. Celles-ci sont bien sûr différentes et distinctes, mais elles sont dans une interaction continuelles; dans le dynamisme de la vie humaine, elles se trouvent dans une connexion intime. »
Assagioli lui-même offre un point de départ lorsqu’il parle de
bio-psychosynthèse axée sur le fait :
« que l’être humain est avant tout, surtout et essentiellement une entité spirituelle ! »
L’esprit reste essentiellement le pivot de la synthèse humaine, sans qu'il puisse être saisi et soumis à une définition, étant donné qu'il s'agit d'un élément physiquement et mentalement insaisissable !
« De par sa nature : l’Esprit est au dessus de tout dualisme et de tout conflit. Il est Unité. Par sa présence et action : il renouvelle, coordonne, harmonise et unifie ! »
Nous tous - les humains, sommes conjointement et inséparablement la trinité : corps-âme-esprit.
À la lumière de l’esprit, le corps qui inclut et dépasse l’aspect physique mérite le même degré de considération que l’âme, sous peine de donner raison à l’appel du moine :
« Prenons soin du corps. Quant à l’âme, il y a ici trop de monde qui s’en occupe ! »
En bref : c’est au niveau du Soi que se manifestent à l’évidence :
- la vérité,
- la bonté,
- la beauté
- et l’unité de notre être.
Toutes ces caractéristiques s’appliquent à la totalité de l’humain laquelle, comme le remarque Alberto Alberti :
« n’est pas seulement psychique, mais aussi physique et spirituelle ! »
Dans le système trinitaire : si l’on prend le Soi comme synonyme de l’esprit, et on place le cœur de l’identification humaine à ce niveau, il faut bien éviter de faire l’abstraction autant de l’âme que du corps, sous peine d’aller à l’opposé du matérialisme et de tomber dans un genre de spiritualisme qui ne correspond point au caractère holistique de la conception trychotomique qui vient d’être exposée.
Rien ne doit nous empêcher de prêter une attention particulière au noyau de la noix, sans pourtant conclure que sa peau et sa coquille ne font pas partie de son identité !
De l'histoire de la pensée sur laquelle on vient de jeter un coup d’œil à l’égard de la trichotomie humaine...
on peut bien conclure, notamment en ce qui concerne la tradition en provenance de la philosophie grecque, sur la tendance constante à faire de la nature une grille scientifique à partir de laquelle on tient compte du sujet.
Le fait de soutenir les thèses soit dichotomique soit tricotomique au sujet de la nature humaine reste secondaire, s’il ne traduit pas le fait d’une démarche existentielle concernant la vraie connaissance de soi.
De nos jours, on assiste à un tournant majeur :
c'est plutôt à partir du sujet que l'on considère la nature.
L'approche psychosynthétique, axée sur l'existentiel, constitue un exemple de ce tournant qui reste en même temps :
- conceptuel,
- méthodologique
- et scientifique.
3 - L’injonction et ses enjeux
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Le Gnothi seauton
connais-toi toi-même !
du précepte socratique, gravé sur le fronton du temple consacré à Apollon, constitue tout aussi bien, en quelque sorte, la première injonction de l’approche assagiolienne !
En termes de psychosynthèse individuelle :
la connaissance de soi figure effectivement, comme l’on vient de souligner, est un postulat de base. Le thème de la connaissance de soi est indissociable de celui la connaissance en général, d’où l’opportunité que l’on passe d’abord à s’attarder en quelques réflexions d’ordre gnoséologique, tout en débutant alors par la question du savoir.
Socrate en faisait question, lorsqu’il allait de porte en porte, chez les politiciens, les poètes et les artistes d’Athènes pour leur apprendre qu’ils ignoraient jusqu’à leur propre ignorance.
Le savoir se transforme en piège, dans la mesure où il devient un alibi pour ne plus reconnaître sa propre ignorance, notamment à son égard.
3.1 Système gnoséologique
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Le savoir devrait toujours se rapporter à la connaissance et à la réalisation de soi.
Mais, il n'en va pas toujours ainsi.
Abraham Maslow observe :
« que la plupart de nos connaissances : observations, perceptions, souvenirs, pensées, savoirs... sont plus abstraites que concrètes. C'est que la plus grande partie de notre effort de connaissance consiste à étiqueter, schématiser, classer et abstraire. »
Il peut s'agir, le cas échéant, d'un savoir plus ou moins stérile et plutôt aliénant.
Le vrai savoir est toujours inhérent au vécu et jamais emprunté ou imposé. Il peut ou non correspondre à une philosophie ou à une école particulière, mais par sa propre nature, il doit rester libre et indépendant.
Il s’agit d’un bien foncièrement existentiel qui évoque le partage plutôt que d'une possession !
La connaissance à caractère existentiel est présenté par Eric Fromm de la manière suivante :
« Connaître signifie qu'on perce la surface pour parvenir aux racines et, par conséquent, aux causes; connaître signifie qu'on 'voit la réalité dans toute sa nudité. Connaître ne veut pas dire 'être en possession de la vérité', mais de percer la surface et de lutter de façon critique et active pour approcher de plus en plus près la vérité. Cette qualité de pénétration créative s'exprime dans le jada hébreu, qui signifie connaître et aimer, dans le sens de la pénétration sexuelle du mâle. »
Malgré la coloration sexiste suscitée par les genres littéraires évoqués, pareille connaissance est toujours mutuelle, effectuée par interpénétration plutôt que par pénétration.
Elle est aussi intégrale, tout en impliquant l'identification et la co-identification sans réserve, plutôt que l'apprivoisement et l’annulation.
Une telle conception est visée explicitement par Assagioli dans la note inédite suivante :
« L'interpénétration, l'identification du sujet avec l'objet n'est-il pas à coup sûr la forme la plus complète possible de la connaissance, la vraie connaissance absolue ? »
L’expression ‘connaissance absolue’ y est certainement employé pour désigner une co-identification sans réserves.
Assagioli remarque :
« La compréhension d'une chose est toujours partielle; prétendre avoir tout compris signifie un manque de compréhension ! »
La vraie connaissance transforme la relation sujet objet dans un rapport sujet-sujet.
Il y a une sorte de mariage du masculin avec le féminin où le savoir est en même temps l’acquisition et la jouissance de se laisser pénétrer par la connaissance.
Tel est le sens le plus profond de l’oracle de Delphes, portant à une identification du sujet qui provient de la co-identification relativement à l’objet !
Il y a un processus d’intégration et d’identification, dû au fait que le savoir devient une nourriture qui a le pouvoir de nous faire évoluer.
Selon William James et Gordon Allport, le fondateur de la psychosynthèse établit clairement la distinction entre :
- savoir : compréhension abstraite, statique.
- connaître : création d'un lien vital, créatif et dynamique.
À l'intérieur de la connaissance, Assagioli distingue trois aspects :
- la connaissance mentale : résultat du produit final de la pensée;
- la connaissance psychologique : provenant de la compréhension empathique;
- la connaissance intuitive : fruit du contact avec les énergies supraconscientes.
Ces trois aspects sont en gradation progressive et en complémentarité à l'égard d'une connaissance plus exacte.
- la connaissance mentale : privilégie l'interprétation,
- la connaissance psychologique : favorise la compréhension,
- la connaissance intuitive : constitue déjà l'identification.
Référant à la pensée du philosophe Karl Jaspers, Assagioli considère indispensable d'établir la distinction entre l'explication des sciences naturelles, (qui ont pour tâche de découvrir les liens causales et de formuler des lois), et la compréhension psychologique (attachée à rendre compte de ce qui se passe dans la psyché.)
Allié au mouvement existentiel de Binswanger, Assagioli insiste sur la compréhension, qu'il considère comme plus fondamentale et plus difficile que l'interprétation mais la réciproque ne va pas de soi.
Il en est de même pour l'expérience en tant que phénomène expérimental, laquelle, demande tout un processus d’intégration :
« L'expérience et la vraie connaissance sont deux choses assez différentes.
Pour connaître, nous avons habituellement besoin d'expérimenter; mais la simple expérience n'est pas encore une vraie connaissance [...]. L'expérience nous donne uniquement des sensations et des sentiments, tandis que la connaissance fait appel à leur assimilation par l'intelligence. C'est pourquoi la vraie connaissance synthétique, qui est aussi la vraie compréhension, requiert le recours à l'intuition. »
La connaissance est considérée un pouvoir qui se nourrit de l’information.
Mais avoir des connaissances n'est pas, pour l’être humain, synonyme de connaître !
Le père de la psychosynthèse fait noter combien la connaissance caractéristique des humains peut dépasser la simple satisfaction d'un besoin égoïste :
« La soif de connaître constitue une des différences les plus nettes entre l'homme et l'animal. Pour celui-ci, le désir de connaissance se limite aux besoins et aux instincts : alimentation, défense... Seulement l'homme a un désir ardent de connaître pour connaître, le pur désir de savoir, sans les motivations d'intérêt ou de bénéfice personnels. »
Cependant, la considération d’un tel privilège le pousse à aller plus loin :
La connaissance implique la responsabilité !
Celle-ci est manifeste dans l'obligation de faire face aux obstacles et aux illusions concernant le savoir, et cela implique le discernement, portant à accepter, dès le départ, de faire face aux apparences !
Le domaine des illusions s’étend aux fausses perceptions des niveaux physique, émotionnel et mental.
En plus de la perception il y a souvent une attirance qui transforme l’illusion en fascination. Celle-ci est en même temps attirance et attachement dont la source peut être autant à l’extérieur qu’à l’intérieur de nous-mêmes.
Bien souvent nous sommes plutôt prisonniers de nos propres idéologies et systèmes.
La fascination par rapport à nos idées et croyances constitue un orgueil plus ou moins déguisé en vertu !
Le monde objectif existe et reste potentiellement à notre portée.
Pourtant, il y a toujours la subjectivité de notre perception qui nous empêche de pouvoir garantir que les apparences correspondent tout à fait à la réalité totale !
Prétendre avoir dépassé définitivement toutes les illusions est une illusion, et peut-être même la plus grande
Assagioli semble loin de l'illusion de ne pas avoir d'illusions quand il dit :
« Tels que nous sommes actuellement, nous nous trouvons, dans la vie quotidienne, limités et ligotés de cent manières; nous sommes les victimes de maintes illusions, de mille 'phantasmes', les esclaves de nos démons intérieurs, entraînés par les flots des influences extérieures, aveuglés et hypnotisés par des apparences trompeuses ! »
Il serait cependant dangereux d’affirmer que tout ce que nous considérons réalité est effectivement une illusion et donc sans fondement objectif !
Assurément, il reste toujours une certaine illusion dans ce que nous croyons être la réalité, mais il y aussi de la réalité dans ce que nous classifions d'illusoire !
Cela invite à processus continuel de discernement, tout en notant avec Ken Wilber, que :
« les différentes façons de connaître correspondent à des différents niveaux de conscience ! »
En d’autres mots :
la perception de la réalité devient différente et plus révélatrice dans la mesure où elle se rend proche du niveau transpersonnel !
Par contre, moindre est le niveau de conscience, plus il y a la probabilité d’une certaine illusion !
En d’autres mots :
plus l’identification se trouve au niveau transpersonnel, (à la lumière du Soi spirituel), moins, il y a le danger de tomber dans le domaine des illusions, incluant, celle de la conviction que tout est illusoire à commencer par notre propre existence.
Malgré nos illusions sur quelque chose ou sur quelqu’un, nous sommes finalement une réalité !
3.2 Du savoir à la connaissance
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Bien souvent, ont allie les mots connaissance et savoir, tout en les limitant à une prise de conscience au niveau de l’activité intellectuelle qui est en rapport avec la tête plutôt qu’avec le cœur.
Le mot latin sapere, de même que le terme hébreu hokmah signifient autant le savoir que la saveur.
(Contrairement à la vérité philosophique qui est plutôt conceptuelle, la vérité historique revêt le caractère existentiel, c’est-à-dire le savoir (noscere en latin) qui représente comme : le fruit du concept que l’on peut savourer.)
génétique,
génital,
genre
et engendrer ou concevoir.
Revenant au sens biblique, la paternité y est exprimée en termes de rapport sexuel dans un contexte profondément existentiel, à la fois physique, psychique et spirituel.
Il y a alors un sens de proximité et d’intimité par rapport à nous-mêmes et à autrui.
Cela mène à mieux comprendre l’amour comme l’expression authentique de toute connaissance.
Amour et connaissance de soi vont donc ensemble !
L’approfondissement de l’un, élimine la superficialité de l’autre.
La connaissance prend lieu et se rapporte d’abord à nous-mêmes. Elle arrive dans la mesure où le savoir est effectivement «s’avoir», s’approprier au sens existentiel d’identification et co-identification !
Assagioli remarque :
« La sagesse est liée à l’intuition. C’est pourquoi on l’a personnifiée sous les traits d’une femme. »
La culture moderne, surtout en Occident, a presque absolutisé la pensée logique donnant au savoir un fondement scientifique fort matérialiste et rationnel, au détriment de l’intuition et de la spiritualité !
De nos jours, le culte de l’intelligence remplace fortement la sagesse !
Platon, dans le mythe de la caverne, fait la distinction entre :
la connaissance sensorielle ou doxa (opinion) et,
La connaissance intuitive ou episteme (idée pure).
La première étant personnelle, rationnelle et illusoire.
Alors que la deuxième est transpersonnelle, trans-rationnelle et réelle.
La vraie connaissance comporte le fait existentiel d’une réalité intérieure et d’un rapport avec quelque chose et ou quelqu’un d’autre !
Abraham Maslow observe :
« Nous ne connaissons pas mieux le monde extérieur dans sa réalité actuelle que nous ne connaissons notre monde intérieur ! »
Avec Hermann Keyserling, Assagioli donne à la compréhension un sens de révélation et de créativité en même temps.« la compréhension non seulement révèle la vérité, mais, dans un certain sens, elle la crée ! »
Tel est le caractère existentiel de son approche psychologique qui fait de la sagesse en même temps :
- réflexion et découverte,
- acquisition et participation.
C’est en même temps : la conscience d’un don et celle d’une collaboration.
Selon les Écritures tibétaines :
« la connaissance doit être brûlée, martelée et battue comme de l’or pur. Alors seulement on peut l’apporter comme un bijou. »
Il faut bien souligner que la sagesse est plus ce qu’on est et
moins ce qu’on a.
Elle est plus à témoigner par la vie que par la parole, tout en devenant un bien à partager, que non un trésor privé à retenir.
Elle provient de la qualité plus que de la quantité des connaissances !
Le vrai savant ne s’identifie pas au savoir ni à une école particulière de la pensée. Il s’en sert pour aller à la rencontre de la vérité. Celle-ci est simultanément découverte en quête.
Le sage ne prétend jamais s’approprier de la vérité; il s’en laisse approprier !
Lao-tzeu va jusqu’à dire :
« que le sage n’est jamais un érudit et que l’érudit n’est jamais un sage ! »
Fort conscient de ses propres limitations, celui-ci relativise davantage sa connaissance et cherche à jamais de combler le vide de son ignorance.
Il aime la vérité, mais n’ose jamais dire ni croire qu’il en est en possession, d’où l’avis de Kahlil Gibran :
«Ne dites pas ‘j’ai trouvé la vérité’, mais plutôt, ‘j’ai trouvé une vérité’.»
On dit que le savoir n’occupe pas d’espace, pourtant symboliquement, il augmente, face à la conscience d’un horizon qui s’élargit tout en montant.
Il va sans dire que personne est arrivé au but du processus de l’apprentissage, nommément par rapport à la connaissance de soi !
Quoique toujours loin du don de l’omniscience et des vérités absolues, il est légitime de croire que nos connaissances, bien que partielles, ne perdent pas, pour cette raison, leur authenticité.
Le sage est un témoin de l’authenticité et un chercheur de la vérité qui n’exclue pas les critères de la probabilité, ni les défis de l’absurde, ni les révélations du mystère.
Bien plus que de la simple curiosité, le savoir est un besoin. Assagioli tient compte de cinq instincts :
- L’instinct de conservation,
- l’instinct de reproduction,
- l’instinct grégaire ou social,
- l’instinct d’auto-affirmation,
- l’instinct de connaissance.
Nous avons tous et toujours le besoin et la capacité d’y progresser, mais un tel progrès, provient de l’assimilation et non pas de la simple accumulation de connaissances, comme remarque Hermann Keyserling :
« La vraie connaissance fait de l’accumulation des données reçues et assimilées un facteur de transformation laquelle ne se limite pas à nous-mêmes. Le savoir reste en fonction du savoir-être en termes de croissance personnelle, et du savoir-faire en termes de service. »
Tout en affirmant que
« l’homme sait plus qu’il ne comprend »
Adler essaie d’expliquer :
« Est-ce que son savoir n’est pas éveillé pendant le rêve alors que sa compréhension dort ? S’il en était ainsi, on devrait pouvoir démontrer des états semblables pendant la veille ! »
La compréhension de notre connaissance va de paire avec la conscience de notre ignorance !
À mesure que l’on monte dans le savoir, il grandit dans notre horizon du domaine de l’inconnaissance. En d’autres mots : La vision de l’ampleur de notre propre ignorance progresse au rythme de nos propres connaissances.
On parle alors de la docta ignorantia (l’ignorance sage).
La conscience de sa propre ignorance constitue pour l'être humain une expression fondamentale de l'apprentissage, et devient donc, (pour tout le monde), une composante majeure du savoir, du savoir-faire et du savoir-être.
C’est au niveau transpersonnel que le savoir s’identifie avec la sagesse. En d’autres mots : c’est à ce niveau que le savant devient sage !
Mais, il faut vous mettre en garde contre l’intellectualisme qui rend la raison autosuffisante, au point de prétendre apprivoiser le mystère et devenir l’arbitre de la connaissance.
Assagioli exprime sur la sagesse :
« elle s’acquiert avec l’expérience
et
se complète avec l’amour. »
Il remarque que :
« l’idée que la plupart que ce font d’un sage qu'il reste statique ! » au contraire, elle prône :
« une conception plus vraie de sa nature vitale, dynamique et créatrice. »
Dans cette perspective, la psychosynthèse postule la connaissance au niveau du Soi transpersonnel.
Selon le fondateur de cette approche psychologique :
« toute inspiration du Soi, tout le contact avec le Soi amène, par sa nature, est le don précieux de la sagesse ! »
En d’autres mots :
le savoir et le savoir-vivre y vont ensemble !
Le Soi ou centre de conscience est en même temps ' Sophe ' et ' Sophie ':
il est source du savoir et expression de la sagesse.
3.3 Des faux-semblantsSources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
L’étude de Francis Bacon intitulée "Novum Organum" et qui porte sur les quatre catégories d'idoles ou d'illusions est devenue classique, et Roberto Assagioli lui consacre un article qu'il reprend plus tard vers la fin de sa vie.
Ces quatre catégories d'illusions ou d'erreurs peuvent être résumées de la manière suivante :
- Les idola tribus se rapportent à la condition générale de l'humanité; l'être humain est toujours limité dans sa connaissance, y compris la connaissance de soi.
- Les idola pecus ont trait aux conditions subjectives de chacun : le caractère, l'éducation, la perception et l'interprétation, pouvant donner lieu à toutes sortes de méprises.
- Les idola fori concernent les erreurs du langage reliées pour une bonne part à la polysémie; les mots étant des symboles reliés à des expériences particulières toujours difficiles à représenter et à interpréter, puisque un même mot peut avoir plusieurs sens.
- Les idola theatri concernent les erreurs ou illusions propres à chaque culture et à chaque domaine du savoir en particulier. Toute branche spécifique de la culture et du savoir exige un effort épistémologique en vue d'une vraie communication et interprétation gnoséologique.
Même dans le domaine des illusions, il y a encore des nuances et des distinctions à faire !
Dans le processus de leur identification et de leur traitement, il est important de distinguer, à l’intérieur de la personnalité :
soit-elle individuelle ou collective...
entre :
un mirage qui concerne les perceptions physiques,
la séduction** qui hypnotise le monde des émotions,
et l’illusion plus proprement dite qui ce rapporte plutôt à des interférences qui troublent le courant mental .
** j'utiliserais plutôt en 2023 le mot : manipulation liée aux mensonges planétaires qui ont hypnotisés (médiatisés) notre monde collectif dans des formes de terreurs et d'endormissements collectives depuis plusieurs décennies et particulièrement, depuis 2020.
Convaincu des dangers d'un pseudo-savoir, Assagioli s'est intéressé à évaluer l'étude des catégories d'erreur établies par Locke.
En les considérant insatisfaisantes, il tente lui-même un essai de classification où il offre à titre d'énumération, sans aucune prétention de rigueur méthodologique et d'exhaustivité, les principales variétés d'erreur auxquelles les scientifiques font souvent sujets.
Cet essai tient compte d'abord de deux catégories fondamentales d'erreurs :
descriptive et génétique.
Sans s'attacher à ces distinctions de base, Assagioli procède à une énumération des principales variétés d'erreurs axées spécifiquement sur les cinq pivots étiologiques suivants :
- 1. Les erreurs d'outillage provenant de l'imprécision des instruments (des concepts) dont l'être humain se sert;
- 2. les erreurs de perception ayant leur origine dans les imperfections des sens de l'observateur;
- 3. les erreurs d'interprétation dues à un mauvais raisonnement logique :
théories simplistes (pseudo explications), paralogismes (sophismes involontaires), généralisations arbitraires (sophismes d'induction et sophismes d'énumération imparfaite), abus de l'analogie (anthropomorphismes excessifs), non discriminations (confusions entre effets et causes), confusions du langage (ambiguïtés des termes utilisés);
- 4. les erreurs caractérielles provenant tant du manque d'objectivité que d'une fantaisie excessive et de différents travers de tempérament;
- 5. les erreurs professionnelles causées par la perspective limitée de chaque discipline liées au rôle professionnel.
L'erreur est étroitement reliée à la condition humaine, d’où le dicton latin en provenance de Jérôme :
errare humanum !
c’est humain de faire des erreurs !
Cela suppose qu’on en tire la leçon selon cet autre proverbe :
errando corrigitur error !
l’expérience de l’erreur porte à le corriger !
L’existence de l’erreur
n’est pas seulement possible;
elle est inévitable.
Assagioli le confirme :
« Dans le royaume humain, l’évolution se fait par le truchement de l’expérience et l’expérience comporte des erreurs continuelles ! »
Selon la remarque de Thomas Merton :
« Nous faisons, il est vrai, bien des erreurs. Mais nous en étonner est la plus grande de toutes : comme si nous pouvions espérer n'en faire jamais ! »
La voie du savoir passe par le domaine de l’erreur lequel semble plutôt cacher une vérité !
Fernando Pessoa :
« faire des erreurs, c’est découvrir la vérité sans l’avoir ! »
Et selon Sri Aurobindo :
« l’erreur est le serviteur, l’avant-coureur de la vérité; car elle est réellement la demi-vérité qui trébuche à cause de ses limitations ! »
Plus gênant que faire des erreurs, c’est le fait de ne pas l’avouer, ou de les cacher. Le vrai savant fait preuve de sagesse et d’authenticité en admettant son erreur et en tirant une leçon !
La peur de l'erreur est elle-même erronée et le recours à l’infaillibilité humaine devient le comble d'une prétention.
Paradoxalement, l'erreur peut devenir indirectement une voie de connaissance, lorsque effectivement alliée à la décision d’abandonner nos absolus.
Une telle attitude est sûrement préférable à l'obsession paralysante des certitudes incontestées.
C'est pourquoi Assagioli conseille :
« le courage de faire des erreurs, tout en reconnaissant que les erreurs peuvent devenir utiles en tant que sources d'expérience ! »
Au cours d'un entretien, Assagioli donne l'avis suivant :
« Ose faire des erreurs. Crois à ta lumière intérieure, même si tu fais des erreurs ! »
Le premier pas de l’humilité est la reconnaissance et l’acceptation de ses propres limites.
Le deuxième pas est leur dépassement, tout en y acceptant la possibilité de l’erreur.
Évidemment, oser faire des erreurs n'est pas le synonyme de la témérité ou de la complaisance facile, mais plutôt de l'humilité qui accepte la réalité et les limites du savoir, hors la prétention de savoir plus que l’on sait.
Le pont qui conduit à la réussite s’appuie souvent sur les pierres de nos échecs; il ne se construit pas sur une dépendance esclave envers une société exigeante poussant au camouflage de nos limites.
Ce pont reste axé sur deux piliers :
- L’expérience autant de nos capacités que de nos limites,
- et la certitude que personne n’est en possession du monopole de la sagesse !
Pareilles dispositions n'écartent pas pourtant la possibilité de l'erreur !
Comme le dit Gabriello Cirenei :
« expérimenter constitue toujours un risque et implique la possibilité de l'erreur; celui qui expérimente doit donc être disposé à payer le prix de l'erreur. »
Assagioli considère que :
« l’humanité doit apprendre par le biais de l’expérience, ce qui veut dire par le moyen des épreuves et des erreurs. »
Assagioli ajoute :
« Ce n’est pas une chose terrible de faire une erreur. Nous commettons des erreurs et certainement nous continuerons de les commettre. Poursuivons donc avec un vrai sens d’humilité, non pas ce genre d’humilité du misérable pécheur, mais en reconnaissant honnêtement que tout le monde commet des erreurs ! »
Leonardo Boff exprime :
« on peut se tromper, mais on doit être authentique même dans l’erreur ! »
L'orgueil prend l'erreur comme une défaite et peut se traduire par une humiliation; l'humilité la reconnaît comme une limitation et on devrait l'accepter comme une leçon.
Souvent la correction de l’erreur provient de l’extérieur, d’où l’exclamation de Confucius :
« Je suis vraiment chanceux. À chaque fois que je fais une erreur les autres la découvrent. »
Pourtant l’humilité ne s’occupe pas des erreurs des autres !
L’erreur, de même que l’aveu de l’ignorance peuvent devenir effectivement partie prenante de l’apprentissage.
Carl Gustaaf Jung offre là-dessus la réflexion suivante :
« Les erreurs sont, en fin de comptes, les fondations de la vérité, et si un homme ne sait pas qu’est ce qu’une chose est, c’est au moins un progrès dans la connaissance s’il connaît qu’est ce qu’elle n’est pas ! »
À l’intérieur de l’âcreté qui peut accompagner la reconnaissance de nos erreurs, nous pouvons alors goûter la douceur d’un apprentissage.
On peut trouver une réalité cachée dans l’illusoire, et ainsi découvrir l’illusion de nos perceptions du réel.
L’arc existentiel qui monte vers la lumière de la connaissance passe d’abord en descendant, par le creux ténébreux de la confrontation réaliste de notre ignorance, et ce à partir de nos erreurs et de nos illusions.
De pair avec l’illusion, il a aussi l’illusionnisme qui fait de l’illusion un moyen choisi pour cacher la réalité, pour des motivations variées y incluant un certain genre de diplomatie !
Ce qui porte à dire que le succès du diplomate** provient de faire le semblant autant d’ignorer ce que l’on connaît que de dominer ce que l’on ignore.
** du politicien, de la la politicienne
Cela nous mène à considérer tout le domaine du mensonge, y incluant autant la mauvaise utilisation du savoir que la couardise de nombreuses ignorances !
Le principe selon lequel toute la connaissance humaine est effectivement une illusion semble plus proche d’un pléonasme rhétorique que d’un axiome philosophique.
Pourtant, il peut bien contenir une forte expression de la vérité, dans le sens de relativiser notre perception de la réalité, tout en faisant l’appel à une expérience existentielle de plus en plus consistante.
Quand l’hindouisme se réfère au monde illusoire, il ramène plutôt au fait d’oublier que toute réalité se trouve enracinée en Brahman, l’archétype fondamental sans lequel rien ne peut exister !
Il fait alors appel à l’illumination, sans quoi la réalité reste perdue dans l’obscurité !
Sat est le mot Sanskrit utilisé pour exprimer la réalité absolue synonyme de la Vérité.
Tout le reste est Maya l’illusion :
comprise non pas en termes absolus, mais plutôt comme comparaison contrastante. Il s’agit d’une réalité relative, phénoménologique, contingente, instable, mutable et transitoire, en contraste avec la réalité permanente et immuable.
L’illusion provient de la tendance à vouloir remplacer la réalité par des apparences !
L’illusion collective est la plus commune et la plus difficile à identifier et à corriger !
Gustave Le Bon remarque :
« Les foules n’ont jamais eu soif de vérités.
Devant les évidences qui leur déplaisent ! Elles se détournent, préférant défier l’erreur, et si l’erreur les séduit. Qui sait les illusionner aisément deviennent leur maître; qui tente de les désillusionner en victime ! »
En plus de l’erreur, il y a les limites de nos vérités.
Le domaine du savoir dépasse toujours le territoire du savant, ce qui fait appel au don de la sagesse.
En effet, le savant peut aller jusqu’à absolutiser et vouloir s’approprier de la connaissance, alors que le sage prend conscience et n’oublie pas les limites de ses acquis et la magnitude de l’inconnu.
Il valorise l’aspect immanent du savoir qui lui donne plus d’autonomie et d’indépendance, mais il tient compte aussi de la transcendance qui ne lui permet pas de tomber dans les pièges de la supériorité et de l’autosuffisance.
Il ne dévalorise pas l’érudition, mais il la relativise, tout en sachant faire la distinction entre l’accumulation de connaissances et la sagesse !
Fort loin de la tentation d’un ‘je sais tout’, le sage reconnaît et honore autant le disciple que le maître, tout en reconnaissant d’abord en lui-même la présence continuelle de tous les deux.
Ce n’est plus donc un maître celui qui laisse : ' être ', il est en même temps un élève.
Le savant peut se contenter d’être un maître; le sage reste toujours un pèlerin de la vérité.
- Le savant risque de se contenter avec la théorie;
- le sage passe toujours à la pratique !
La reconnaissance et l’acceptation du mystère restent à jamais comme conscience d’une limite actuelle et comme un défi vers son dépassement !
Mais le propre mystère peut mener à la sagesse qui, à son tour, garde toujours de la place pour le mystère !
Tel qu’enseigné dans le Confusionnisme ontologiquement :
chaque être humain est inévitablement un sage et pratiquement personne ne peut s’arroger à ce titre !
En d’autres mots : je ne suis pas encore au bout de ma réalisation, mais j’en ai les potentialités quoique latentes dans la structure de mon être !
Le vrai sage garde et manifeste toujours en lui-même l’image du néophyte.
Même dans la reconnaissance de ce qui est malsain, il maintient son regard innocent. Face à l’inconnu, la sagesse
embrasse le mystère comme un défi !
Puisque l’ignorance est toujours présente à un certain dégrée, il faut bien la reconnaître, mais sans jamais la canoniser.
Autrement, on confond le défi du mystère avec l’esclavage de l’obscurantisme qui se nourrit de l’ignorance et qui engendre le refoulement de l’intelligence !
C’est important de prendre conscience de cette source de la sagesse capable de se manifester au cœur de nous-mêmes.
La sagesse au niveau du Soi transpersonnel est directe,
trans-conceptuelle et claire, sans cependant nier les contingences restrictives au niveau de la personnalité, et tout en reconnaissant aussi les limites humaines.
3.4 Contraintes du changement
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
L’erreur touche autant les fausses convictions que les mauvaises attitudes.
Un des obstacles au progrès de la connaissance c’est le comportement misonéiste : offrant des résistances au changement, sous le prétexte de maintenir la vérité et la sécurité acquises.
Le misonéisme, très tôt dénoncé par le fondateur de la psychosynthèse, constitue une vraie paralysie existentielle !
Assagioli définit le misonéiste comme quelqu’un qui a une aversion :
- profonde contre la nouveauté et ou l'imprévu,
- contre ce qui n'entre pas dans son cercle,
- souvent étroit dans ses propres convictions antérieures et
des idées toutes faites !
Il associe aussi ces tendances et ces attitudes :
- à des pressions d'ordre social,
- à des troubles d'ordres psychologiques,
- à l'étroitesse d'esprit,
- à l'attachement têtu à des idées fixes,
- la survalorisation de l'équilibre obtenu,
- à une fausse économie de la pensée qu'il qualifie d'"avarice de la pensée" et de "paresse mentale".
Assagioli mentionne :
« Les vieux concepts et dogmes, les idéologies fausses ou unilatérales et fanatiques que la mentalité humaine a fabriqué dans le passé, continuent encore de se créer. »
Il y voit :
« une tendance générale, très forte de l’esprit humain ! »,
ce qui devient alors :
« un grand obstacle au progrès de la science aux services de toute civilisation ! »
Le misonéisme est le père de la stagnation alliée à une décadence qui engendrent l’entropie !
C’est à noter que le misonéisme n’est pas une affaire privée.
On l'observe souvent dans le domaine social et culturel, le terrain propice de son enracinement et de son essor.
Bien souvent, c’est le mimétisme et la stéréotypie qui règnent en maître au sein des sociétés, où la pression sociale tend à interdire la voie du changement !
L’époque du romantisme est fort caractérisée par la tendance du retour d'une canonisation du primitif, engendrant la méfiance et une tendance vers le discrédit d'une certaine modernisation.
Toutes les sociétés qui jouissent de la prospérité sont propices à se fixer dans le ' statu quo ' de ses nantis, qui finissent par être dépassées dû à la/ l'(in) flexibilité des uns et des autres !
C’est propre d’un système fermé** de vouloir perpétuer le confort de ses acquis et de les faire miroiter...
** capitaliste, mondialiste, empiriste...
Le misonéisme représente un manque de confiance dans le futur qui engendre la peur de prendre des risques dans le présent !
Le misonéiste cherche son refuge dans le passé, et sans le courage de passer d’un avant stable vers un avant incertain, il se ferme dans le confort d’une certitude, alors que l’incertitude reste une voie indispensable à la sagesse humaine !
Le misonéiste s’attache à un niveau de conscience de rejets. Tout en faisant de la nouveauté un danger, qui transforme la vie en survie.
Dans ce cas, le savoir reste un esclavage pire que l’ignorance, et devient une entrave au flot de la vie.
Socialement, il se caractérise par un retrait, une mise en question ou une fausse émancipation, allant parfois jusqu'au rejet qui semblerait compromettre une nouvelle identification.
Le misonéiste se protège non seulement du nouveau, mais aussi de l’inconnu.
Pratiquement synonyme :
d’immobilisme, de fixisme et de paralysie.
L’Histoire est devenue un cercle vicieux, voire un cul de sac, dans la mesure où les réponses d’hier semblent toujours plus ou moins inadéquates aux questions d’aujourd’hui.
Se fermer dans le connu, c’est faire du savoir notre propre prison.
Le sage se place à la périphérie du savoir, prêt à mettre un pied dans un territoire inconnu, à commencer par celui de son inconscient !
C’est par le dépassement des frontières que nous nous approchons davantage de nous-mêmes et des autres !Il est tellement important d’acquérir des connaissances, et plus encore d’être capable de s’en débarrasser.
En effet, le détachement du savoir reste le point de départ de la sagesse !
En fait, l’attachement au passé, y incluant l’expérience accumulée, risque de transformer le présent en musée.
L’attachement au déjà-su étouffe la curiosité et arrête la croissance, et se ferme à l’émerveillement et engendre l’obscurantisme.
Chaque nouvelle époque y vient ajouter l’inédit, et chaque personne y est appelée : à recevoir, à ajouter et à transmettre les trésors de la connaissance.
Face au cours de l’histoire et des évènements, l’arrêt systématique devient un recul.
L’innovation fait avancer et provoque un équilibre dynamique !
L’inconnu nous attend en permanence et il constitue un défi plein de potentialités.
Le risque est bien présent, mais il faut bien savoir l’intégrer hors de l’illusion que l’on peut l’éviter !
Goethe exprime :
« toute relation nouvelle mise au jour, tout nouveau procédé, les insuffisances et les erreurs mêmes sont utilisables ou stimulants, et ne sont pas perdus pour l‘avenir ! »
L’ouverture à l’inconnu fait du risque une opportunité !
Il y a l’appel à une ascèse au niveau du moi personnel qui le fait reculer paniquer, ou, qui le porte, une fois mentalement obstiné, à s’opposer à la nouveauté du Soi transpersonnel.
Au dire de Davina Cox :
« l’intellect doit être humble. Nous devons mourir pour le connu, avant que nous puissions faire l’expérience de l’inconnu ! »
Selon Assagioli :
« toute la compréhension d’une nouvelle vérité produit un élargissement de la conscience, le sens d’une expansion joyeuse et de libération ! »
La connaissance n'oppose pas le changement à la fixité.
Elle provient plutôt de leur synthèse.
C'est pourquoi, Assagioli ne considère pas que le "néophilisme" soit la bonne réponse au ' misonéisme ', car le changement de polarité, fruit d'une réaction, peut conduire à des situations chaotiques.
Le néophilisme dévalorise l’héritage et sabote son potentiel.
Le misonéisme s’accroche à la tradition, manque de flexibilité, provoque une sclérose existentielle et s’oppose à l’évolution !
Le fondamentale c’est d’avoir une attitude humble de détachement par rapport au passé et de l’ouverture concernant le futur... Une relativisation du connu et un accueil amoureux du mystère.
Il y a donc l’originalité de l’innovation en rapport avec l’héritage. Celui-ci est tradition dans le sens originel de faire passer d'une génération à l’autre, ce qui devient
une nouveauté par le biais d’une appropriation existentielle.
L’évolution a besoin de l’inclusion, tout en faisant appel à la transcendance.
Le savoir devient un obstacle à la nouveauté, lorsqu’il y a un attachement à nos propres connaissances.
Krishnamurti observe :
« L’homme qui ne cesse de s’abriter derrière des connaissances n’est pas un chercheur de vérité. La découverte de la vérité n’a pas de sentier. Vous devez entrer dans les océans inexplorés, ce qui n’est ni déprimant, ni aventureux.
Lorsque vous voulez découvrir du neuf, lorsque vous expérimentez, votre esprit doit être très tranquille ; car s’il est encombré, rempli de faits et de connaissances, tout ce bagage est un obstacle au neuf ! »
En d’autres termes, dit-il :
« si l’on n’est pas affranchi des résidus de l’expérience, on ne peut pas recevoir le neuf »
« Hors l’attachement aux résidus de nos connaissances et de nos vérités, on fait de la place pour tomber en amour avec la vérité ! »
« l’amour n’est pas un résidu, l’amour n’est pas une expérience, c’est un état d’être éternellement neuf ! »
Krishnamurti
L’amour de la sagesse se conjugue alors avec le détachement concernant les connaissances acquises.
Ce sont plutôt des paradigmes nouveaux et inclusifs qu'il faut créer.
Pour le fondateur de la psychosynthèse :
« il est évident qu'il ne suffit pas de détruire; on ne peut pas vivre dans le désordre, dans l'anarchie. Néanmoins, il faut chercher, trouver et essayer de nouvelles idées, conceptions et formes de culture et de vie pour remplacer les anciennes ! »
Mais, toute connaissance ne provient pas des domaines de la nouveauté.
On apprend du nouveau et l’on apprend d’avantage à voir l’ancien d’une façon nouvelle !
C’est la qualité de la prise de conscience sur nous-mêmes, et sur n’importe qui ou quoi, qui donne au savoir la teneur de la connaissance alliée à la saveur de la nouveauté.
L'ancien et le nouveau ne sont pas des alternatives, mais des stades complémentaires d'un processus permanent.
Plus important que de passer du vieux au nouveau, c'est le fait de les harmoniser tous les deux !
Chaque nouveau paradigme est davantage une création, et non pas un simple assemblage.
Lorsqu’on pense à l’ancien et au nouveau, il n’y est pas question d’une addiction, mais de leur synthèse laquelle simultanément représente et fait appel à la créativité.
Il y a alors du vin nouveau qui demande des outres neufs capables de contenir une énergie nouvelle !
Si un autre monde est possible,
une révolution démocratique est nécessaire !
Yannick Kergoat
À propos de la tension entre le passé et le futur, Assagioli remarque :
« Nous vivons dans une période de changements draconiens et de renouvellement rapide... bien des formules anciennes ne sont plus opérantes.
Les vieilles façons de vivre deviennent de plus en plus inadéquates par rapport aux exigences actuelles.
Il est donc inutile de nous y attacher et d'entretenir l'illusion de pouvoir les garder intactes.
Par contre, le nouveau ne doit pas être choisi à la hâte et sans discernement [...].
Nous ne devons pas abandonner les voies éprouvées avant d'en avoir trouvé d'autres nouvelles et meilleures.
Mais sitôt, que nous trouvons de nouveaux sentiers, nous devons avoir le courage et la volonté de nous jeter hardiment et joyeusement dans l'aventure que le futur nous réserve.»
Tout l’apprentissage doit intégrer le savoir dans la vie; non pour exclure ou remplacer quelque chose, mais pour la rendre plus vivante.
C'est pourquoi Assagioli considère comme erreurs :
- le matérialisme positiviste, de par sa limitation du logos aux faits naturels;
- que de l'intellectualisme rationaliste dans lequel le logos est séparé de la réalité vivante !
Tel est le cas, selon lui, de l'intellectualisme hindou, le sophisme grec et de la scolastique médiévale.
- Le savoir exclusif devient :
- extérieur,
- chosifié, imposé
- et formel.
tandis que
- le savoir inclusif est :
- intérieur,
- personnalisé
- et existentiel !
Le tableau suivant permet une meilleure comparaison des deux modèles.
Modèle formel :
Statisme : Le savoir est un produit fini et à recevoir. L'histoire se répète et le savoir est un héritage.
Modèle existentiel :
Dynamisme : Le savoir est une découverte permanente. L 'histoire se poursuit, le savoir est en même temps héritage et découverte.
Modèle formel :
Autoritarisme : Le savoir est le monopole des savants, son accès est contrôlé par ceux qui en sont les propriétaires. Le savoir est donné sous forme de dogme à accepter.
Modèle existentiel :
Démocratie : Le savoir est un bien commun. Il y a de la place pour donner et recevoir. Le savoir est partagé.
Modèle formel :
Légalisme : Priorité de la lettre sur l'esprit; le savoir est une norme (lois) à suivre.
Modèle existentiel :
Processus existentiel : Priorité du vécu sur la norme; le savoir est une expérience existentielle.
Modèle formel :
Utilitarisme : La créativité est en fonction de la productivité; le savoir est un produit de consommation.
Modèle existentiel :
Créativité : La créativité est en fonction de la vie.
Le savoir est un éveil intérieur.
Modèle formel :
Misonéisme : Le savoir est un acquis ; la garantie du
savoir est l'expérience.
Modèle existentiel :
Ouverture - Le savoir s’ouvre à la nouveauté. Il est souple. Sa sécurité est dans l'intégration.
Le savoir existentiel est incluant :
il comprend l'intégralité et la synthèse des données autant individuelles que collectives. Il ne constitue jamais un domaine exclusif et privé, puisqu’il fait l'objet d'un héritage et d'un projet de toute l'humanité.
La "démocratie culturelle" fait ainsi appel à une "psychosynthèse culturelle" axée sur le partage et fondée sur le principe de l'interdisciplinarité.
Pour progresser dans le savoir, il faut tenir compte aussi :
- du savoir-faire,
- du savoir-être
- et du savoir-vivre !
Connaître et se connaître doivent se conjuguer est un des principes de la Psychosynthèse !
4 - Pierres d'achoppement
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Dans la démarche psychosynthétique vers la connaissance de soi, il est fort important d’identifier les moyens menant à l’auto-identification.
Entre-temps, on doit tenir compte des attitudes et des obstacles qui retardent ou qui empêchent l’atteinte des objectifs.
Les attitudes susceptibles de différer ou de paralyser l'ouverture de soi à soi sont surtout :
- l'indifférence,
- le scepticisme,
- l'aboulie : Trouble mental caractérisé par la diminution ou la privation de la volonté, c'est-à-dire par l'incapacité d'orienter et de coordonner la pensée dans un projet d'action ou une conduite efficiente.
- la paresse
- et le découragement.
La volonté a un rôle très important à jouer pour contrer de telles attitudes.
Sur la voie qui conduit à l’auto-identification il y a souvent des écueils à découvrir et des obstacles à franchir dont il est fort important d’en prendre conscience.
Les sept éléments suivants que l’on passe à considérer semblent être les obstacles les plus communs à compromettre cette démarche qui affectent la personnalité !
Pourtant, elles sont difficiles à découvrir chez nous-mêmes, puisque trop proches et ordinairement déguisées !
4.1 l'Égocentrisme
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
L’égocentrique est une ivresse de soi-même. Il se caractérise par la tendance à trop se valoriser, d'absolutiser ses propres références, croyances et points de vue.
Ce penchant est défini plus explicitement par Assagioli, comme :
« une tendance générale à tout référer à soi, à tout considérer de façon subjective à partir de ses propres idées, de ses propres réactions émotives, et aussi en fonction de ses propres aspirations, et pour son propre intérêt, y compris les idéaux du bien ! »
Assagioli y ajoute:
« L’égocentrique parfois se donne du mal à faire du bien, mais il s’agit d’un bien fait à sa façon... Bien souvent c’est un bien autoritaire et fanatique. Il veut convertir à ses convictions, et imposer ses méthodes... dans les remèdes qu’il offre, et tout cela avec la meilleure des intentions ! »
L’égocentrisme est une caractéristique commune de la conscience au niveau de la personnalité.
Il y a alors une tendance à se fermer non seulement aux convictions des autres, mais à soi-même en créant une résistance à s’ouvrir à la lumière du Soi transpersonnel.
Assagioli désigne de : ' ptolémisme psychologique ' :
c'est le stade égocentrique où il observe une erreur de perspective.
La vraie connaissance de soi remplace ainsi la conception anthropocentrique et personnaliste, d'un héliocentrisme spirituel, ou en se focalisant que sur nous-mêmes.
Quelqu'un peut être altruiste tout en restant égocentrique, de même qu'on peut être allocentrique pour des raisons égoïstes.
René Le Senne exprime :
« tout homme est inégalement égocentrique et allocentrique :
le saint cherche en même temps le renoncement et le salut,
le héros poursuit la défaite de l'ennemi et se réjouit de sa propre victoire,
le savant cherche la vérité et il en escompte la satisfaction de son intelligence.
Inversement, le vaniteux, l'orgueilleux se soumettent au jugement des autres pour en recevoir éventuellement louanges, pouvoir, admiration, obéissance, si bien qu'on se demande souvent si l'orgueil est de l'humilité ou l'humilité de l'orgueil; la vanité un esclavage, ou le désir de la popularité du commencement d'une escroquerie ! »
Il y a toutes ces tendances au niveau de la personnalité, nommément la tentation et la déviance fort communes du culte de la célébrité !
Le dépassement de l’égocentrisme implique un renoncement relatif à n’importe quel sentiment et attitude personnelles qui tendent à transformer les autres en satellites de soi-même et souvent sous les déguisements de l’ego à l’ombre des drapeaux ethnocentriques d’une race, d’un pays...
Plus fondamentalement, il y a un appel à une nouvelle dimension de la propre individualité en termes d’identification.
Tel que remarqué par Abraham Maslow :
« la meilleure réalisation possible de l’identité, de l’autonomie, de l’individualité, est le dépassement de soi, percé au-delà et au-dessus de l’individualité ! »
4.2 ÉgoïsmeSources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
L’égoïsme est considéré par Assagioli comme étant l’obstacle fondamental !
Il traduit une vision utilitariste du monde et un état d’isolement, incitant à donner priorité à la satisfaction de ses propres besoins et désirs aux dépens et au détriment des autres.
Le narcissisme caractérise un tel état d’esprit.
Au contraire de l'égocentrisme, il n'y a pas de place ici pour l'altruisme !
Pourtant, l’égoïsme peut se manifester et se déguiser en apparences altruistes.
L'égoïste fait prévaloir ses propres intérêts et caprices...
Il se rend fondamentalement esclave des forces instinctuelles auxquelles il se trouve identifié par le manque de communion avec le Soi qui est la source de l'auto-identification et de l'amour tant pour soi-même que pour les autres.
Assagioli fait à cet égard la remarque suivante :
« Cette position égoïste, ou égocentrique, avant de constituer un manque du sens moral, est fondamentalement une illusion, une erreur... je dirais scientifique. En fait l’individu isolé n’existe pas. Volontiers ou non, on est stressé d’abord dans une foule de rapports interpersonnels et sociaux... on est en plus une partie intégrante de la vie universelle avec laquelle on a des rapports bien plus grands qu’on puisse s'en rendre compte ! »
Tout en considérant qu’il s’agit d’une tendance dangereuse inhérente à la nature humaine, Assagioli tient que :
« le contrôle de l’égoïsme n’est donc pas seulement une exigence éthique, mais aussi un besoin pour la vraie sécurité de l’humanité ! »
Le narcissisme est une modalité d’égoïsme caractérisé par l’auto-contemplation vide du vrai sens d’identification et authenticité.
L’égoïsme constitue l’illusion et le culte de la personnalité.
On dit qu’il s’agit de la dernière chemise dont l’homme se déshabille. C’est à noter que l’attachement à des états supérieures de conscience devient également une forme d’égoïsme déguisé.
Comme le dit Eric Fromm :
« Être exige
l'abandon de notre égocentrisme et de notre égoïsme »
« Être soi, s'accepter tel que l'on est, est la meilleure manière de conduire sa vie. Être authentique avec soi et avec les autres est le meilleur moyen de ne pas tomber dans les pièges de l'ego ! »
Laurent Château
4.3 Égotisme
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Plus qu’un simple obstacle à la connaissance de soi, l’égotisme traduit une perversité de l’égoïsme !
Culte idolâtrique qui enivre la personnalité c’est l’égotisme que Luce Sannangelantonio qualifie comme :
« une adoration de l'égoïsme ! »
En plus, c'est un attentat à l’identité et à la dignité des autres !
Effectivement, l'égotique se consacre avec acharnement au culte de soi et il n'hésite pas à abaisser n’importe qui pour s'élever, et donc à tout sacrifier au profit de son égoïsme !
Pour dénoncer cette erreur et cette déformation, Assagioli parle de :
« déification du moi individuel ! »
Il s'agit du pire des aveuglements en ce qui concerne la connaissance de soi et des autres.
Il représente la personnalité en même temps soucieuse de grandeur, nourrie de l’égoïsme et habillée en orgueil.
C’est dans ce sens que Alberti parle du :
« complexe de présomption » opposé à celui de l’humiliation, tous les deux à caractères morbides conduisant à la dissociation.
L’égotiste méprise les autres...
Celui-ci est synonyme de l'orgueil de la personnalité systématiquement fermée à la connaissance et à l’amour de soi-même et des autres.
4.4 Extraversion
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
L’extraversion semble l'obstacle à la connaissance de soi le plus commun et le moins facilement repérable, puisque systématiquement répandue.
En 1909, le jeune Assagioli écrivait :
« À cause d'un exil long et volontaire de notre civilisation dans le monde extérieur, nous avons perdu la connaissance intime et vécue de nous-mêmes. Alors, comme des étrangers, nous tâtonnons malheureusement dans le labyrinthe mystérieux de notre moi ! »
À l’âge avancé, il y revient avec des remarques analogues, généralement dit-il :
« notre attention, notre intérêt, nos activités sont tournés vers des problèmes extérieurs, pratiques, vers des tâches et des buts qui sont en dehors de nous-mêmes [...]. Nous négligeons de chercher à savoir ce que nous sommes et qui nous sommes. »
Il en résulte alors que nous sommes ' désaxés ', hors de notre axe central de la connaissance de ce que nous sommes en réalité !
Ce n’est pas l’aspect extérieur de la vie qui devient par soi-même un obstacle à la connaissance de soi, mais sa prédominance au point de méconnaître, oublier ou étouffer notre dimension intérieure.
Cette situation, bien commune à toute l’humanité, a été mise en évidence par la mythologie grecque, tout en faisant de Léthé le fleuve de la séparation et de l’oubli par rapport à nous-mêmes.
L’extraversion prend son sens lorsqu’elle signifie une irradiation à partir de notre centre de conscience, mais elle devient dangereuse comme :
l'ignorance, l'inconscience...
la fuite, le déni...
et l'évasion
par rapport à ce centre, d’où l’appel d’Assagioli à l’introversion comme un besoin urgent, puisque : en re-entrant chez nous- mêmes, nous découvrons notre Centre, et notre être véritable !
4.5 Dogmatisme
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Bien souvent la soi-disant connaissance de soi ne passe pas d’un amas d’informations empruntées, voire dogmatiquement imposées.
Le dogmatisme des notions et définitions, soit-il :
- psychologique,
- philosophique,
- politique,
- religieux ou autres...
reste toujours un piège pour n’importe quel système gnoséologique, et engrange un obstacle pour la connaissance en général, et tout particulièrement en faveur de la connaissance de soi.
le dogmatisme s’accroche à des convictions immuables et impose des vérités absolues. Pourtant, l'infaillibilité est bien loin de constituer un apanage humain. Le dogmatisme est sans doute une prison pour le savoir ?
Dans le savoir mal conduit, le dogmatisme peut faire monter l'ignorance, et l'infaillibilité semble traduire l'illusion la plus sophistiquée.
Lorsque l’information est transmise et reçue comme une sorte de sacrement d'une vérité absolue et agissante, la science peut figer et éconduire et la vérité.
Jouer aux vérités éternelles, c'est demeurer prisonnier d'erreurs perpétuelles.
Au dire de Viktor Frankl :
« Dans un sens, toute ‘ vérité ’ n’est qu’une erreur qui corrige une autre erreur. »
La Philosophie nous enseigne à douter de ce qui nous paraît évident.
La propagande, au contraire, nous enseigne à accepter pour évident ce dont il serait raisonnable de douter
Aldous Huxley
Quiconque, personne ou groupe, prétend savoir et imposer des vérités toutes faites fait preuve d’imposture et tombe d’emblée dans le discrédit.
Le dogmatisme est une cage qui fait croire qu'il offre la sécurité et peut nous transformer en esclavage. le dogmatisme est né de la cristallisation mentale qui finit de figer le cœur.
À l’opposé et souvent en réaction contre le dogmatisme il y a le refuge du scepticisme !
Néanmoins, tout en considérant la remarque de Freud :
« quand on se targue d’être sceptique, il convient parfois se douter de son propre scepticisme. »
Toutes les connaissances ayant leur pivot dans la sagesse appuient leurs postulats dans l’expérience directe à jamais axées sur des impositions extérieures et des notions figées.
Pitirim Sorokin remarque :
« Ce que semblait vrai hier est faux aujourd’hui, et demain on peut prouver d’être faux ce qui est vrai aujourd’hui ! »
Sans faire de la vérité un mensonge, il faut considérer son caractère provisoire.
Dans une démarche psychosynthétique vers la connaissance de soi,
il n'y a pas de place ni pour un savoir hermétique, ni pour un dogmatisme stéréotypé, ni pour une insécurité en provenance d'un agnosticisme incapable de dépasser les potentialités de la raison.
Le savoir est incompatible avec la prétention.
Les vérités, surtout par rapport à nous-mêmes, ne sont que points de départ pour la Vérité.
Elles doivent faire autant de l’héritage que de l’acquis un point de démarrage, ou simplement le soupçon d’un indicatif de bonne direction, ne correspond pas à un cul-de-sac d'une perspective sceptique.
Il y aura alors des connaissances sans monopole, de la conviction sans arrogance, de l’enseignement sans imposition, et de l’apprentissage sans présomption.
Il semble bien que nos vérités soient, en toute modestie et par rapport à la connaissance de soi, plus quelque(s) chose(s) que nous cherchons encore...
En fin de compte, la vérité n’est pas quelque chose à découvrir, mais plutôt quelqu’un (** quelque(s) chose(s) ) à identifier d’abord au cœur de nous-mêmes et à vivre dans la transparence du Soi, de l’esprit qui nous anime !
4.6 Individualisme
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
L’individualité risque d’être comprise dans le sens d’une indépendance séparative et d’exclusion, mettant l’individu à l’écart et au détriment des connections d’ordre social, aussi bien que dans l’isolement par rapport à l’univers !
Chaque personne est effectivement originale et toujours unique, tout en gardant des élément communs avec les autres humains !
Mais, l’originalité donne lieu à la distinction qui n’est pas du tout synonyme de séparation, et moins encore de confrontation ou d’exclusion.
Elle honore la différence qui s’oppose à l’indifférence, aussi bien qu’à la compétition !
Au cœur de la vraie identification, il n’y a plus de sens pour des illusions en termes de rapports de supériorité ou d’infériorité.
La connaissance de soi constitue à la fois le fondement de la psychosynthèse individuelle et le pont vers la psychosynthèse sociale !
Loin d’un repli sur soi-même, elle constitue le garant de la capacité pour la solidarité qui prend ses racines dans un rapport de valorisation et d’estime envers autrui.
Le point de départ reste cependant au cœur de nous-mêmes.
La modalité d'auto-identification conditionne :
- la façon d'identifier les autres,
- la nature des liens que l'on établit,
faisant que la connaissance de soi ne reste point comprise en termes de singularité absolue.
À la hauteur du Soi, il y a le singulier et le pluriel en même temps; l’individuel et le collectif se rencontrent et se complètent au niveau d’une synthèse !
Plus la psychosynthèse individuelle se concrétise au niveau du Soi transpersonnel, mieux, elle aide à comprendre que la connaissance de soi passe par des désidentifications successives, tout en impliquant non seulement la 'mort' du soi personnel, mais aussi le dépassement d'une identification exclusivement individuelle.
Le « connais-toi toi-même » reste une prémisse suivie de la conclusion suivante :
« et tu connaîtras l’Univers et les Dieux ! »
Tel est le texte complet de la plaque du temple d’Apollon le
dominateur du Python le serpent fabuleux.
Cela comprend deux aspects complémentaires :
- l’intériorisation vers l’auto-identification
- la sortie de soi-même vers la co-identification avec tout et tous.
La connaissance de soi n'est pas donc une œuvre isolée.
La conscience de nous-mêmes et la conscience des autres vont ensemble.
Avec sa thèse du « nul n’est une île », Thomas Merton explique :
« Ce n'est pas en nous repliant sur nous-mêmes mais en allant vers les autres que nous nous trouvons, et cependant avant d'aller vers les autres, il faut nous connaître nous-mêmes ! »
Cette pensée rejoint celle d'Assagioli lors de l’affirmation suivante :
« Il faut d'abord nous comprendre nous-mêmes, et ensuite les autres ! »
Il y a encore, au niveau du Soi, le sens et l’appel à la complémentarité entre l’individuel et l’universel.
La conscience du tout est nécessaire à l’identification de la fraction.
Dans les Mystères d’Éleusis, l’âme était même sensée de sortir du corps en vue de communiquer avec l’énergie du soleil répandue sur la terre et partout, de façon à attendre ainsi la vraie connaissance de soi.
Plutôt que d’abandonner le corps, il est question de le redimensionner. Larri Dossey exprime que :
« la frontière de notre corps doit être étendue même plus loin que la propre terre. »
En fait il y a :
« une corrélation d’un corps avec touts les autres, faisant que la vie soit un processus universel et non pas individuel. »
Cela correspond à une vision et une réciprocité qui commandent inséparablement la psychosynthèse dans ses expressions et ses dimensions :
individuelle,
sociale,
universelle.
À ce propos, Abraham Maslow écrit :
« La meilleure réalisation possible de l’identité, de l’autonomie, de l’individualité, est en même temps le dépassement de soi, percé au-delà et au-dessus de l’individualité. La personnalité devient ainsi moins égocentrique. »
Cherchant une auto- identification positive, on peut toujours dire avec Jacques Croteau :
« J'ai besoin de l'autre pour me connaître, comme il a besoin de moi pour se connaître [...]. Nous sommes l'un pour l'autre des miroirs ! »
Il n’y a pas donc de connaissance individuelle sans connaissance interindividuelle, alors que toutes deux donnent lieu à une identification à caractère spirituel, c’est-à-dire au niveau ou dans la perspective du Soi.
Un tel fait est ainsi présenté par Assagioli :
« Cette identification spirituelle est bien différente de l'identification passive et émotive qui se produit souvent entre personnes qui s'aiment passionnément; celle-ci est aveugle, absorbante, exclusive, exigeante; la première, au contraire, est clairvoyante, exempte d'attachement et désintéressée. »
Pareil degré d’auto-identification conduit à la communion avec tout et tous.
Comme le remarque Abraham Maslow :
« Il semble y avoir là un cas de parallélisme ou d’isomorphisme entre l’intérieur et l’extérieur. C’est-à-dire qu’au moment où l’individu perçoit l’essentiel de l’être du monde, il se rapproche de son être propre, de sa propre perfection, de son propre achèvement. »
Alberti exprime :
« la condition existentielle de l’homme semble d’être celle de se trouver dans une position centrale intermédiaire entre le Soi et le non-Soi. »
Une telle position pourra être perçue et vécue comme les limbes de l’existence.
Ken Wilber fait voir que :
« la frontière entre soi et non-soi est la première que nous traçons et la dernière que nous effaçons ! »
C’est tout à fait normal et amusant le questionnement de l’enfant par rapport à tout et à tous.
Il n’est pas moins naturel et excitant le souci de l’adulte en vue de l’auto-identification.
Celle-ci postule la connaissance des autres et de l’univers, dans le sens de conjuguer la psychosynthèse individuelle avec la psychosynthèse sociale et aussi avec la psychosynthèse universelle.
Cela donne en même temps un sens d’élargissement de notre identification, de pair avec la conscience de la juste proportion, où, loin de nous isoler du ' tout ', nous perdons la velléité d’en être le centre de convergence et de contrôle.
Tout ce qui existe peut alors devenir pour nous un miroir, d’identification et de co-identification en même temps.
Dans la perspective de l’univers dont chaque individu est partie constitutive, Teilhard de Chardin offre la réflexion suivante :
« Nous nous connaissons et nous nous dirigeons, mais dans un rayon incroyablement faible. Immédiatement au-delà commence une nuit impénétrable, et cependant chargée de présences - la nuit de tout ce qui est en nous et autour de nous, sans nous et malgré nous ! »
Le sens de l’intégration de l’individuel dans l’universel conduit à l’émerveillement de l’un et de l’autre !
La dialectique du ' je ' et du ' tu '
porte à la découverte de l’essentiel de chacun, en termes qui sont présentés comme l’identification de l’immanence divine au cœur de l’humain, le Namaskar, respectée et saluée en Orient par le ' Namasté ' voulant dire :
« Je salue la divinité en toi ! ».
L’honorable propos de Dostoïevski de :
trouver l’homme dans l’homme -
ne dispense pas la référence, le rapport et la complémentarité qui proviennent du tout et du tous.
Au lieu de la séparation, on peut y trouver la communion et aussi le mystère !
L’individualisme reste un handicap psychologique.
Telle est la pensée de Pascal, tout en considérant que :
« nous sommes quelque chose et nous ne sommes pas tout. [..] Le peu que nous avons d’être nous cache la vue de l’infini. »
L’image que l’on a de soi-même, étant toujours imparfaite, est souvent fausse, due à des erreurs qui proviennent soit de la fatuité soit de la dépréciation.
Celles-ci se trouvent en rapport avec la tendance de comparaison avec autrui,
souvent en termes de compétition, alliée soit à l’infériorité soit à la supériorité, voire aussi à la jalousie ou au dédain.
Assagioli relie cette attitude au développement mental allant de pair avec une grande adaptabilité de critiquer, de sur-analyser et de disséquer, de considérer...
4.7 Grégarisme
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Dans le processus de désidentification et d'auto-identification, il est important de tenir compte du genre de rapport d'identification établi avec autrui.
Alors que l’individualisme se ferme à l’autre, le grégarisme risque de diluer l’individu dans la collectivité.
Il semble que certains individus sont incapables de se désidentifier de leur groupe d'appartenance !
L’individualité qui détermine le caractère unique de chacun rend impossible de trouver l’identité personnelle en faisant des autres notre seul miroir !La réponse au : ‘qui suis-je ? ’
ne peut pas se dispenser de la perception d’autrui à notre égard.
Celle-ci peut contribuer à mieux identifier autant les traits uniques et les traits communs.
Il y a des donnés sur nous-mêmes dont quelqu’un d’autres peut nous aider à mieux découvrir. Nous acceptons alors de l’information à notre égard venue d’une perspective extérieure.
Il y a toujours quelque chose chez l’individu que la société peut lui aider à découvrir.
De l’autre côté, il y est question aussi d’apprendre sur nous-mêmes en mieux connaissant les autres.
En fait, comme le remarque Étienne Gilson :
« l’homme ne peut vraiment se connaître, tant qu’il prétend ne connaître que soi ! »
Cela confirme combien sont inséparables et complémentaires les dimensions individuelle et sociale !
Au dire de Thomas Merton :
« tout homme est un peu de moi-même, car je fait partie de l’humanité ! »
5 - Le vitrail des sous-personnalités
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Tout en débutant avec les travaux de Pierre Janet sur les ' personnalités secondaires ', la psychologie du dix-neuvième siècle commence de prêter une attention particulière aux manifestations des personnalités multiples ou sous-personnalités.
Sigmund Freud met en évidence la sous-personnalité
qu’il nomme le ' super-ego ' qui tend à remplacer et agir comme notre identité réelle.
Les travaux de Eugen Bleuler en Suisse vont dans la même direction !
La monographie d’Otto Rank :
Le Double, montre combien les différents anspects de l’image de soi manifestent chacun une sorte de volonté propre.
De son côté, son concitoyen Carl Gustav Jung souligne le rôle des archétypes nommément en ce qui concerne les tendances conflictuelles entre l’anima et l’animus qui en gros correspondent respectivement à l’émotion et à la raison. Sans qu’il soit identique à une sous-personnalité, l’archétype peut cependant être compris et alors fonctionner comme tel.
Les approches psychologiques de Fritz Perls et d’Eric Berne regardent aussi le domaine des sous-personnalités, lorsqu’il y est question respectivement du binôme « topdog / underdog » sont des transactions alliés aux composantes :
parent, enfant et adulte.
Le jeu des coussins** (chair work) proposé par la Gestalt Therapy, offre aussi un système semblable par le dialogue entre les différentes parties de la personnalité.
Une contribution majeure quoique postérieure provient de l’Amérique du Nord à commencer par William James l’un des pionniers dans l’identification des sous-personnalités, tout en tenant compte des variétés des soi (the various selves), ou petits-soi (little selves), et particulièrement avec l’œuvre de Morton Prince et de son école psychologique reliée à l’attention donnée aux consciences diverses coexistant dans le même organisme, ce qui porte Assagioli à commenter :
« La florissante école américaine, à la tête de laquelle se trouve le professeur Morton Prince de Boston, n’est pas encore connue et appréciée en Europe comme elle le mérite. [...] M. Prince et ses collaborateurs ont en effet mis en lumière nombre de faits qui augmentent considérablement nos connaissances sur la structure de la personnalité humaine et sur ses différentes modalités et lois de l’activité psychique. »
Eric Berne tient compte des différents états de l’ego (ego-states).
La littérature moderne nous offre à ces propos des exemples remarquables en terme de : sous-personnalités ou personnalités multiples telles que l’italien Luigi Pirandello et le portugais Fernando Pessoa.
Tant qu’elles ne sont pas intégrées, chacune reste, selon l’expression de Pirandello :
« un personnage en recherche de son auteur ! »
Robert Gérard remarque que Roberto Assagioli, le concepteur de la psychosynthèse, tout en donnant son attention au domaine de la personnalité, semble ne pas considérer ce sujet majeur :
le domaine des sous-personnalités, et cela en vue de ne pas les renforcer !
Il y a une stratégie de relativisation qui n’est pas le synonyme de manque d’intérêt !
Assagioli manifeste dès tous ses premiers écrits spécifiquement dans sa fable : « Le Roi intérieur »
où il y est question des « petits gnomes » fermés dans leur vision étroite et propos égocentriques.
Il s’agit du :
« le peuple ne connaît pas encore son Roi », les gens d’un petit patelin caractérisé par l’étroitesse, l’intrigue et l’intolérance... au point de condamner un jeune qui sort de l’ordinaire et qui en plus de l’expérience fait l’aveu de ce Roi intérieur : le Soi transpersonnel. »
En effet, dans le processus de désidentification proposé par Assagioli, le fondateur de la psychosynthèse par rapport :
au corps,
aux émotions
et à l’intellect,
il y a une conception des grandes sous-personnalités que l’on doit identifier et intégrer !
Malgré, cette attention dispensée au domaine des sous-personnalités, il reste important de souligner la primauté à donner à l’auto-identification, c’est-à-dire : au fait de ne pas glisser dans les identifications fruit d'attentions parcellaires centrées sur les sous-personnalités.
Telle est la position de Viktor Frankl qui définit l’être humain comme : « une unité en dépit de la multiplicité ! »
En reprenant la conception de Platon : la psychosynthèse considère l’être humain comme un état composé par différents citoyens, groupes et petites organisations !
C’est à noter que les sous-personnalités ont leurs racines non seulement :
- dans l’individu comme tel,
- mais aussi dans l’inconscient collectif,
soit en rapport avec les archétypes mentionnés par Jung, soit dans l’héritage parental tel qu’analysé par Léon Daudet en rapport avec la gestation !
C’est dans ce sens qu’Assagioli tient compte de : ' l’héritage psychique '.
Il distingue en plus, au cours du développement individuel,
- l’enfance
- et l’adolescence
comme des étapes propices à l’empreinte des sous-personnalités.
En plus des sous-personnalités individuelles, il y a aussi les sous-personnalités collectives comme :
- le genre,
- la race,
- la mode,
- la nation...
et maintes groupes dont on fait partie et qui conduisent à des identifications partielles.
Le mythe de la tour de Babel s’applique non seulement à la confusion à l’intérieure de la personnalité, mais aussi à celle de la société d’appartenance.
On trouve par exemple chez certaines traditions africaines, la conviction que l’être humain est animé de plusieurs esprits provenant des parents et des ancêtres tous en interaction, ce qui peut être perçu comme une multitude de sous-personnalités qui peuvent étouffer autant la personnalité que l’identification individuelle.
Cela fait penser à la portée de cette affirmation anonyme selon laquelle :
« il y a plus de prisons à l’intérieur de l’homme que des hommes à l’intérieur des prisons ! »
Comment identifier plus précisément les sous-personnalités ?
Ken Wilber s’occupe de différentes particularités, tout en y distinguant :
- les sous-personnalités archaïques,
- les sous-personnalités magiques,
- les sous-personnalités mythiques,
- les sous-personnalités rationnelles,
- et même les sous-personnalités de l’âme laquelle il distingue de l’esprit !
Assagioli lui aussi parle de l’âme multiple (animo molteplice) ou « groupe de je » sans coordination.
Il va jusqu’à voir dans chaque être humain :
« un personnage pirandellien. » :
Face à tout un ensemble d’éléments différents et contrastants, il le compare à un harem polypsychéiste où les différences souvent se font accompagner d'opposition réciproque.
Il s’agit de structures semi-autonomes à l’intérieur de la personnalité, chacune avec des origines, des caractéristiques et des rôles particuliers.
Il s’agit de multiples tendances et dissonances à l’intérieur de la personnalité !
Chaque sous-personnalité est une partie de la personnalité qui tend à se prendre et se manifester comme le tout.
C’est un élément déconnecté du centre de conscience et donc inconscient de son identité réelle, puisque sans rapport avec le tout !
D’autres parlent de notre « collection » ou de « parlement ».
Malgré cette sorte de pluralisme, il y a une séparation et un isolement qui tendent à renfermer, dans une attitude souveraine, chaque sous-personnalité dans le domaine restreint de son château fort !
Tout en acceptant la métaphorique utilisée, il faut cependant comprendre les sous-personnalités non pas comme des sujets ou des objets à cataloguer, mais comme des comportements habituels, fruit de tendances et habitudes plus ou moins enracinées !
Il s’agit de formations psychiques assez stables, au sein de la personnalité, fruit d’une idée fixe ou d'un comportement habituel.
C’est une sorte d’incrustation psychologique pour laquelle la sagesse orientale utilise le nom ' sanskrit de Samskara '.
Cela peut atteindre n’importe quel domaine conscient ou inconscient, tel qu’illustré ci-dessous.
C’est à noter :
que chaque sous-personnalité peut contenir des éléments en provenance des niveaux soit personnel soit transpersonnel et tout un mélange de contenus bio-psychiques qui portent à la confusion entre la partie et le tout.
- Inconscient inférieur
- Inconscient moyen
- Supraconscient
- Champ de la conscience
- Moi personnel
- Soi transpersonnel
« le cœur de la psychosynthèse ! »
L’approche psychosynthétique promeut en même temps :
- la reconnaissance,
- l’acceptation
- et l’intégration
de nos sous-personnalités.
L’acceptation dépasse la répression et la résignation et n’exclut pas le malaise face à une sous-personnalité quelconque !
De ce fait, Assagioli considère la psychosynthèse comme :
un processus de croissance axer sur l’intégration harmonieuse de tous les aspects de la personnalité autour du Soi, le centre de conscience et de volonté !
Ailleurs, il présente son approche psychologique comme étant :
« un ensemble de méthodes d’action psychologique destinées à favoriser et à promouvoir l’intégration et l’harmonisation de la personnalité humaine. »
Il s’agit de la prise de conscience et de l’intégration des personnalités parcellaires nommées :
sous-personnalités ou sub-personnalités.
En fait, remarque-t-il :
« les sous-personnalités se comportent comme des êtres différents, ayant chacune des caractéristiques diverses et mêmes opposées. »
Entre-temps, puisqu’il y a - le désordre et le contraste -, alors l’intégration devient, dit-t-il :
« notre problème, notre travail et notre devoir ! »
Une telle affaire postule une désidentification à l’égard de chaque sous-personnalité, de pair avec la conviction concernant la possibilité de sa transformation et de son intégration, malgré sa stabilité et la rigidité de sa structure.
Ce qui s’avère un obstacle peut devenir une ressource !
Les maîtres du Hassidisme juif parlent :
des étincelles de la lumière divine éparpillées et perdues dans le monde et de la responsabilité de les guérir et les racheter !
Dans les traditions chamanistes :
on s’occupe des maladies provenant de situations traumatiques où l’âme est brisée au point que l’on perd la conscience de ses parties.
Il y a alors un traitement et un entraînement pour les récupérer et intégrer, tout en faisant recours à une entité mythologique qui semble remplacer le centre de la conscience présenté par la psychosynthèse.
À une telle entité, souvent : un animal de pouvoir, on attribue le rôle de centre intégrateur !
La technique de l’analyse transactionnelle d’Eric Berne se prête à une attention particulière concernant l’identification et l’intégration des sous-personnalités.
📌 L’analyse transactionnelle est basée sur identification en rapport avec trois sous-personnalités majeures :
la composante parentale, soit bienfaitrice ou alors critique;
la composante enfantine, docile ou alors rebelle;
la composante adulte qui calcule et qui décide.
Une fois toutes les trois bien intégrées, il y la transformation et la libération !
📌 C’est le même en ce qui concerne la Gestalt thérapie de Fritz Perls.
Il y est question de deux grandes sous-personnalités désignées le ' top dog ' et le ' under dog '.
Top dog contre under dog est une expression inventée par Fritz Perls, le père de la Gestalt-thérapie, pour décrire :
un jeu d'auto-torture auquel les gens jouent avec eux-mêmes afin d'éviter l'anxiété qu'ils rencontrent dans leur environnement.
Tout en reconnaissant la nature fragmentaire de la personnalité humaine et la complexité provenant des multiples sous-personnalités... l’approche psychosynthétique tient compte en même temps du Soi comme centre intégrateur et de moyens et des attitudes les plus adéquats en vue de leur synthèse fruit d’une personnalité bien harmonisée.
Dans la démarche vers l’intégration des sous-personnalités qui mène à l’harmonie de la personnalité et qui culmine dans la synthèse, il y a des étapes à considérer.
On y peut distinguer les suivantes, en nombre de six :
- La reconnaissance,
- l’acceptation,
- la transformation,
- la coordination,
- l’intégration,
et à leur terme : la synthèse.
5.1.1 Reconnaissance
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Celle-ci provient de la prise de conscience du morcellement effectif de la personnalité, où chaque partie ou sous-personnalité peut être comparée à un morceau d’un miroir cassé.
D’abord, il nous faut reconnaître l’existence des sous-personnalités en nous-mêmes, comme d’ailleurs chez les autres.
Leur identification est une découverte qui peut bien nous surprendre !
Dans le processus de cette identification, il devient utile de donner à chacune de nos sous-personnalités un nom qui nous semble mieux la caractériser !
Plus concrètement, il convient de dresser une liste de nos propres sous-personnalités, y incluant l’attribution à chacune d’un surnom descriptif et même un dessin, de préférence une étiquette humoristique alors plus apte à la désidentification.
Il devient important d’examiner jusqu’à quel point nous sommes encore identifiés à chacune de ces parties de nous-mêmes, et de vérifier leur rapport et le domaine ou dépendance qu’il y a de l’une partie par rapport aux autres.
Il est à considérer, en plus :
autant la persistance que le changement concernant chaque sous-personnalité, y considérant le temps et les circonstances.
Les sous-personnalités les plus subtiles sont alors difficiles à identifier : sont celles qui se cachent en arrière de son opposé, comme c’est le cas d’une politesse extérieure qui sert à cacher la peur, le mépris et même la rancune !
Comme un premier pas Assagioli suggère de :
« prendre conscience de ces personnalités parcellaires afin d’éviter de nous identifier avec l’une ou l’autre d’entre elles. »
Les sous-personnalités, on l’a noté, peuvent se manifester à tous les niveaux de la conscience et de l’inconscient.
Tout en partant du fait qu’à la racine de chaque sous-personnalité il y a une qualité transpersonnelle positive !
Jean Hardy fait voir l’importance de découvrir cette qualité, aussi bien que les barrières que l’on a bâti au tour d’elle, étant donné que les sous-personnalités vivent surtout dans le domaine inconscient.
Il y a aussi la possibilité d’y découvrir d’autres sous-
personnalités en affinité ou alors en cascade !
Assagioli fait noter le fait qu’elles :
« les sous-personnalités ne restent pas fermées en elles-mêmes, tout en agissant continuellement l’une sur l’autre, en s’alliant, ou en se disputant mutuellement, dans une interaction continuelle. »
Les sous-personnalités offrent une image de nous-mêmes et des autres à la fois :
statique,
fragmentaire
et partielle,
ce qui nous rend prisonniers de nos sensations, émotions et idées.
Cela suscite des difficultés d’ajustement personnel et qui origine des rapports sociaux inconsistants et problématiques.
En arrière de chaque sous-personnalité, nous pouvons
découvrir l’étouffement ou la distorsion de nos qualités !
Une attitude positive y est indispensable, sans quoi on ne peut pas découvrir leurs qualités actuelles et leurs virtualités latentes.
La reconnaissance et la désidentification concernent chaque sous-personnalité, y considérant son potentiel et ses limites, reste une étape fondamentale en vue de son acceptation et de son intégration !
5.1.2 Acceptation
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
De paire avec l’identification des sous-personnalités, il y a une réaction qui peut aller du rejet jusqu’à l’acceptation.
C’est commun et normal d’avoir des sous-personnalités !
Ce serait une erreur a priori de les associer à une manifestation pathologique.
Il faut bien les valoriser, sous peine de ne jamais arriver à leur intégration.
C’est donc fondamental pour l’intégration de chaque sous-personnalité le fait de l’accueillir sans aucun jugement de valeur.
Tout en suivant le conseil d’Assagioli :
« nous ne devons pas nous troubler, nous décourager, et moins encore en avoir peur... en fait cette multiplicité est fondamentalement une richesse ! »
Il y un potentiel vital qui mérite notre attention et notre considération !
Tout en admettant que le monde des sous-personnalités se caractérise par l’obscurité et la confusion, ce serait cependant une erreur de les considérer comme une sorte de monstres à enchaîner, ou de maladies à guérir !
Chaque sous-personnalité refoulée prend l’allure d’un fantasme envahissant !
Cela reviendrait de condamner une sous-personnalité où d'en avoir peur.
En effet, d’accord avec l’affirmation de Piero Ferrucci :
« toutes les sous-personnalités sont l’expression d’éléments vitaux de notre être, même si elles peuvent nous sembler négatives au premier examen ! »
Alors...
« elles ne deviennent dangereuses que si elles nous contrôlent ! »
Tout en disant que :
« l’on ne peut parler de sous-personnalités ‘négatives’ ou ‘positives’ »
Ferrucci fait voir, en plus :
« que si nous n’acceptons pas une sous-personnalité, nous provoquons son involution ! »
Il y a donc un appel direct à :
l’accueil et non au refus,
à l’éducation et non à l’abdication !
Les sous-personnalité constituent des aspects différents de nous-mêmes.
Il n’y est jamais question de nous en débarrasser. Leur rejet signifie le rejet de nous-mêmes et l’engendrement conséquent d’un blocage.
L’acceptation, est bien plus qu'une simple tolérance, se fonde sur le potentiel latent, y incluant :
les forces et les faiblesses inhérentes.
Assagioli y voit :
« une sorte de ‘matière’ à modeler, un ensemble d’éléments psychophysiques à organiser, à transformer, à mettre en harmonie et à utiliser ! »
L’acceptation bienveillante, hors de tout jugement, devient donc un pré-requis fondamental dans le processus psychosynthétique de l’intégration de n’importe quelle sous-personnalité.
C'est plus une attitude d’accueil inconditionnel qu'un niveau de conscience atteint. Le même accueil doit être alors dispensé autant à une tentation qu’à une bonne inspiration ou même à un état d’extase !
5.1.3 Transformation
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Assagioli tient que le processus de régénération, de transformation et d'unité, quoique difficile, devienne possible et rémunérateur !
C’est par le biais de la transformation des aspects ombreux de chaque sous-personnalité que s’opère la régénération de la personnalité.
La transformation des énergies fragmentées et dissonantes permet leur inclusion et l'unification, de façon à contribuer pour l’épanouissement de la personnalité.
L’intégration est toujours une inclusion, mais toute inclusion n’est pas une intégration, comme c’est cas des états enfantins en indissociation.
La différentiation est un préalable à l’intégration.
Il y a une prise de conscience antérieur au processus de reconstruction de la personnalité autour du centre unificateur.
Piero Ferrucci considère que :
« les sous-personnalités sont des dégradations de nos qualités, au moins au niveau potentiel. »
Cependant, il faut bien éviter d’allier les sous-personnalités à des manifestations pathologiques !
Je vais offrir mes remarques à propos du terme : manifestations pathologiques !
« Souvent dans le monde en général, mais aussi dans les disciples : médecins, thérapeutes, mauvais gourous... où mêmes dans nos familles et nos relations, s'exprimer à propos de quelqu'un ou de quelques choses plutôt irrationnels pour celui qui écoute, ils ou elles t'exprimeront ' tu n'es pas bien dans ta tête Eddy, tu es fou, faut consulter »
« Cette perception est un schéma de perception erronée de la part - du jugeur - il ou elle ont peur de cet inconnu... Le pire, c'est qu'on pourrait les croire et se faire interner à tord parce qu'on m'a dit que ' j'étais pas ' normal ' / ' dingue ' ! »
Eddy Vonck
Assagioli fait voir combien :
« un certain degré de dissociation est un fait normal de la ‘condition humaine’. »
La transformation est plutôt un changement d’attitude !
Tant et aussi longtemps qu’une sous-personnalité quelconque se prend pour le vrai centre personnel ou transpersonnel, il y a place pour des contradictions dans l’identification, tout comme dans le comportement !
Il s’agit là d’une erreur provenant d’une illusion qui n’exclue pas la bonne foi !
Assagioli attribue cette erreur :
« aux faux moi dont le vrai moi est la victime ! »
La découverte d’une telle erreur, remarque Assagioli, doit passer par la désidentification que seul le centre de conscience peut faire :
« Une fois qu’on est arrivé à trouver, ou à choisir, ou à créer le Centre unificateur, il est possible de former et de construire autour de lui la nouvelle personnalité, une personnalité unifiée, cohérente et organique.
Cela constitue la vraie psychosynthèse ! »
5.1.4 Coordination
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
C’est à noter, avec Assagioli :
« que dans l’état actuel d’évolution, l’être humain n’est pas une unité harmonique et cohérente, mais il est constitué d’un ensemble d’éléments hétérogènes et contrastants regroupés en plusieurs centres qui se trouvent à différents niveaux relativement indépendants les uns des autres ! »
Lors d’un cours donné en 1936, il présente son approche psychologique comme :
« la méthode de reconstruction de la personnalité. »
Assagioli parle aussi :
« de coordination et d'harmonisation des éléments et fonctions existants déjà activés. »
Chaque sous-personnalité est en effet une sorte d’oppression soucieuse d’expression. Elle tend toujours à jouer un rôle !
Le problème n’est pas le rôle, mais la façon de le jouer.
Comme dans un orchestre, il faut bien intégrer chaque joueur et l’harmoniser.
On désigne parfois les sous-personnalités comme étant notre : “ famille intérieure ” et on parle alors du : ' théâtre intérieur ' par rapport à leurs rôles et interactions, ainsi que du drame thérapeutique destiné à résoudre leurs conflits et à faciliter leur intégration.
Au niveau du Soi, il n’y a plus de place pour la confusion ni pour la dramatisation !
Assagioli parle alors du Soi comme :
« du Spectateur de la tragi-comédie humaine. »
Sans jamais s’identifier avec les sous-personnalités, le Soi reconnaît leur potentiel et les engage toutes dans la voie de leur propre intégration et de leur expression conséquente.
Seul le Soi qui ne s’habille jamais d’aucun masque est à la hauteur pour identifier, pour valoriser et pour incorporer chaque sous-personnalité.
Cette incorporation est le fruit de leur intégration qui traduit le passage :
- de la contradiction à l’acceptation,
- de la confusion à l’harmonie,
- de la multiplicité à l’unité.
Il y a alors le dépassement des résistances et une mise à profit de qualités partagées !
La psychosynthèse est conçue par son fondateur comme :
« un ensemble de méthodes d’action psychologique, visant à favoriser l’intégration et la coordination harmonieuse de la personne humaine. »
En fait, la coordination des sous-personnalités prépare
l’intégration.
Il s’agit d’établir un contact avec le vrai centre de conscience, aussi bien que de l’interaction concernant les différentes sous-personnalités.
La volonté a un rôle important à jouer, tel que le chef d’orchestre selon la métaphore d’Assagioli.
Tout en s’inspirant de l’œuvre : « The Theatre of Life»
de Nicholas Evreinoff, celui-ci attribue :
- au Soi transpersonnelle, le rôle d’auteur,
- au moi personnel celui de directeur,
- et aux sous-personnalités les rôles d’acteurs,
dans une interaction de plus en plus harmonieuse, culminant dans la fusion finale de l’être humain intégré.
La volonté fait la médiation entre les sous-personnalités en conflit.
C’est le rapport avec le Soi qui donne à cette fonction psychologique par un aspect bienveillant qui empêche de tomber dans une force dominatrice, et donc de devenir elle-même une autre sous-personnalité !
5.1.5 Intégration
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Tel que mentionné plus haut, Assagioli présente la psychosynthèse comme étant :
« un ensemble de méthodes d’action psychologique destinées à favoriser et à promouvoir l’intégration et l’harmonie de la personne humaine ! »
L’intégration fait appel à des ajustements qui sont propres à la nature de la vie.
Cela couvre la totalité de l’être, sans jamais mettre de côté ou minimiser ce qui semble plus :
- superficiel,
- périphérique
- et secondaire !
Une telle intégration est fondamentalement le fruit de la bonne coordination des différents niveaux de la conscience à partir du Soi : son centre.
Elle prend place lorsque il y a, entre les éléments de la personnalité, et tel que signalé par Martha Crampton :
« un échange mutuel, de façon à que le fonctionnement de chacun se trouve accru grâce à la contribution de l’autre. »
Dans le processus d’intégration, il est à considérer non seulement l’ampleur, mais aussi le niveau !
L’intégration n’est pas un dépassement, mais une inclusion plus ou moins harmonieuse.
Ce qui caractérise la psychosynthèse c’est qu’elle s’occupe de l’intégration et l’harmonisation des éléments psychologiques, dans leur totalité et à un niveau toujours plus élevé !
Chaque intégration fait de l’interlude de ces éléments le prélude d’une synthèse !
Dans le domaine personnel, la psychosynthèse est caractérisée par un travail préliminaire de régénération et de reconstruction de la personnalité.
L’intégration représente l’union des parties avant séparées. Il y a trois stades à considérer :
- La personnalité non intégrée,
- la personnalité en voie d’intégration,
et autant que possible, la personnalité déjà intégrée.
Dans la personnalité non intégrée :
chaque sous-personnalité se trouve rigidement fermée sur soi-même et non l’alignée par rapport au centre de conscience.
Dans la personnalité en voie d’intégration :
les sous-personnalités se trouvent déjà en rapport avec le centre de conscience et moins isolées les unes des autres.
La personnalité intégrée se caractérise par l’incorporation des sous-personnalités en régime de complémentarité et sans conflits.
Il convient remarquer que le processus d’intégration concerne également des éléments en provenance du supraconscient qui demandent une incorporation, sous peine de provoquer un déséquilibre de la personnalité.
C’est à souligner que la psychosynthèse ne constitue pas un dépassement de la personnalité, mais une intégration à n’importe quel niveau de conscience.
Elle ne constitue pas non plus une condition sine qua non pour les manifestations supérieures.
Mais fondamentalement, il s’agit du mariage de la personnalité avec le Soi transpersonnel !
Assagioli remarque :
« La tendance à l’intégration est un fait certain qui a été affirmé et mis en évidence en tant que besoin fondamental et normal de la personnalité humaine; mais de là à s’imaginer que c’est un fait accompli, il y a un grand pas qu’il ne faut pas trop se hâter de franchir. »
Ce processus d’intégration, tel qu’il le conçoit, n’est jamais arrivé à son terme :
« Le processus psychosynthétique n’est pas une tâche que l’on peut compléter une fois par toutes, une œuvre qui conduit à quelque chose de définitif et statique tel que la construction d’un édifice. C’est un processus vital et dynamique qui conduit à des nouvelles conquêtes intérieures et à des intégrations toujours plus amples ! »
Dans une note personnelle datée de février 1960 et intitulée « intégration », Assagioli avertit qu’il ne faut jamais comprendre l’intégration comme :
« un état final de grâce»,
mais plutôt :
« comme une alternance de crises et d'intégrations tout au cours de la vie et donc sur une période illimitée. »
Il devient plus adéquat de parler d’intégrations, au pluriel, que de l’intégration tout court.
C’est encore à considérer que l’intégration n’est pas possible à titre purement individuel, étant donné les implications, les exigences et les contingences d’ordre sociale !
Au niveau transpersonnel, la psychosynthèse est axée sur l’expérience du Soi en tant que noyau d’identification et pivot d’intégration de toutes les composantes de l’être humain.
Mais, il ne faut pas atteindre la conscience du Soi, c’est-à-dire au niveau transpersonnel de conscience, pour intégrer la personnalité et donc pour commencer le processus psychosynthétique.
Dans la mesure où le moi personnel, en tant que centre de conscience, parvient à se désidentifier des contenus biopsychiques du champ de la conscience, il peut devenir un vrai centre intégrateur donnant lieu à la psychosynthèse dite personnelle.
Moyennement la concentration, on peut alors arrêter le flux des images et créer l’ordre à la place du désordre.
En fait, avant la psychosynthèse au niveau transpersonnel, il y a normalement l’œuvre fondamentale au niveau qui fait du moi personnel le centre d’intégration et d’harmonisation.
Le jeu des coussins, allié au psycho-drame et à la Gestalt thérapie, devient particulièrement adéquat à un travail
préliminaire avec les sous-personnalités, sans oublier, en psychosynthèse, un coussin pour le Soi !
Le Soi qui est considéré comme le noyau de notre identité, il constitue le centre intégrateur de la personnalité dont les éléments qu'il coordonne, harmonise inspire et guide.
Observation d' Alberti :
« la personnalité séparée de l’âme perd son centre unificateur, se désorganise, se confond et se détruit. La multiplicité prévaut sur l’unité : la personnalité se fragmente et se dissocie. L’homme se désoriente vers le chaos ! »
Dans une situation chaotique ou perçue comme telle, il y a l’opportunité d’agir et la possibilité de réussir.
Assagioli tient que :
« chacun de nous puisse et doive faire du matériel vivant de la personnalité, n’importe qu’il s’agit d’argile, marbre ou or, un objet de beauté, à travers laquelle puisse se manifester adéquatement son Soi transpersonnel ! »
On peut alors vérifier, par rapport à chaque élément intégré, une sorte de délivrance !
En concordance avec la remarque d’Assagioli : il devient important de tenir compte de la portée et l’impact de la dimension sociale dans le processus de l’intégration :
« La psychosynthèse ne s’accomplit pas seulement par le moyen d’exercices psycho-spirituels... l’action externe, et l’activité dans le monde, peut aussi constituer une façon sage et décisive, et un moyen efficace d’intégration de la personnalité. »
Cela vient confirmer le postulat de la complémentarité et le caractère inséparable concernant les domaines :
individuel,
social,
universel de la psychosynthèse.
Sans abdication de l’individualité, il n'y a pas de dévouement personnel consacré au bien de tous !
En fait, pour devenir ' authentique ' le processus d’intégration ne peut plus se dispenser de l’attention à autrui.
TOUS ENSEMBLE !!!!!!!!!!!!!
5.1.6 Synthèse
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Alberti parle de la personnalité orientée vers ce qu’il nomme :
« la personne profonde ! »
Souvent les écoles gnostiques identifient la personnalité au corps physique.
Elle est présentée soit comme l’opposé inconciliable de l’individualité, soit comme simple polarité dont l’intégration plausible et désirable.
Dans la perspective platonicienne de l’âme sœur : la personnalité et l’âme constituent les deux parties de la personne humaine séparées et qui maintenant se cherchent !
La totalité résulte d’un processus d’incorporation de la personnalité qui conduit à l’unification de la dite synthèse.
La personnalité n’est jamais effectivement séparée de la totalité de l’humain, sorte d’une schizophrénie, ou une amputation allégorique d'un de nos membre.
L’intégration de la personnalité est reliée à une prise de conscience de la totalité, c’est- à-dire : à l’atteinte ou au retour d’une synthèse opérée par l’esprit.
Contrairement à l’évasion, il y a l’inclusion.
Tout loin d’une suppression, il y a une élévation, voire une rédemption de la personnalité !
Au niveau du superconscient, on devient alors superpersonnel !
La synthèse a lieu lorsqu’il y a une intégration effective de la personnalité autour du centre de conscience.
Mais, c’est quoi la personnalité en termes de psychosynthèse ?
Dans son sens étymologique : la personnalité provient de ' persona ' le mot latin aussi utilisé pour désigner le masque !
Souvent la personnalité, désigne aussi l’ombre, devient synonyme du corps physique, alors conçu comme polarité par rapport à l’âme.
Ilario Assagioli, le fils de Roberto Assagioli, fait la remarque suivante : “
« Dans l’astrologie ésotérique le Soleil : représente le Soi, l’Individualité, l’Être véritable proprement dit : l’Âme... tandis que la Lune indique notre personnalité, nos aspects inférieurs destinés à être régénérés et que masquent l’Âme. »
C’est à remarquer comment, ici l’individualité, le Soi et l’Âme sont présentés comme des termes synonymes.
Effectivement, il s’agit de l’ensemble des éléments psychosomatiques.
Assagioli tient compte de :
« la liaison entre l’Esprit – à travers l’âme – et la personnalité dans ses trois aspects :
mental inférieur,
émotif,
et physique.
Tout ce qui existe dans le macrocosme se répète en lui ! »
Assagioli fait la distinction entre la personnalité et le Soi qui est le noyau de l’individualité :
Le Soi et la personnalité sont deux choses tout à fait différentes.
Le premier [le Soi] est : unique, simple, identique;
la deuxième [la personnalité] est : instable, complexe, pouvant se dédoubler !
Quoique immanent par rapport aux éléments de la personnalité, le Soi les transcende toujours et les intègre en même temps.
La personnalité est parfois considérée comme étant la maison du Soi !
En réalité, il n’y est pas question d’une maison (la personnalité) habitée et animée par quelqu’un (le Soi), puisqu’il s’agit, en partant de l’allégorie, plutôt d’une maison dont la vie provient de toutes ses composantes.
Il n’est pas moins important d’être un corps ou une personnalité animés, que d’être une âme incarnée.
Nous sommes ontologiquement, et donc inséparable, l’un et l’autre.
Le Soi et la personnalité méritent la même attention !
Assagioli exprime :
« c’est par la lumière d’en haut, la lumière du Soi supérieur ou l’Âme que la personnalité peut être illuminé ! »
Le dépassement des conditionnements de la personnalité n’est pas synonyme d’exclusion ou de séparation par rapport à celle-ci.
Il s’agit, tel qu’explicité par Assagioli :
« de la régénération des éléments personnels, lesquels, une fois purifiés arrivent à faire partie d’une synthèse supérieure ! »
L’objectif est l’intégration à un niveau toujours supérieur et plus englobant.
Dans le processus psychosynthétique :
la personnalité est en même temps transformée et intégrée !
Ce qui porte Ilario Assagioli, le fils de Roberto Assagioli, au commentaire suivant :
« Cette synthèse et cette intégration entre personnalité et Individualité (ce que mon père appelle psychosynthèse) forme ce qu’ordinairement se définit comme ‘caractère’.»
En fait, l’intégration vise l’harmonie et l’unité de l’être tout entier :
- physique,
- émotionnel,
- mental
- spirituel.
Tant que nous sommes éloignés du centre de conscience, il y a la tendance à nous identifier avec notre personnalité, voire avec une sous- personnalité quelconque, et à y trouver de la sécurité.
Mais il ne faut pas atteindre la conscience du Soi, c’est-à-dire le niveau transpersonnel de conscience pour entamer la synthèse.
À la lumière du moi personnel, il est :
possible,
nécessaire,
fondamental
d’entreprendre un tel processus, dans la mesure où nous parvenons à nous désidentifier des contenus biopsychiques du champ de la conscience.
Alors, il y a la possibilité d’une synthèse, au quelle, une fois effective, se traduit par la psychosynthèse personnelle laquelle reste un élément constitutif de la psychosynthèse transpersonnelle.
C’est propre de la psychosynthèse de promouvoir et de concrétiser l’intégration harmonieuse de tous les éléments de la personnalité, jusqu’à leur unification vers une synthèse effective opérée, d’abord au niveau du moi conscient, et plus définitivement dans le domaine transpersonnel, au niveau du Soi.
Dans la mesure où ce Centre devient identifié et reste perçu plutôt comme Soi spirituel, on se trouve alors identifié au niveau de la psychosynthèse transpersonnelle.
Le centre d’identification n’est plus alors au niveau de la personnalité, mais de l’individualité. Il y a un dépassement, mais jamais une exclusion.
On a la conscience d’être un individu doué de sa propre
personnalité, c’est-à-dire quelqu’un qui a la capacité foncière de collaborer à sa propre psychosynthèse aux niveaux personnel et transpersonnel !
6 – Re-identification
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Le fait de chercher et de trouver chez les autres des éléments de réponse à la question ‘qui suis-je ?’
Peut bien nous aider, mais à condition d’éviter la dépendance esclave qui porte à chercher et à bâtir notre propre modèle à partir de l’extérieur, notamment dans de sens d'essayer de plaire à quelqu’un.
Le besoin d’approbation y devient alors un masque qui cache la lumière intérieur, ainsi qu’une évasive à la question sur notre identification, portant alors à nous détourner de nous-mêmes.
Autant que l’esprit grégaire étouffe l’identification individuelle, il y a ce que Erich Fromm classifie de :
substitution du ' soi originel ' par le ' pseudo-soi ', avec toute l’aliénation et l'esclavage inhérents !
Au dire de cet auteur :
« la chute réelle de l’être humain est son aliénation par rapport à soi-même ! »
En effet :
« le pêché n’est pas premièrement faute contre Dieu, mais faute contre nous-mêmes ! »
Revenir à nous-mêmes reste alors un appel urgent et un besoin fondamental !
Nietzsche remarque :
« nous nous demeurons étrangers à nous-mêmes, nous ne nous comprenons pas ! Il faut que nous nous confondions avec d’autres... nous sommes éternellement condamnés à subir cette loi :
Chacun est le plus étranger à soi-même, - à l’égard de nous-mêmes, nous ne sommes point de ceux qui ‘cherchent la vérité’ ! »
C’est à noter : qu’il y a, dans la pratique, une connexion étroite entre :
- la connaissance de soi,
- et la qualité des rapports humains.
Le genre d’identification attribué à soi-même conditionne la façon d'identifier les autres, et la nature des liens que l'on établit.
Dans le sens existentiel propre à la psychosynthèse :
la vraie connaissance de soi et d’autrui engendre l’amour fruit d’un rapport qui s’ouvre en permanence à la nouveauté, de pair avec la bienveillance d’un accueil révélateur autant de
nous-mêmes que des autres !
6.1 Démarche de désidentification
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Face à maintes identifications partielles ou fausses, la véritable identification qui mène à la connaissance de soi, doit se faire par le truchement d'une sorte d’écartement.
En termes de méthodologie, la démarche de l’identification passe par le processus de désidentification.
En philosophie traditionnelle, il s'agirait d’abstraire des accidents pour être attentif à la substance.
La psychosynthèse parle pour sa part de désidentification comme voie obligatoirement orientée vers l’auto-identification.
Il n’y est pas question de faire de l’abstraction par rapport à ce qu’on est, mais d’un déconditionnement des contenus et situations qui limitent ou empêchent l’identification comme telle !
Il s'agit fondamentalement d'une distinction entre le centre de conscience et les différents aspects de la personnalité ou des contenus du champ de la conscience.
Assagioli touche le thème de la désidentification dès tout ses premiers écrits, au sens précisément de :
« la sagesse est capable de se désidentifier et de relativiser ce que l’on observe, autant en soi-même que chez les autres ! »
Assagioli parle aussi de :
« non-identification ! »
qu’il explique être :
« un sentiment de détachement qui n’est pas - ni répression ni condamnation, ni passivité, ni renoncement, ni insensibilité. »
Ainsi, il ne s’agit pas d’un débarras, mais plutôt d’une distinction et d’un déconditionnement, sorte de recul par rapport à nous-mêmes.
La pensée orientale finit alors pour valoriser autant le non-Soi que le Soi !
Le non-Soi représente effectivement la non choisification du Soi. Il constitue le passage de la conscience de ce qu’on est !
Kazimier Dabrowski parle de :
« désintégration positive », où il y a une transformation plus ou moins radicale de la personnalité, mais jamais sans affecter son noyau spirituel qui est à l’œuvre aussi dans le processus de réintégration.
La méthode psychosynthétique de désidentification reste un moyen paradoxalement utilisé en fonction de l’identification.
Il y a dans cette méthode des antécédents très anciens.
Elle révèle une matrice orientale, puisque enracinée dans le Vedanta indien, comme le remarquent Teresa D’Amico et Bruno Caldironi.
Il y a des éléments qui s’avèrent très voisins de la technique du yoga royal (raja yoga) lequel inclut les principes du hâta yoga, du bhakti yoga et du jnana yoga, respectivement destinés à l'intégration physique, émotive, et mentale.
En plus de son enseignement et utilisation dans le contexte philosophique et religieux de l'Orient (védantisme, bouddhisme)... le processus de désidentification est aussi considéré dans la pensée et dans la pratique occidentale, surtout chez certains philosophes et mystiques chrétiens, tels que Maître Eckhart, Hermann Keyserling, Julius Evola.
Alors qu’en ' Orient ' on tend à privilégier la distinction entre le ' Je ' et le ' non-Je ', l'Occident a insisté plutôt sur le ' détachement ' !
Assagioli fait voir qu'un tel détachement ou une vraie désidentification ne provient pas d'une sorte d'ascèse dualiste, mais de l'acquisition d'une nouvelle perspective à partir d'une dimension spirituelle, permettant de distinguer les autres dimensions, cela en vue de leur inclusion, dans une véritable synthèse existentielle !
Comment est-il possible au centre de conscience de se détacher et d'être en même temps impliqué ?
Est-il faisable d'arrêter le processus de distanciation de l'observateur dans l'observation de soi-même ?
N'y a-t-il pas une régression à l'infini ?
Le sujet transcendantal d’Husserl semble, selon Jacques Croteau, est incapable de résoudre ce problème dans la mesure où le sujet transcendant reste l'objet d'un sujet qui l'observe !
Pour sortir de l'impasse, il faut admettre la possibilité pour l'esprit humain d'en arriver à une connaissance de soi non objective !
Il s'agit d'atteindre en l'occurrence le sujet comme sujet et non comme objet !
Toute la question est néanmoins de savoir comment pareille entreprise doit être menée ?
Chose certaine en tout cas, l'atteinte du sujet comme sujet n'opère pas d'elle-même une véritable sortie du schéma sujet-objet.
La psychosynthèse prône, au niveau du Soi, cette connaissance de soi non objective par le biais d'une synthèse existentielle qui ne fait plus place à la distinction sujet-objet.
Par contre, le béhaviorisme, par exemple, semble opter pour une psychologie sans sujet, mais en réduisant l'être humain à un objet observable, tout en comparant la psyché au fonctionnement d'une machine !
Pire que de comparer, c’est de nous réduire à la comparaison !
Assagioli offre la réflexion suivante par rapport à la vie psychique :
« Elle a en effet un aspect que je définirai presque mécanique, d’où mon intérêt pour la cybernétique. »
Mais, il y ajoute :
« C’est important de bien distinguer qu’est ce que nous sommes – conscience de soi, valeurs... – de ce qui est plutôt le mécanisme psycho-cérébral. On peut accorder beaucoup à la cybernétique, sauf l’essentiel. »
La technique de la désidentification, telle que celle du Raja Yoga, mène à la conscience des fausses identifications ou identifications partielles qui cachent ou réduisent la perception de notre vraie identité.
Selon Assagioli :
« nous devons apprendre à non pas nous identifier avec les contenus de notre conscience passagère. Une partie de nous-mêmes doit toujours rester libre, comme sentinelle, observateur et juge : c’est le ' Spectateur ’.»
Il y est question d’une remise en place et non pas d’une abstraction, d’une séparation, ou d’une mise de côté.
Loin de signifier une exclusion, il s’agit d’une prise de position par rapport à soi-même destinée à faciliter une intégration supérieure correspondant à une identification plus réelle où nous sommes non seulement le spectateur, mais en même temps l’acteur et le spectateur !
Il y a alors une distinction entre les contenus du champ de la conscience et le centre de conscience, permettant par là à celui-ci, d'être à la fois :
- l'observateur,
- l'explorateur
- et le catalyseur.
Plus on progresse dans la prise de conscience au niveau du Soi transpersonnel, moins les distorsions et les fausses identifications deviennent possibles !
Assagioli remarque :
« Pour nous perfectionner et perfectionner les autres, il faut d’abord nous posséder, mais pour nous posséder, il faut d’abord nous connaître. Et pour nous connaître, nous avons besoin de nous observer et d’observer ! »
La désidentification provient ainsi de l’auto-observation, fruit d’une attitude de détachement de chaque individu par rapport à soi-même, celle de l’observateur objectif, ou du spectateur intérieur !
Plus concrètement, il s’agit de détachement et distanciation par rapport à des rôles, des attitudes, et des aspects personnels qui limitent, empêchent ou s’opposent à notre vraie et totale identification.
Cela peut aller jusqu’à l’abstraction, ce qui n’est pas le synonyme ni d’exclusion ni d’indifférence et moins encore de rejet, mais d’une prise de conscience de soi-même capable d’observer et de se distinguer dans ses propres contenus biopsychiques.
Il y est question, en bref, de la distinction entre le centre de la conscience et les contenus conscients, indépendamment des défauts ou des qualités que nous puissions leurs attribuer.
Le fait d'avoir l'un ou l'autre caractère sexuel, d'être arrivé à tel ou tel âge, de jouer un certain rôle, d’avoir la peau d’une autre couleur, d’appartenir à une nationalité donnée, de posséder un tempérament spécifique... tout cela aura peu ou rien à voir avec le fondamental de notre identification, y incluant les noms et prénoms utilisés !
Tant que nous sommes identifiés au niveau du moi personnel, nous sommes portés à prendre comme sources premières et centres d'identification :
le corps physique,
les émotions
et le mental.
Cela devient une source d'erreurs et de troubles dû à des identifications partielles et plus ou moins trompeuses.
C'est pourquoi la psychosynthèse insiste sur la désidentification concernant les composantes de la personnalité en vue de leur identification et de leur intégration au niveau d'une prise de conscience globale et supérieure.
Elle nous apprend ainsi à faire la distinction entre :
ce qu'on a,
et ce qu'on est,
ou encore entre la partie et le tout.
La démarche de désidentification et d’auto-identification passe par un processus de déprogrammation / re-programmation au niveau de la personnalité, et donc par l’harmonisation et l’intégration de ses trois domaines :
physique,
émotif,
mental.
Loin de l’indifférence ou d’une séparation de notre propre expérience, la désidentification conduit à une attitude d'observateur détaché par rapport aux éléments de notre personnalité : corps physique, émotif et mental, tout en leur accordant en même temps la plus grande attention.
Assagioli suggère la formule du dialogue amical :
« Une bonne méthode pour réaffirmer et réaliser la désidentification consiste à penser aux différentes parties de notre personnalité, par exemple en disant au corps : ‘Frère âne (comme saint François l'appelait), '' aie courage, trotte encore un peu, et puis je te ferai entrer dans l'étable et te donnerai des carottes ’'; Et à notre personnalité émotive on peut lui dire: ‘Essaie de considérer les choses de manière plus vaste’.»
Les fausses identifications se trouvent subtilement déguisées au niveau de la personnalité, tout en nous limitant et rendant prisonniers de nos sensations physiques, de nos sentiments et de nos systèmes idéologiques.
L’objectif de la désidentification est de les découvrir et de promouvoir leur intégration au niveau du Soi transpersonnel, ce qui permet en même temps l’expansion et l’approfondissement de notre propre identité.
Nous avons besoin de nous dés-identifier des éléments en nous : sensations, émotions, idées qui se trouvent en dystonie avec le processus de notre identification, non pas pour les exclure, mais pour mieux les intégrer.
La désidentification est une sorte d’affinage qui les mets dans la syntonie avec ce qu'est notre être le plus profond, tout donnant lieu ainsi à l’auto-identification.
Celle-ci provient d’un processus associatif, tandis que les pseudo-identifications constituent une dissociation où il y a une tendance à la restriction !
L’identification au niveau de la personnalité traduit une conscience restreinte de la réalité.
La désidentification représente un recul pour donner un saut en avant. Elle déplace la particularité de la coquille de son isolement en vue de la replacer dans le contexte et la perspective du tout !
La connaissance de soi doit passer alors par l’exercice de désidentification concernant les fausses identifications ou identifications partielles qui cachent notre vraie identité !
- les instincts supérieurs, l'inconscient supérieur,
- l'inconscient personnel,
- la conscience comme réalité autonome,
- le moi en tant que projection du soi au niveau de la personnalité, le rapport interpersonnel,
- et la dimension universelle.
incluant les éléments en provenance du niveau superconscient.
Effectivement, c’est du Soi que provient la connaissance de soi au niveau de l’auto-identification.
« une certaine ' distance psychique ' permet une vision et une analyse impartiales ! »
Assagioli présente alors la désidentification comme :
« J'ai un corps, mais je ne suis pas mon corps ! »
« j'ai une vie affective,
mais je ne suis pas
mes émotions ni mes sentiments ! »
« j'ai un intellect, mais je ne suis pas mon intellect !
- J'ai des désirs, mais je ne suis pas mes désirs !
- j'ai des idées, mais je ne suis pas mes idées !
- j'ai des croyances, mais je ne suis pas mes croyances !
- j'ai des illusions, mais je ne suis pas mes illusions !
par une telle inclusion :
- Le premier tend à ignorer les aspects ombreux et pénibles de la nature humaine,
- le deuxième crée un climat intérieur d’opposition et d’incompatibilité.
« on ne peut pas comprendre l'âme humaine et évaluer ses actions sans connaître le corps humain dans sa structure anatomique. Le corps et l'âme ne sont pas deux mondes en opposition, mais deux aspects constitutifs de l'unité de l'être humain ! »
« Je ne 'suis' pas mon corps et mon visage... mais mon corps et mon visage sont des symboles de moi-même... d'un moi qui, en dehors de son corps et de son visage, n'existe pas et n'est donc rien. Je ne peux pas m'identifier à mon symbole, mais je ne peux pas davantage m'en séparer ! »
Ce que l’on vient de considérer s’applique aussi à la désidentification par rapport aux aspects émotif et mental. Il ne s'agit pas de nier, de réprimer, de supprimer ou d'oublier quoi que ce soit en nous !
Assagioli donne à propos l'exemple suivant :
« Une personne a une pierre dans son soulier...cette pierre lui fait mal...mais sur le moment, elle ne peut pas l'enlever. Cette personne ne pense pas : ‘Je n'ai pas la pierre, la pierre est une illusion’... mais elle affirme : ‘La pierre m'ennuie beaucoup, mais moi je ne suis pas la pierre, ni le soulier, ni le pied’. De la même manière on peut ‘vivre’ une émotion, et en être intensément conscient, mais affirmer : ‘Ce n'est pas moi’ ! »
Selon lui, l’aveu " je suis fatigué ", est une ‘ hérésie psychologique ’;
dire... ’ je suis irrité ’, c'est commettre une ‘erreur de
grammaire psychologique’ !
La juste expression est plutôt :
‘ Il y a en moi un état d'irritation ! ’
Dans la grammaire psychologique :
il devient fondamental, d’abord et avant tout, de faire la distinction entre le sujet et ses prédicats.
On fait couramment l’abstraction du premier et l’on s’attache aux deuxièmes, tout en se servant :
- du nom propre,
- du genre (sexe),
- du rôle en société,
pour s’identifier soi-même et identifier les autres...en plus de l’identification avec maintes des caractéristiques physiques autres, notamment par rapport à ce que l’on désigne les handicapés.
On identifie ainsi ' un tel ' ou ' une telle ' comme :
- le maître,
- l’élève,
- l’aveugle,
- le boiteux,
- et ainsi de suite...
On utilise alors le verbe :
être pour exprimer autant ce qu’on est que les simples états physiques et psychiques, en plus de nos rôles en société.
Il n’est pas la même chose de dire :
‘ Je suis malade ’
‘ je suis le professeur ’,
que de dire :
‘ je me sens malade ’
ou
‘ je m’occupe de l’enseignement ’.
Lorsque dans une langue seul le verbe :
être existe pour désigner autant les états passagers ou conditionnements biopsychiques afin d'exprimer notre identité ! C'est bien plus qu’une erreur de grammaire, c'est une pauvreté de sa structure qui favorise une mauvaise identification.
Mais la grande découverte dont parle Assagioli est bien plus que le fruit d’une correction grammaticale ou d’une notion philosophique.
Il s’agit d’un fait existentiel de la rencontre avec nous-mêmes au niveau du Soi transpersonnel
où le ‘ Je suis ’ se manifeste en même temps dans toute sa simplicité, quoique certainement accompagnée de l’évidence de sa propre :
authenticité,
bonté,
beauté.
Cette simplicité de l’identification est placée bibliquement dans la bouche de Dieu en s’identifiant comme :
« Je suis qui je suis ! »
Lorsque la Bible présente l’être humain comme étant crée à l’image divine, il y a logiquement l’indicatif de l’identification humaine à prendre fondamentalement dans les mêmes termes du : « Je suis qui je suis ».
Une telle affirmation est consciente de l’essentiel et d'une relativisation des prédicats, plénitude et nudité existentielle, ce qui prend place à la hauteur du Soi transpersonnel !
L’auto-identification est ainsi un éveil plutôt qu’un acquis.
Il y a l’expérience mystique de la révélation de l’être à soi-même, dans sa pureté de sa transparence et dans la permanence de son identité !
Plus, notre identification est ressentie au niveau du Soi, plus proches nous nous trouvons de tout et de tous.
Dans le processus de la connaissance de soi, la psychosynthèse ne doit jamais s’éloigner de cette source de l’identification à la fois individuelle et commune !
La désignation d’un être bio-psycho-spirituel, tout en étant commune à tous les êtres humains, constitue une spécificité qui va de paire avec les distinctions propres à la psychologie différentielle.
L’identification comporte de ' ce qui est commun' et de 'ce qui est unique ',
tout en rendant ainsi à la fois communs et distinctes les domaines :
individuel,
social
et universelle de la psychosynthèse.
Le processus de la connaissance de soi se concrétise et se poursuit alors par la découverte effective de cette complémentarité devenue co-identification et vécue comme expérience de communion dans la solidarité avec tout ce qui existe.
Les dimensions sociale et universelle, ne doivent pas devenir des obstacles à l’identification individuelle, elles viennent la compléter et la renforcer.
« Je suis le tout ! »
c’est une formule d’auto-identification commune dans la tradition védique.
Dans cette co-identification, le particulier et le tout deviennent deux côtés de la même expérience, sans élimination ou disqualification ni de la partie ni de la totalité !
C’est caractéristique du Soi transpersonnel d’identifier les individu tout en transcendant leurs frontières.
Puisque les formules de désidentification présentées plus haut peuvent faire penser à une sorte d'exclusion, on pourra plutôt utiliser celles-ci qui proviennent également d'Assagioli :
« J'ai un corps,
mais je suis plus que ma forme physique ! »
« j'ai des émotions,
mais je suis plus que ma nature affective ! »
« j'ai un intellect, mais je suis plus que mon mental !
John W. Cullen et Douglas Russell formulent :
« J’ai un corps,
mais je suis plus que mon corps ! »
Gabriel Marcel rejoint cette formule de désidentification par rapport au corps dans les termes suivants :
« Je suis mon corps,
mais mon corps n'est pas moi-même,
car je déborde mon corps,
je suis plus que lui ! »
Ce n’est pas une existence dans un corps, mais en tant que corps.
Il y est question de transcendance et non pas d’exclusion.
Cela porte à corriger une identification partielle en fonction de la reconsidérer une fois intégrée dans le tout.
De toute façon : il ne s’agit pas du corps que j’ai, mais du corps que je suis !
Celui-ci est au centre et jamais en marge de l’identification.
Celle-ci permet d’agir avec le corps et non pas seulement sur le corps !
Tout en admettant l’équivoque des premières formules Assagiolienne de désidentification qui se prêtent à des interprétations et applications à caractère soit dualiste soit moniste
John Firman offre les formulations suivantes :
« Je suis distinct, mais non séparable, de mes sensations. Je suis distinct, mais non-séparable, de mes sentiments. Je suis distinct, mais non-séparable, de mes pensées ! »
Nous nous trouvons, alors, face à une compréhension non-séparative quoique différente par rapport à la personnalité.
Le processus de désidentification finit par une ré-appropriation existentielle, au niveau de l’auto-identification, où la totalité ne se dispense pas des parties.
Alberti offre les formules suivantes :
« Je suis mon corps, mais je ne suis pas seulement mon corps : Je suis aussi mes émotions. Je suis mes émotions, mais je ne suis pas seulement mes émotions : Je suis aussi mes pensées. Je suis mes pensées, mais je ne suis pas seulement mes pensées : Je suis aussi une volonté ! »
En effet, et tout en soulignant le déjà-dit, l’objectif de la désidentification n’est pas d’exclure mais d’éviter l’emprisonnement de l’exclusivisme d’un élément par rapport à l’autre !
En conclusion :
La formule « Je suis mon corps et je suis plus que mon corps ! »
s’avère la plus adéquate.
Le corps ne reste jamais secondaire ou marginalisé en termes d’auto-identification !
Il y a une désidentification en fonction d’une identification plus globale, où il devient fondamental la co-identification avec le corps de l’univers qui nous soutient.
L'Univers : lequel physiquement est présent, chez nous et en nous, dans ses éléments :
terre,
eau,
air,
feu.
En dehors de cette perspective, il y aurait un dualisme fort aliénant !
L’écart des fausses identifications constitue une émancipation qui conduit à la maîtrise de soi, à l’affirmation de l'autonomie au dire de Maslow :
je deviens davantage moi-même quand je m'émancipe de ce qui n'est pas moi !
Il n’y est pas question de nous débarrasser du corps des émotions et des idées, mais de les maîtriser et les intégrer.
6.2 Pivots d’identification
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Assagioli note :
qu'il y a en nous une myriade de petits ' je ' qui se prennent chacun pour le ' Je ' véritable; ce qui a pour conséquence que le ' Je ' finit par être étouffé et pour rester inconnu !
Chacun de ces ' je ' tendent à se prendre pour le centre de la personnalité, voire à se faire passer pour le vrai centre de conscience, constitue effectivement une : personnalité secondaire ou, comme on définit le plus souvent en psychosynthèse, une : sous-personnalité !
Les sous-personnalités, aussi désignées : personnalités alternatives sont innombrables, et c'est pourquoi l'individu peut être considéré comme : " une légion ", selon l'expression du Père Sertillanges.
Assagioli classe en huit catégories principales ces 'je' par lesquels bien souvent nous avons tendance à nous identifier, à savoir :
Ce que nous sommes à un moment donné (image plus ou moins figée);
ce que nous croyons être (auto-évaluation);
ce que nous voulons être (aspirations);
ce que les autres croient que nous sommes (images des autres à notre égard);
ce que les autres veulent que nous soyons (modèles projetés sur nous-mêmes);
ce que les autres éveillent en nous (modèles inspirateurs);
ce que nous faisons semblant d'être (nos masques);
ce que nous pouvons devenir (modèle idéal).
Ces divers ' je ', qui prédominent le plus souvent comme centres d'identification, se trouvent la plupart du temps en conflit !
Chacune de ces catégories correspond à une sous-personnalité, mais toutes ne sont pas également distantes de leur intégration qui favorise le processus d’auto-identification.
Ces multiples sous-personnalités donnent lieu à autant d'identifications partielles.
Elles font l'objet d'une attention particulière au niveau de la psychosynthèse appliquée, lorsqu'il s'agit de l'intégration de la personnalité, travail qui est à la base de l'éducation psychosynthétique.
Tant que les sous-personnalités subsistent à l'état conflictuel, la conscience demeure fragmentée et la véritable identification ne peut pas avoir lieu, d’où la recommandation humoriste d’Assagioli : « de ne pas utiliser vainement le nom du : Je ! »
L'auto-identification, synonyme de notre vraie identité, ne va pas de soi.
Elle exige une attention toute particulière aux identifications : partielles, multiples et variées auxquelles on s'adonne ou que l'on subit la plupart du temps inconsciemment !
C'est en les identifiant que nous pouvons nous en détacher !
Puisque l'auto-identification va de pair avec la désidentification concernant les sous-personnalités, c'est à celles-ci qu'il faut prêter une attention spéciale !
Les rôles exercés dans la vie :
familiale, (personnel...)
professionnelle
se comptent parmi les identifications partielles ou sous-personnalités, qui prévalent souvent comme désignatifs de l’identification en société !
Assagioli met en garde contre cette modalité d'identification qui sert souvent à dissimuler la personne humaine derrière ses personnages.
Plus, quelqu'un s'identifie à son rôle, moins il est apte à le jouer !
En fait, remarque-t-il : « aussi paradoxal que cela puisse paraître, moins nous nous identifions à un rôle, mieux nous le jouerons ! »
Nous avons des rôles à jouer et c’est bon de qu’il soit ainsi, à condition pourtant que notre identification reste intègre !
De même que l’on peut jouer le personnage d’un sexe différent sans oublier le nôtre, ainsi il est possible et souhaitable de garantir l’expérience permanente de notre vraie identification, dans la conscience de ce qu’on est et en dépit de que l’on fait !
Le processus d’auto-identification reste à jamais plus ou moins partiel, et il n’exclut pas la possibilité de tomber dans une fausse identification qui pourra être corrigée.
Puisque, l’être humain reste toujours en partie un mystère pour soi-même, la meilleure identification n’est jamais synonyme de chercher toute la vérité à notre égard !
Celle-ci progresse avec la conscience de soi-même en termes d’expérience et non pas de simple représentation d’une image de ce qu’on est, ou de celles que les autres peuvent avoir à l’égard de nous-mêmes !
Le « Je suis » est plus fondamental que l’adjectif « humain » ou n’importe quel autre qualificatif utilisé pour nous désigner.
Les qualités sont plutôt quelque chose qu’on possède.
Entre ' l’être ' et ' l’avoir ' il n’a pas de l’incompatibilité,
mais, dans le processus de l’identification, ils sont toujours à distinguer.
Il y a le dépouillement de quelque chose, au lieu d’un vide, qui nous donne paradoxalement le sens de la plénitude !
Mais en psychosynthèse la question : ‘ qui suis-je ? ’
se poursuit en fonction d’une réponse qui dépasse la conscience actuelle de nous-mêmes !
Il y a toujours un niveau supérieur d’identification auquel nous pouvons avoir accès.
La connaissance de soi fait continuellement appel à l’actualisation de soi !
En plus de nos identifications partielles par rapport à ce qui nous sommes, il y a les identifications faussées, lorsqu’on confond notre identité avec ce que nous avons** !
** possédons
La plus commune de ces identifications est celle de nous identifier par notre propre nom ou prénom.
C’est à noter que dans certaines cultures les gens prennent un nom différent lorsqu’il y a un changement soit dans leur âge soit dans leur rôle.
Allié à ce changement de nom, il y a toute une gamme de titres et de formes de traitements qui changent selon le rôle, le statut civil, professionnel, militaire, religieux...
Le mot rôle, rotulus ou rotula en latin, s’allie à la signification originaire de l’utilisation des rouleaux de papier utilisés par les souffleurs chargés de l’appui aux artistes en scène théâtrale.
Il n’y a rien de négatif, sauf la confusion entre l’artiste et son métier.
L'être humain se distingue des animaux tout particulièrement par son pouvoir de réflexion, c'est-à-dire par le fait d'être conscient de lui-même.
Pourtant, bon nombre d'humains restent la plupart du temps au seuil de la conscience de leur humanité, se limitant et se contentant de s'identifier par leur prénom et un nom dont ni même le choix ordinairement leur appartienne.
Souvent, ceux-ci se trouvent accrus de titres qui font enfler le ballon du personnage adopté !
Ceux qui se croient bien conscients d'eux-mêmes peuvent bien rester au niveau du soi personnel sans guère soupçonner de l'existence du Soi transpersonnel : lui seul est capable de révéler la véritable expérience de la réalité ontologique de l'être humain.
Selon Assagioli :
« l'auto-conscience personnelle n'est qu'un faible reflet de la vraie auto-conscience du Soi, la conscience de l'Identité spirituelle de laquelle généralement nous ne nous rendons pas compte ! »
Assagioli fait noter le fait des différents états de conscience :
« À certains moments, nous ressentons notre identité personnelle de façon vive et claire, par-delà tous les changements intérieurs et extérieurs; par contre, à d'autres moments, nous nous sentons : transformés, différents, étrangers à notre 'soi' d'hier. C'est comme si nous ne nous reconnaissions plus ! »
Tant que nous sommes identifiés aux contenus de notre personnalité, nous sommes inconsciemment à la fois auteurs et victimes d'une grave erreur quant à l'identification de nous-mêmes !
Il y a des identifications partielles et accidentelles qui, au niveau de la personnalité, prévalent souvent sur l'identification essentielle et permanente.
A titre d'exemples les plus communs mentionnés :
soulignons le caractère sexuel (je suis un mâle), l'état civil (je suis célibataire), la nationalité (je suis Chinoise), la race (je suis noire), l'avoir (je suis propriétaire), l'instruction (je suis diplômé), l'idéologie politique (je suis socialiste), l'appartenance religieuse (je suis orthodoxe), les déficiences physiques (je suis aveugle), le tempérament (je suis nerveux), les états d'esprit (je suis fâché), l'âge (je suis vieux)...
Parfois l’identification va jusqu’à privilégier les apparences, surtout en ce qui concerne le vêtement.
Dans ses notes personnelles, Assagioli offre le commentaire suivant concernant cette dernière forme d'identification :
Il y a effectivement des gens qui s'identifient presque à leurs habits. Ils donnent une telle importance à leur apparence extérieure qu'ils changent presque de personnalité selon la façon dont ils s'habillent !
Au contraire du moi personnel qui tend à se faire confondre avec les contenus successifs et transitoires du champ de la conscience, le Soi transpersonnel en reste détaché !
Il ne s’identifie non plus ni à nos fonctions psychologiques ni aux rôles que nous jouons !
Dorothy Firman exprime :
« c’est seulement en étant immanent que nous pouvons transcender ! Nous ne pouvons pas nous désidentifier de ce que nous n’avons jamais été identifiés. »
Gherardo Giorni exprime :
« la reconnaissance de notre esprit multiple est la charte constitutionnelle qui introduit la démocratie à l’intérieur de nous-mêmes, ou comme de nos jours on a le goût de dire, le pluralisme ! »
L’identification la plus commune correspond à la perception que chaque personne a de soi-même dans une situation et moment donné, de telle façon que parfois il semble avoir un doublement ou succession de personnalités qui engendre un état de confusion concernant ce qu’on est.
Le processus d’auto-identification inclue à la fois la désidentification par rapport à des identifications fausses ou partielles, de même que la prise de conscience d’éléments méconnus ou oubliés faisant partie de sa propre identité !
Admettre, l'existence en nous de fausses identifications au niveau de la personnalité, c'est déjà permettre que le Soi supérieur devienne ce lieu d'observation, ce centre unificateur, ce pivot d'identification que la psychosynthèse reconnaît d'emblée.
Selon Assagioli :
dans l'exercice de désidentification, nous développons la conscience de nous-mêmes en tant qu'observateurs, et en tant que spectateurs, alors que pour les autres exercices, nous développons la conscience de nous-mêmes en tant qu'acteurs !
Cet observateur/spectateur intérieur : c'est la conscience-témoin, notre centre de conscience qui, sans exclusion, peut considérer objectivement les différents contenus auxquels il n'est jamais identifié !
Au cours d’un tel processus, il y a encore, au niveau de la personnalité, le danger de penser au Soi comme de quelque chose que nous avons, mais pas de qui nous sommes**, tout en donnant lieu à une sorte schizophrénie existentielle !
** vraiment
L'expérience d'identité au niveau du Soi constitue la plupart du temps une inspiration qui vient à la rencontre d'une aspiration.
Elle provient de la capacité de prendre la position du centre de conscience. Plus nous nous identifions au pur centre de conscience, mieux nous pouvons intégrer et faire l'expérience de l'émancipation des composantes vraiment estimables de notre personnalité !
Assagioli remarque :
« Le corps, les émotions et l'intellect constituent des instruments changeants d'expérience, de perception et d'action.
Par contre, le Soi est essentiellement différent : il est simple, immuable et conscient de lui-même ! »
À ce niveau, on a directement une prise de conscience de soi-même caractérisée par la spontanéité, la simplicité, la pureté et la transparence.
La désidentification signifie :
rendre possible une identification supérieure !
Selon Assagioli :
« L'étape naturelle qui suit la ' désidentification ' est une nouvelle identification du moi :
je reconnais et j'affirme que je suis un centre de volonté, capable de régler, de diriger et d'utiliser tous mes processus psychologiques, ainsi que mon organisme physique ! »
Il y a d'abord :
la découverte de soi comme sujet conscient et distinct de tous les contenus ou déterminations, de ce qui constitue la révélation de la véritable auto-identification du : ' je suis ! '
Toutefois, cette prise de conscience n'est que le début de l'auto- identification et donc de la vraie connaissance de soi, laquelle n'est jamais définitivement acquise.
Il y a plutôt un processus évolutif qui laisse place à des révélations progressives, de paire avec les identifications des déviances toujours à corriger !
L’expérience de l’auto-identification provient pratiquement d’un élargissement de la conscience où il y a la découverte, la distinction et l’inclusion.
Dans ce processus, tel que présenté par Ken Wilber :
« le corps est conscient de la matière, le mental est conscient du corps, l’âme est consciente du mental, l’esprit est conscient de l’âme. »
Celle-ci peut alors s'approprier indûment des énergies supérieures, faire preuve de sentiments de supériorité, avoir des comportements mégalomaniaques.
Il s'agit d'un avertissement au égard et à la possibilité de mauvaises interprétations et à des appropriations indues de ces expériences !
Cet appel à la prudence et au discernement doit donc être interprété comme un souci de sauvegarder l'intégrité de l'auto-identification demeure toujours l'objectif privilégié d'une vraie connaissance de soi !
L’auto-identification reste un processus permanent de révélation et connaissance de soi.
Il y a un appel au sens existentiel du terme qui se trouve au-delà des concepts, dans une expérience d'auto conscience qui dépasse un concept ontologique purement abstrait.
Le vrai sens du : ' qui je suis ? '
signifie simultanément de sentir et d'éprouver mon identité et en faire la ' connaissance ',
c'est-à-dire :
la faire naître !
L’auto-identification qui prend place au niveau du Soi est un fait existentiel profondément libérateur.
Tant que la connaissance se limite à un concept abstrait ou à la vérification d'un contenu quelconque, il y a peut-être du savoir, mais loin encore du savoir-être essentiel à la connaissance de soi !
6.3 Défi et moyens
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
En psychosynthèse, la vraie connaissance de soi, c'est-à-dire l'auto- identification signifiée par l'identification humaine au niveau du Soi spirituel, constitue un grand défi toujours à relever, faisant appel à l’auto-éducation permanente !
Plus important que d’ajouter de l’information sur ce qui l’on est, c’est d’arriver à un regard nouveau sur nous-mêmes dépourvu autant que possible, des obstacles et des conditionnements que l’on vient de mentionner.
Le processus de l’auto-identification conjugue la certitude avec l’ambiguïté de la condition humaine, alliée au processus du changement auquel le Soi reste ouvert en tant que réalité dynamique.
La réponse au ‘ qui suis-je ? ’ est donc évolutive et jamais définitive !
Il y a une demande d’ajustement par rapport à nous-mêmes qui peut donner lieu à des crises d’identité au niveau de la personnalité, plus ou moins accompagnées du malaise de la confusion et de l’insécurité !
Il y est possible d’y coutoyer autant le désir que la peur de se connaître.
La reconnaissance de nos handicapes peut donner lieu autant au découragement qu’à la volonté résolue de les surmonter.
C’est surtout quand la personnalité est en crise que la question « qui sui-je ? » se présente en guise d’un appel !
Des faits notoires de désidentification et dépassement par rapport aux propres déficiences physiques, on les trouvent, à titres d’exemples majeurs :
chez le grand orateur Démosthène qui fût un bègue, chez Beethoven qui composa ses plus belles symphonies alors qu’il était devenu sourd, chez Helen Keller devenue sourde, muette et aveugle à l’âge de 19 mois, réussit à parler, à écrire, à prendre sa graduation universitaire, suivie d’une carrière célèbre comme éducatrice et écrivaine.
L’aspect mystérieux de notre identité est en même temps fascinant et intrigant !
Il éveille spontanément la curiosité, mais il peut aussi conduire à un état d'insécurité.
Certains courants psychologiques révèlent un manque d’attention ou mise de côté concernant le thème de l’auto-identification !
Assagioli semble bien partager cet avis, en ce qui a trait à l'approche béhavioriste à caractère mécaniciste, qu'il considère plus proche du refus que de la volonté d'auto-identification :
« Je pense que la plupart des discussions sur l'identité ont été faussées du fait que les psychologues ne se sont jamais donné la peine de faire des expériences. Ils font courir les rats dans des labyrinthes, mais ils ne pénètrent pas dans le laboratoire intérieur pour y examiner leur propre expérience de la volonté.
Ils sont comme les théologiens qui refusaient de regarder dans le télescope de Galilée par crainte d'ébranler leur conception du monde. Ils négligent l'introspection, qui représente pourtant le meilleur laboratoire qu'un psychologue puisse trouver. »
Comment progresser dans ce processus ?
La psychosynthèse propose fondamentalement deux positionnements :
la réceptivité et l'activité.
La première est aussi importante que la seconde; la réceptivité représente une ouverture qui facilite ce que le concepteur de l’approche psychosynthétique, à la suite de Hermann Keyserling, nomme :
la manifestation du Soi donne accès au "nucléus métaphysique de l'être humain.
Si le Soi transpersonnel, le Centre supérieur, est lui-même la source et le révélateur de notre identification, il devient fondamental pour le soi personnel de l'écouter avant d'agir, afin de ne pas se tromper sur la voie à prendre !
La réponse à la question : ‘ qui suis-je ? ’ peut avoir lieu graduellement, ou au contraire, de manière soudaine par une prise de conscience constituant une sorte de révélation.
Assagioli exprime :
« Je suis une âme vivante, aimante et qui veut ! »
Je dirais mieux :
« Je suis une âme vivante, courageuse , aimante et
qui souhaitent quelques choses pour soi
et idéalement aussi pour les autres et le monde ! »
Eddy Vonck
D'ailleurs, Assagioli présente l’auto-identification dans les termes suivants :
« Je suis une auto-existence permanente, une réalité
vivante ! »
Il faut noter avec lui :
que la plupart du temps, l'auto-identification est une expérience intérieure de la conscience de soi-même :
comme ' sujet ' et comme ' moi ', indépendant de tout contenu ou fonction, qui n'advient pas spontanément, mais est plutôt le résultat d'une expérimentation ou d'un exercice intérieur !
C'est pourquoi la psychosynthèse :
propose de faire de la vie le grand laboratoire psychologique, et de l'introspection le lieu de la révélation permanente de l'être humain à lui-même !
Dans le processus qui conduit à l’auto-identification, Assagioli tient compte :
« d’un stade intermédiaire temporaire, où nous sentons ne pas être seulement notre personnalité et de n'en a pas avoir encore pleine conscience de l’Âme [le Soi].»
La psychosynthèse fait appel à la mystique du détachement, ce qui n’est pas, un synonyme de mépris, ni un signe de dévaluation concernant les éléments par rapport auxquels nous nous désidentifiions !
Une telle mystique, à caractère purificatoire, représente souvent des crises d’identité qui caractérisent le processus qui mène à l’auto-identification.
Cela peut apporter de la souffrance, qu’il faut distinguer de la pathologie associée aux identifications.
La santé fait appel à l’auto-identification, et vice versa !
La voie qui mène à la santé doit passer par la désidentification, mais, jamais par la dévalorisation touchant les éléments malades de la personnalité, d’abord destinés à l’accueil et deuxièmement à l’intégration !Promouvoir la connaissance de soi, c'est donner l'opportunité de pénétrer dans le mystère de l'être humain, et en même temps de le percer tout en croyant aux virtualités humaines qui surpassent tout ce qu'au niveau de la personnalité on peut à peine soupçonner.
Selon Assagioli :
« une fois reconnue en nous l'existence du Soi supérieur et de ses pouvoirs merveilleux, le 'connais-toi toi-même' de l'oracle de Delphes acquiert une nouvelle signification.
Il ne veut plus seulement dire :
" Analyse tes pensées, tes sentiments, et examine tes activités ";
il signifie :
"Découvre ton ' Je ' le plus intime, ton être véritable, et prends conscience de son admirable potentialité !" »
C’est à noter combien cette capacité est ambivalente, faisant appel en même temps :
à la responsabilité
et toujours à l’identification avec notre bonté essentielle !
La connaissance de soi engendre la foi en soi et la confiance en soi, lesquelles n’ont rien à voir avec l’autosuffisance qui mène au mythe d’Icare dont les ailles se fondent et le font tomber dans une sorte de néant.
Il va dans ce sens de René Habachi :
« Tant qu’il est plein de soi, l’être humain sera vide de tout ! »
Alberto Alberti parle alors de :
« présomption existentielle ! »
et de
« sous-personnalité présomptueuse ! »,
Elles sont alliées au sens de la grandeur et à de la mégalomanie ! »
À l’opposé de cette forme d’arrogance, il place une autre déviance, celle de :
« la sous-personnalité misérable ! »,
fruit d’un vide existentiel allié au sens d'une forme de nullité !
Autant la vacuité de l’arrogance que de la fausse humilité proviennent d’une mauvaise attitude et perspective dangereuse du moi personnel !
Le sens de sa propre supériorité devient une offense envers autrui ; celui de sa propre infériorité reste un attentat à sa propre dignité !
Toute démarche vers la connaissance de soi doit conjuguer l’intérêt avec le détachement, où, le moi personnel est prêt à se vider de ses acquis en vue de donner lieu à la révélation du Soi transpersonnel concernant soi-même et aussi les autres.
À ce niveau, la vérité et l'humilité vont de paire !
Il y a là en même temps la saveur de nos acquis et la conscience de leurs limites.
L’auto-estime se fait accompagner du détachement !
Il y a lieu pour la fierté qui ne laisse pas l’humilité tomber dans le masochisme, idem, pour le sens de l’authenticité qui empêche une forme de paranoïa ou et de déshonneur.
En termes de psychosynthèse :
la fausse humilité de la personnalité orgueilleuse se ferme à la lumière et au pouvoir du Soi.
Tandis que dans la vraie humilité de la personnalité s’accepte avec naturalité en s’identifiant et agissant, sur la lumière et le pouvoir du Soi transpersonnel.
Il y a une erreur courante de voir dans l’auto-estime a une expression d'orgueil, par contre : l’auto-humiliation et l’auto-dénigrement n’ont rien à voir avec l’humilité.
L’auteur anonyme de l’œuvre « le nuage de connaissance » clarifie :
« Une personne est humble quand elle s’affirme dans la vérité avec la connaissance et appréciation pour elle-même tel qu’en réalité elle est ! »
Assagioli considère cependant que :
« la vraie humilité n’exclue pas la reconnaissance de nos ‘ talents ’, et de nos merveilleuses potentialités latentes, de la haute destinée à laquelle nous sommes appelés ! »
Le sage ne cache jamais ses talents, mais il sait que l’unique bijou pour attirer, sans danger, l’attention sur lui c’est l’humilité !
L’humilité ne se contente pas de la sincérité; elle ajoute la simplicité !
L’humilité est l’unique mesure compatible avec la grandeur de notre identification.
Il n’y est pas question de comparaison, mais d’authenticité et de sens de la juste proportion.
Alberti fait voir combien l’humilité se trouve en rapport avec la liberté, la nôtre et celle des autres :
« Seulement qui est libre peut se sentir vraiment humble, et qui est vraiment humble laisse au monde sa liberté ! »
Dans la mesure où la vraie identification prend place et de la consistance, nous pouvons en même temps monter dans l’auto-estime, élargir les horizons de la connaissance, et simultanément approfondir le sentiment d’humilité !
La fausse humilité, provenant du sens d’infériorité, tend à l’isolement.
Je vais réagir un peu là :
« Peut-être qu'à l'époque où vivait Assagioli, le monde et la société humaine pourraient me sembler plus humble et plus valeureuse en matière d'humilité. Les années 2000 et crescendos depuis les dernières crisent mondiales, je me demande si ce n'est pas une utopie de nous inviter tout le temps où presque de rester humble alors qu'il y a des criminels / criminelles politisés dans des tours monopolistiques qui gouvernent , dangereusement l'avenir proche du monde : terre ? »
Par contre, la vraie humilité, fruit d’une conscience éclairée, mène à la solidarité !?
Elle prend plaisir dans la vertu des autres, tout en partageant aussi de la responsabilité pour leurs fautes !???
Il y a de la compassion fruit d’une identification qui est à la fois co-identification !
Faute d’une telle conviction, il y aura un obstacle sérieux qui compromet le processus de notre accomplissement.
Autant le complexe d’infériorité que le complexe de supériorité proviennent d’une attitude erronée où les faux-pas nous égarent de la prise de conscience de ce qui l’on est en réalité !
L’acceptation de nos propres limites devient la première condition pour la manifestation de nos capacités !
Le pire ennemi de l’humilité, c’est l’orgueil qui tend à
s’exprimer par l’égocentrisme, le sens ou un semblant d’autosuffisance, l’esprit arrogant et les attitudes de mépris envers autrui !
C’est dans ce sens que Assagioli nous porte une prise de conscience que :
« notre nature est imparfaite, est remplie de faiblesses, et d'obscurités, et de manque d'harmonie ! »
Le fondateur de la psychosynthèse fait voir que la connaissance de soi constitue le défi d’une prise de conscience venue d’une révélation intérieure nous permettant autant :
« la vision du merveilleux potentiel latent ou actif aux niveaux supraconscients» ainsi que la découverte du ' côté obscur ' font parties de la condition humaine en général ! »
Le défi et l’opportunité sont toujours là, chez nous et autours de nous pour apprendre et à apprendre d’abord au sujet de nous-mêmes !
Carl Gustav Jung exprime :
« considérer chaque situation, chaque personne, n’importe quel est notre état physique ou psychique, comme étant en même temps une leçon et un examen ! »
Tout en tenant compte du potentiel et de la complexité de la nature humaine, il suggère le recours à l’expertise de quelqu’un, autre que nous-mêmes, tout en considérant :
« Que la tâche devient plus facile avec l’aide d’un guide expérimenté ! »
Tout n’est pas spontané dans le processus de l’auto-identification, d’où le recours à des exercices appropriés :
- L'aspiration constitue un premier pas, suivi de la concentration est un autre de façon à éviter la dispersion et de favoriser le contact avec les énergies supérieures.
- Un autre exercice approprié est celui du dialogue interne , dans l'attente d'une réponse directe ou indirecte. On peut aussi écrire une lettre au Soi transpersonnelle en lui présentant une aspiration ou un problème quelconque.
- La méditation réceptive semble particulièrement apte à favoriser les manifestations du domaine transpersonnel !
- l'autobiographie,
- le carnet psychologique ou journal intensif ou intime...
- la rétrospective de la journée,
- l'analyse des rêves,
- les techniques projectives,
- le silence,
- l'observation objective,
- le travail sur les sous-personnalités, et la question: ‘ qui suis-je ? ’.
- Le recours à la typologie,
- de même qu’à l’analyse transactionnelle s’avèrent appropriés, y considérant les caractéristiques et tendances individuelles, ainsi que les formules prédominantes d’identification par rapport à soi-même et en rapport avec les autres !
- Les représentations rituelles et théâtrales, ainsi que les thérapies du psychodrame de Moreno ou de l’exercice du jeu des coussins en Gestalt, constituent des moyens aptes à l’utilisation de nos masques à fin de nous en débarrasser.
Le thérapeute doit être en mesure de maîtriser diverses techniques concourant :
- À stabiliser et calmer les patients;
- À les aider à travailler leurs souvenirs et leurs reviviscences douloureuses et traumatiques;
- À les faire renouer avec leur entourage relationnel...
Dans l'idéal, un thérapeute aura suivi avant d'accompagner des personnes traumatisées, le genre de thérapie qu'il ou elle pratiquera sur son futur patient !
Se sentir en sécurité est indispensable pour affronter ses peurs, ses démons, et ses angoisses.
Aussi et j’ajoute, lorsque vous cherchez un thérapeute ou assimilé, demandé des garanties et un devis ( types de prestations, efficacités, durées, prix, nombres de séances...) Évitez les égocentrés sur le net.
Sources : Bessel van der Kolk et moi-même
6.4 Mystère et révélation
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
La sagesse du savoir ou le savoir qui est sagesse, débute par la connaissance de soi.
Celle-ci représente le savoir fondamental en réponse au besoin non seulement de connaître, mais de se connaître.
Ce serait toutefois une erreur de prétendre avoir la connaissance parfaite de sa propre identité !
Le bouddhisme parle d’un phénomène d’amnésie par rapport à notre propre identité.
La vraie identité de l’être humain ne pourra jamais être adéquatement exprimée par une formule conceptuelle.
La connaissance de soi se rapporte à une prise de conscience de l’essence de la nature humaine, plutôt qu’aux contenus de cette conscience !
L'être humain est toujours une réalité en partie à découvrir ; il reste à jamais pour lui-même un mystère !
Marilyn Kegel dit que :
« dans nos vies, y a plus de mystérieux que du non-mystérieux ! »
Admettre le mystère, c’est avoir conscience des limites de la raison jamais capable de totalement épuiser le contenu et le sens de la réalité, y incluant celle de notre identité.
Pourtant il y a toujours l’opportunité de progressivement transformer le mystère de notre identité en découverte de plus en plus satisfaisante !
La connaissance de soi progresse avec la conscience de notre propre identité laquelle va de l’instabilité vers la stabilité, celle-ci idéalement atteinte au niveau du Soi transpersonnel.
Pour plus complètes que soient les archives de l’identification de l’humain,
elles ne contiennent jamais le chapitre final, ni le dernier mot de tous ce qui composent le parchemin de notre identification complète**.
** ? incomplète ?
Pratiquement, il y a toujours lieu pour la surprise et l’appel à un pas en avant au sujet de l’identité humaine !
Celle-ci ne se limite jamais aux réponses provenant de la question ‘ qui suis-je ? ‘.
Autant la/ les question(s) que les réponses contiennent des éléments d’une identité qui les englobent et qui peuvent déborder.
Bien du monde devient conscient et témoigne des défis qui pose l’auto-identification de l’humain !
Tout en prônant pour le questionnement sur notre propre identité, Ken Wilber voit :
« l’une des plus embêtantes parmi les questions humaines ! »
En considérant une définition impossible de l'être humain, Karl Rahner ajoute :
« Si nous voulions facilement le ‘définir’, il est l’indéfinissable de qui est conscient de soi-même ! »
Pour Jürgen Moltmann :
« l'homme est en effet pour l'homme le plus grand des mystère ! »
Teilhard de Chardin remarque que :
« l'homme est le plus mystérieux et le plus déroutant des objets rencontrés par la science ! »
Il y a de la contradiction dans la tentative de définir : l’être humain, puisqu’il est en même temps le ' mystère ' et le ' chercheur '.
Alors : il peut tout seulement se manifester et vivre son propre mystère !
Il est, en d’autres mots, et au dire de Alberti :
« non pas un mystère à dévoiler, mais une réalité subjective qui se révèle ! »
Assagioli tenait déjà compte de qu’il nomme une :
« énigmophilie présente en germe dans chaque personne ! »
À l’âge avancée, Assagioli, en 1963 est catégorique là-dessus, tout en offrant la réflexion suivante :
« Le mystère que l'aveuglement matérialiste et la présomption intellectualiste ont cru écarter, pénètre tout ce qui nous entoure : nous le retrouvons autant dans la tige de l'herbe que dans la comète errante, et surtout à l'intérieur de nous-mêmes ! »
Pour intervenir à propos de ci-dessous, j'ai une réflexion à faire liée à cette période 2020 à 2023 :
« nous avons vu et conscientiser pour certains comment le monde politico-scientifique intellectualiste peu modeste nous pousse de plus en plus dans un aveuglement collectif et mondialisé et comment par des formes d'aliénations endorment nos ' je ' collectif ! » Eddy Vonck
Toutefois, cet aspect mystérieux n’est pas en soi-même un facteur aliénant !
Il fait partie intégrante à la fois du défi et de l’expérience de notre identité !
Puisque le mystère constitue un élément de notre propre identification, Assagioli est alors porté à parler du :
« sens du mystère ! »
Il remarque :
« Ordinairement nous avons l’extraversion, la recherche de la vérité, de la beauté et du pouvoir dans le monde extérieur et dans la nature. Il convient cependant accentuer l’autre aspect, nous rappeler nous-mêmes et rappeler l’humanité au sens du transcendant, sentir et faire sentir le frisson du mystère, et le sens de l’infini. »
Parce que nous sommes : être et devenir, la conscience du mystère de notre identité va de paire avec la conscience de la profondeur de notre essence dont les limites dépassent toujours le niveau conscient actuellement atteint.
Le binôme révélation-mystère est là, non, pas pour nous faire baisser les bras, mais pour pousser davantage la connaissance !
La prise de conscience de ce que nous sommes demande de considérer ce que nous pourrions être !
L’acceptation de nos limites nous rend moins limités, à condition de ne pas les transformer en excuse pour ne pas essayer de progresser.
Elle constitue un postulat de la docta ignorantia :
la sage ignorance !
Dans le fait même de ne pas comprendre, celle-ci voit une porte d’entrée qu’il ne faut pas forcer, mais, qui peut bien finir pour s’ouvrir spontanément !
Il faut admettre que le mystère concernant bien des phénomènes peuvent être une méconnaissance des éléments et des lois naturelles parfois inconnus.
L’aspect mystérieux est là non pas pour nous freiner le pas, mais pour stimuler l’aventure.
Kahlil Gibran nous dit :
« Vague et nébuleuse sont le commencement de toute choses, mais non leurs fins ! »
Cette obscurité peut expliquer pourquoi même notre propre mystère éveille conjointement une attirance et une résistance face à l’inconnu !
Pour Assagioli : l'être humain est plus un sujet de recherche qu'un objet défini !
Avant d'être un héritage et un projet précis : l'être humain est un mystère qui offre plusieurs voies à l'analyse.
Avant de se prononcer sur l'homme, il faut donc tenir compte, avec Assagioli, de ce qu’il nomme :
« le mystère de l'homme ! »
Pour cela, il fait appel à de nombreuses et différentes vois de
recherches.
Personne
n’a jamais le dernier mot
sur ce qu’il -elle est !
L’ascension dans la connaissance de soi-même élargit, en même temps : l’horizon du mystère !
On est alors porté à conclure avec Piero Ferrucci :
« que ce qu’on a appris au cours de nos vies, n’importe quelle que soit la portée de sa signification, n’est qu’une petite bribe en comparaison avec le mystère infini qui nous entoure ! »
Il fait voir :
« que tous nous sommes destinés à nous confronter avec l’inconnu – surtout l’inconnu à l’intérieur de nous-mêmes ! »
C'est là son mystère central !
Par la réflexion suivante : Assagioli tient compte, au point d’y voir ce qu’il désigne le ' mystère central ' :
« Notre insatiabilité quant au savoir nous pousse à scruter les immenses mondes lointains et les êtres infimes qui pullulent dans une goutte d'eau; elle ne peut pas nous laisser indifférents, sans curiosité, face à l'inconnu qui demeure en nous, face à ce que nous ressentons et qui constitue le mystère central de l'être ! »
L’acceptation du mystère rend celui-ci de plus en plus attrayant et en même temps surprenant !
Il se prête autant à donner lieu à la révélation, tout en
reculant ses propres limites, qu’à élargir celles-ci en même temps !
Le mystère se traduit en révélation et reste simultanément présent au terme de n’importe quelle découverte !
Il relève parfois d’une omission regrettable de faire l’abstraction du mystère !
Celui-ci semble nous éloigner du savoir, comme les ténèbres nous éloignent de la lumière, mais à l’intérieur du mystère il y a toujours le soupçon d’une lumière qui nous attire !
Il est là non pas comme cachette, mais comme potentiel de révélation !
Plus qu’une barrière qui nous écarte de nous-mêmes, le mystère y devient un défi qui porte une attirance !
La transcendance ne s’oppose pas à la révélation.
Le fait d’accueillir l’énigme que nous sommes nous rend à la fois plus proche de notre identité, y incluant ainsi la conscience de notre potentiel !
Qui force ou prétend annuler ce mystère pourrait subir davantage dans une évidence de l'obscurcir le mystère.
Assagioli reconnaît :
« que la compréhension d'une chose est toujours partielle... le fait de croire avoir tout compris signale un manque de compréhension**, celle-ci étant le fruit d'un processus graduel. »
** discernement
Il appartient à la sagesse humaine autant qu'à la conscience de sa propre ignorance que d'essayer de la réduire le plus possible, notamment en ce qui concerne notre identité !
Le mystère n'est pas seulement le voile qui cache la réalité !
Il est dans la réalité elle-même dont le contenu dépasse toujours la capacité humaine de perception et d'appréhension, ce qui n'empêche pas à la connaissance, que le mystère offre plutôt un sens d'acquis nouveaux au sujet de nous-mêmes !
La conscience du mystère peut d'abord nous révéler qu'il y a toujours un savoir au-delà de toute la sagesse acquise, lequel nous attire et peut élargir nos horizons.
Pour la conscience éveillée, il constitue toujours non seulement un défi, mais aussi une opportunité !
Au dire d’Assagioli :
« le premier pas pour la révélation d’un mystère, c’est de reconnaître humblement qu’il existe ! »
La connaissance de soi prône l’auto-estime qui inclut l’honorabilité du mystère qui nous caractérise !
Toute révélation élargie la prise de conscience à notre égard, ne prétend pas épuiser le mystère de notre identité !
Le mystère ne postule pas l’agnosticisme qui fait de la découverte une simple probabilité !
Il y a alors l’acceptation d’une totalité qui inclut cet aspect encore inconnu.
L’être humain devient en permanence le sujet-objet de sa propre recherche et de sa propre découverte !
Il y a une sorte de va et vient entre l’observateur et l’observé qui sont tout simplement un !
Sans prétendre faire disparaître le mystère de la nature humaine, Assagioli croit à la possibilité que l'on a de progresser dans la connaissance de soi, et donc d'éliminer les obstacles de l'ignorance par rapport à nous-mêmes.
Il estime que l'on peut parvenir à une : conception 'pluridimensionnelle' de la personnalité humaine.
Et que cette conception, " loin d'être parfaite et définitive ", pourrait être cependant plus large et plus conforme à la multitude du réel que celles qui ont été formulées jusqu'à présent !
Il y a alors un défi et une opportunité pour la connaissance, et jamais la justification de nous réfugier dans l'ignorance !
Au plan de la personnalité : l'injonction :
‘ connais-toi toi-même ! ’
peut sembler étrange ?
Elle constitue cependant une constante historique d’un appel à l’intérieur de la philosophie et de la mystique.
La question :
‘ qui suis-je ? ’
suscite souvent des craintes !
Le refus de pénétrer jusqu'à son mystère intérieur est une évasion au risque de se trouver face à une image de soi éventuellement inacceptable !
Freud et Maslow ont bien mis en évidence qu'à la base d'une telle attitude sont déjà à l'œuvre les fausses identifications.
Il n'y a pas d'opposition entre connaissance de soi et le mystère, du moins en psychosynthèse !
La psychosynthèse nous amène à l’accueillir comme un élément de la connaissance de nous-mêmes !
Cela nous rend plus authentiques.
Le mystère, allié à l’inconnu peut éveiller autant la curiosité et l’intérêt que la méfiance et la peur !
Le fondement de l'auto-identification et la conscience au niveau du Soi opère une sorte de métamorphose intérieure caractérisée par :
la paix, la joie, la sérénité, la stabilité et la sécurité, lesquelles peuvent être éprouvées malgré les épreuves pénibles qui éventuellement l’accompagnent !
Assagioli considère cette révélation au niveau du Soi comme étant :
la " grande découverte ", la " vraie re-naissance ! "
Une telle prise de conscience est toujours un fait existentiel qui ne peut pas se limiter a une simple conviction d’ordre théorique, et moins encore à un témoignage extérieur !
Elle constitue une expérience laquelle personne ne peut faire pour nous-mêmes !
Pratiquement, une telle prise de conscience n’est pas
toujours effective ni définitive, et moins encore elle peu être empruntée.
Chaque individu fait une démarche unique dans le processus de cette recherche et de cette révélation.
À la question : ‘ qui suis-je ? ’
Assagioli offre cette autre réponse :
« Je suis le Soi, le point de la simple auto-identification. Je suis en permanence un être auto-existant, une réalité vivante ! »
Il recommande :
« Cherchons effectivement de réaliser notre vraie essence : ‘ Je suis un centre de conscience, de volonté et de vie ! ’ »
Ramana Maharishi :
« on n’atteint pas le Soi, on est le Soi; on est déjà ça ! »
Toutefois, au niveau de la personnalité, il est à préciser qu’il y a tout un cheminement à faire, aussi bien que de prendre des précautions à considérer au cours du processus de la connaissance de soi, fort souvent parsemé d’erreurs de perception.
Il est aussi inconfortable de continuellement faire face à un de nouveau questionnement lorsqu'on est dans l’attente et l’incertitude de recevoir une réponse.
** le lâcher prise prise est de de mise !
Mais il y a aussi l’enthousiasme inhérent au processus de la révélation qui peut faire de chaque surprise un nouveau l’élan vers la connaissance de soi !
6.5 Je suis qui ' Je suis ! '
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Roberto Assagioli a utilisé longtemps non pas les termes de : ' soi ' ou ' Soi ', (' se ' ou ' Sè ') mais de :
' je ' : io empirico ou ' Je ' : Io superiore , tout en y soulignant son aspect à la fois existentiel et mystérieux : il mistero dell’Io.
On peut se demander quel est ou quels sont effectivement les vocables les plus adéquats ?
On revient ici à la pensée d’Assagioli, celle du : ' Je royal ' : ' Io Reale ', principe actif et permanent, la vraie substance de notre être !
Une réflexion se présente, dans le sens de retourner aux termes primitifs pour lui utilisés. On le fait pour désigner le nucleus de l’identification humaine dans les contextes : individuel, social et universel.
En termes existentiels et tout en tenant compte de la conception tricotomique corps-âme-esprit, cela invite aux termes suivants de l’identification humaine :
Corps:
- Je suis et je m’identifie, individuellement et essentiellement, comme un corps exprimé en différentes formes de vie, somatique et autres, en même temps distinctes et inséparables, en termes d’identité humaine.
- Je suis et je m’identifie, socialement, essentiellement, distinctement et inséparablement, comme un élément constitutif du corps de l’humanité.
- Je suis et je m’identifie, comme un élément constitutif du corps de l’univers !
Âme :
- Je suis et je m’identifie, individuellement, essentiellement, comme une âme, le souffle vital de liaison entre la forme que je suis et l’esprit que je suis !
- Je suis et je m’identifie socialement, essentiellement, distinctement et inséparablement, comme un élément constitutif de l’âme de l’humanité, le souffle vital de liaison entre la forme que nous sommes et l’esprit que nous
sommes.
- Je suis et je m‘identifie universellement et essentiellement, comme élément constitutif de l’âme de l’univers, le souffle vital de la liaison entre le corps et l’esprit de l’univers où tous nous sommes distincts et inséparables.
Esprit :
- Je suis et je m’identifie individuellement et essentiellement comme esprit et source de la vie.
- Je suis et je m‘identifie socialement, essentiellement, distinctement et inséparablement, comme un élément constitutif de l’esprit de l’humanité que tous nous sommes.
- Je suis et je m‘identifie universellement et essentiellement, comme un élément constitutif de l’esprit, source de la vie de l’univers que tout et tous nous partageons distincte et inséparablement.
Cet aveu provient du centre de conscience, en termes d’identification et de co-identification.
Je : avec grand « J », est symbolisé par l’étoile au sommet du diagramme de l’œuf, lequel inclut et dépasse la dimension individuelle !
Il est, en même temps individuel et collectif !
Il est à remarquer le fait d’une identification humaine où le Je individuel fait appel à la co-identification par rapport au Je social et au Je universel, non seulement au niveau de l’esprit mais aussi aux niveaux de l’âme et du corps !
Pour ce qui concerne les niveaux de conscience, il y a les deux distinctions suivantes à faire :
Le je personnel ou soi personnel :
sont des caractères minuscules au niveau de la personnalité : corps, émotions et mental, en lien avec l’âme !
Le Je transpersonnel ou Soi transpersonnel :
sont des caractères majuscules – outre la personnalité, faisant le lien entre l’âme et l’esprit. Celui-ci inclut et dépasse les niveaux personnel et transpersonnel, tout en étant immanent et transcendant.
Pour ce qui concerne le caractère transcendant, on peut bien
se demander si oui on non cela regarde encore le domaine de la psychosynthèse ?
En effet, celle-ci ne s’occupe pas directement de la transcendance.
Toutefois, elle ne l’exclut pas et s’ouvre, en termes de complémentarité interdisciplinaire venant d’autres sources.
En fin de comptes, il ne s’avère pas trop de concevoir l’immanence et la transcendance en guise de deux polarités dont la synthèse en est perçue, au niveau de l’esprit, en termes de co-identification humaine !
Cela porte à tenir compte aussi du terme :
Soi transcendantal !
Assagioli se réfère au Soi transpersonnel comme une Réalité Suprême progressivement révélée dans la nature et chez l’être humain !
L’auto-identification passe par cette somme de la sorte que l’homme devient l’Homme lorsqu’il inclut et dépasse le domaine individuel !
6.6 D’étape en étape
Sources : Joao D'Alcor Frey - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Souvent, l’être humain se sent ou est présenté comme un exilé par rapport à soi-même !
De la question « qui suis-je ? » à la vraie identification de nous-mêmes, il y a tout un cheminement à faire qui doit passer aussi par le domaine de l’inconscient !
Tel est l’avis d’Assagioli :
« Pour vraiment nous connaître, il ne suffit aucunement de faire l'inventaire des éléments qui constituent notre être conscient... il nous faut en outre faire le long travail d'exploration des vastes régions de notre inconscient ! »
Le ' chercheur ' et la recherche sont inséparables !
Un simple éventail risque de conduire à une déshumanisation, une fois conçu comme une collection d’objets d’information.
La question : qu’est ce que c’est l’homme ?
reste alors une abstraction qui commence à le chosifier !
Seul le : « qui suis-je ? » - à ne pas confondre avec le : « qu’est ce que je suis ? » - peut mener à l’identification de l’humain !
Pour la réponse au questionnement sur l’identification humaine personne ne peut jamais se dispenser de la dimension individuelle !
Mais, tout le monde ne se pose pas à soi-même cette question, sous une forme de conviction, qu’elle serait superflue !
Cela traduit déjà le fait d’une identification personnelle très partielle et voire même erronée.
Par contre, la prise de conscience de l’ignorance par rapport à soi-même forme, dès lors et paradoxalement, devient un élément constitutif de la connaissance de soi, et un premier pas vers la sagesse.
Cette sagesse allie la conviction à l’action, ce qui porte Assagioli à l’invitation de pratiquement reconnaître et évoquer :
« le sens du caractère sacré inhérent à chacun et à tous les êtres humains ! »
L’approche assagiolienne nous offre une voie dont le but fondamental est l’expérience de l’auto-identification.
Pour y arriver, il y a tout un bout de chemin à faire où l’on doit compter avec des mirages à reconnaître, des détours à éviter et des épreuves à surmonter !
Pourtant, l’énigme de notre identification reste plein de révélations !La connaissance de soi fait appel à la connaissance du Soi.
Or, comme le remarque Carl Gustav Jung :
« on confond en général la connaissance de soi avec la
connaissance de son moi conscient ! »
cela sans tenir compte du fait, dit-il :
« Que le moi ne connaît que ses propres contenus ! »
Ignace Lepp explique :
« l’expérience atteste que les humains sont peu nombreux à parvenir au stade de soi à l’âge adulte de la psyché... la plupart ne dépassent jamais le stade du moi, porteur de masques, jouant des rôles plus ou moins nombreux ! »
Le processus de l'auto-identification, reste une aventure perpétuelle, devenant alors, pour tout le monde, l'un des plus grands défis à relever !
Nietzsche lui exprime :
« Nous ne nous connaissons pas, nous qui cherchons la connaissance; nous nous ignorons nous-mêmes : et il y a une raison pour cela. Nous ne nous sommes jamais cherchés – comment donc se pourrait-il que nous nous découvrions un jour ? »
Au dire de Platon :
« il ne mène pas la vie d’un homme, celui qui ne s’interroge pas lui-même ! »
L'identification totale serait l'expérience pure de la présence à soi-même, et donc de la conscience au niveau du Soi.
Loin de constituer un acquis définitif, la connaissance de soi se poursuit dans le processus d’une révélation permanente, puisque l’expérience de l’auto-identification n'est jamais parfaite ni définitive !
Il y a au niveau du plan existentiel et de pair avec la permanence ontologique de notre identité, une sorte de changement d’identification qui porte à la perception que l’on est simultanément la même personne et quelqu’un devenu différent !
Comme le remarque Ken Wilber :
« il n’y a pas de frontière entre sujet et objet, soi et non-soi, le voyant et le vu ! »
- l'activation de la personnalité par le contact avec les énergies du supraconscient,
- la manifestation et la prise de conscience du Soi transpersonnel,
- la communion du Soi transpersonnel avec le Soi universel, dans une sorte de fusion et mystique d'identification.
Avec Alberti, il dit :
« que l’homme est un Soi à la recherche du Soi, une âme que cherche l’âme ! »
Dans ce processus de la connaissance de soi remarque-t-il :
« continuellement, l'homme se perd et se retrouve, s’oublie et se souvient de soi, s’ignore et se reconnaît, se repousse et s’accueille, s’emprisonne et se libère, se haït et s’aime, s’abandonne et se retrouve ! »
Jacques Grand’Maison exprime :
« nous sommes plus que ce que nous pensons être ! »
L’être et le devenir font partie de l’identification humaine, ce qui porte Sri Aurobindo à définir : les humains comme des êtres en transition !
Alors, en psychosynthèse la question ‘ qui suis-je ? ’ reste présentée en fonction d’une réponse qui dépasse la conscience actuelle de nous-mêmes !
Il y a toujours un niveau supérieur d’identification auquel nous pouvons avoir accès !
Il y a un potentiel de révélation permanente et un processus d’auto-identification jamais tout à fait accompli !
Au dire de René Habachi :
« notre identité, notre rencontre avec nous-mêmes nous échappe et plonge ainsi dans un orient intérieur à notre devenir, en nous laissant jusqu’alors toujours différents, toujours en deçà de nous-mêmes, et comme une existence privée de la plénitude de son essence ! »
La connaissance de soi reste toujours un processus qui est en même temps de plus en plus englobant et synthétique.
Dans son ampleur, il y a un appel à tous les domaines du savoir qui inclut et dépasse celui des sciences psychologiques !
Tout en valorisant la richesse et la complexité de l’humain, la psychologie ne peut pas se dispenser, en termes de complémentarité, d'un apport interdisciplinaire.
Assagioli en est conscient lorsqu’il invite, comme référé plus haut :
« à viser une plus vaste synthèse de la science, de la philosophie, de l’art et de la religion, vers une connaissance intégrale du ‘phénomène humain’ et de la réalisation de ses plus hautes possibilités ! »
Entre la connaissance de soi et la connaissance du Soi il reste
encore chez nous une partie endormie et dans l’attente d’un éveil qui traduit le passage de l’homme à l’Homme !
Abraham Maslow évoque :
« l'homme est plus que ce qu'il est ! »
Ce cheminement de l’homme vers l’Homme relève d’une prise de conscience et du processus inhérents de la croissance humaine, à ne pas confondre avec le concept nazi du « surhomme », à la fois élitiste, discriminatoire et compétitif !**
** sujet inquiétant qui revient depuis les années 2020 sous la définition du terme : eugénisme. je pense aussi à cette AI ou intelligence artificielle.
En psychosynthèse. il est toujours question de conjuguer :
- l’être avec le devenir,
- le connaître avec le découvrir !
Cela ne doit pas empêcher de vivre dans l’ici et maintenant l’expérience d'une entase, c’est-à-dire celle d’être vraiment présent à soi-même !
Telle est le projet de l’auto-identification dans la rencontre avec nous-mêmes, tel que nous sommes !
La connaissance de soi se trouve alliée à l’estime de soi, fondée celle-ci sur la conscience de nos capacités actuelles et de nos potentialités, hors de toutes dépendances esclaves par rapport à des modèles, des normes et des valeurs imposées de l’extérieur !
La psychosynthèse reste toujours une bio-psychosynthèse dans : l’évocation, l’inclusion, l’intégration, l’harmonisation et la synthèse vital de toutes les composantes humaines.
Roberto Assagioli, le concepteur de la psychosynthèse offre un système psychologique qui vise exprimer l'harmonie de l'être humain...
Non pas tellement dans la combinaison des formes et dans la consistance des matériaux d’une statue, et non plus dans les couleurs et traits d’un tableau, ou dans un traité philosophique, mais dans la conscience et lumières de nos vies, révélant, de façon existentielle et de plus en plus, notre propre identification, existentiellement reconnue dans son l’intégrité, dans sa bonté et dans sa beauté.
Son approche psychologique postule l’accomplissement de l'être humain à partir d’une identification intégrale, capable de découvrir l’innocence originelle dans la nudité du corps, et l’authenticité du miroir de l’âme, et le pivot de l’harmonie dans la lumière de l’esprit.
Selon Assagioli :
« Il faut effectivement se connaître pour pouvoir arriver à la maîtrise et possession de soi ! »
Chaque individu est librement invité à poursuivre et à compléter, de façon responsable, sa démarche personnelle, de façon à conjuguer le savoir : avec le savoir-faire, avec le savoir-être et avec le savoir-vivre !
Il s’agit d’un processus vital, où la connaissance de soi se trouve toujours dans un rapport de complémentarité, en connexion étroite avec les thèmes : de la maîtrise de soi, l’actualisation de soi et la réalisation de soi, lesquels font l’objet des chapitres suivants.
Fin de la retranscription de la partie 7, la partie 8 suivra mais patience...
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Eddy Vonck - Fondateur du Blog Psycho'Logiques
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