𝗣𝗮𝗿𝗮𝗺𝗲̀𝘁𝗿𝗲𝘀 𝗱𝗲 𝗹𝗮 𝗰𝗼𝗻𝘀𝗰𝗶𝗲𝗻𝗰𝗲 𝗲𝗻 𝗣𝘀𝘆𝗰𝗵𝗼𝘀𝘆𝗻𝘁𝗵𝗲̀𝘀𝗲 𝗱𝗲 𝗥𝗼𝗯𝗲𝗿𝘁𝗼 𝗔𝘀𝘀𝗮𝗴𝗶𝗼𝗹𝗶 (partie 4) - (Fonctions psychologiques.)
𝗣𝗮𝗿𝗮𝗺𝗲̀𝘁𝗿𝗲𝘀 𝗱𝗲 𝗹𝗮 𝗰𝗼𝗻𝘀𝗰𝗶𝗲𝗻𝗰𝗲 𝗲𝗻 𝗣𝘀𝘆𝗰𝗵𝗼𝘀𝘆𝗻𝘁𝗵𝗲̀𝘀𝗲 𝗱𝗲 𝗥𝗼𝗯𝗲𝗿𝘁𝗼 𝗔𝘀𝘀𝗮𝗴𝗶𝗼𝗹𝗶 - partie 4
🚫 avant de lire cette partie 4, il est impératif que vous lisiez à votre aise, les chapitres précédent 1&2&3 Eddy
📌(partie 2) - (niveaux de conscience / sur la voie du centre)📌(partie 3) - (Ouverture à l’inconscient)
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Psychosynthèse : Bien plus fondamental que la découverte de l'espace cosmique est celle de notre identification et potentiel, donnant lieu à l'élargissement de la conscience.
Le présent chapitre concerne directement les items quatre, cinq et six du diagramme de l'œuf présenté, c’est-à-dire le champ de la conscience et ses niveaux, et le centre même de cette conscience nommé le moi personnel ou alors le Soi transpersonnel, y considérant respectivement les domaines personnel et transpersonnel.
4. Le champ de la conscience
5. Le moi conscient ou soi personnel
6. Le Soi supérieur, spirituel ou transpersonnel
les autres items sont
1. L'inconscient inférieur
2. L'inconscient moyen
3. L'inconscient supérieur ou supraconscient
7. L'inconscient collectif
📌 Le classement et les nomenclatures des niveaux de conscience varient selon les différentes écoles et auteurs en Psychosynthèse.
La référence à des niveaux ou stades de conscience ne doit pas être comprise dans le sens linéaire du terme. Il ne s'agit pas d'une localisation à proprement dite. On peut cependant imaginer le domaine conscient comme un spectre dont le rayonnement se présente avec des couleurs et intensités différentes !
C'est dans cette perspective que l'on doit considérer les niveaux distinctement identifiés en psychosynthèse par le biais du diagramme de l'œuf où il est question des domaines conscient et inconscient à des niveaux et dimensions distincts.
Le fait de considérer différentes prises de conscience plus ou moins amples ou et intenses et toujours passibles de modification ! Il y a, chez n’importe qui, possède des domaines ou stades plus ou moins conscients dont on doit tenir compte. Mais il ne serait pas correcte d'exprimer qu'il y aurait des individus, les uns conscients et les autres dépourvus de conscience ???
Celle-ci est commune à tous, quoique les degrés soient différents concernant la prise de conscience de chacun !
🚫 avant de lire cette partie 4, il est impératif que vous lisiez à votre aise, les chapitres précédent 1&2&3 Eddy
📌(partie 2) - (niveaux de conscience / sur la voie du centre)
📌(partie 3) - (Ouverture à l’inconscient)
Ici, commence la partie 4
Chapitre 5 - Fonctions psychologiques
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
L'intérêt pour ce qui regarde les fonctions psychologiques semble universel et vient de loin. D’abord, elles furent considérées, surtout à l’intérieur de la philosophie !
Elles y ont été traitées et classées différemment selon les auteurs, en accord avec leurs systèmes (modèles) psychologiques.
Pour ce qui concerne la psychosynthèse, Roberto Assagioli offre une approche basée sur une considération intégrale de tous les éléments et fonctions de la psyché.
Il s’agit de facultés bio-psychologiques plus ou moins distinctes, et en même temps complémentaires, qui peuvent se manifester à différents niveaux de conscience, tout en incluant aussi des éléments inconscients.
1 - Identification et classement
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Si l’on recule assez loin dans le temps, on trouve déjà chez Boèce de Dacie la distinction de quatre facultés ou degrés d'élévation dans l'âme :
- sensus, (sensation)
- imaginatio, (imagination)
- ratio (raison)
- et intellectus (intellect)
Isaac y ajoute un cinquième, l'intelligentia (intelligence).
Bonaventure de Bagnoregio, quant à lui, s’occupe de stades de la démarche psychologique ou degrés de la conscience qu'il nomme :
- les sensations,
- l'imagination,
- la raison,
- l'intellect
- et intelligence
et encore...
le degré de la conscience illuminée, considérée le sommet de l'âme, désigné en latin apex mentis, ou synderesis scintilla.
Il n'est pas question pour lui de fonctions psychologiques, à proprement dite, dans la mesure où il semble distinguer seulement deux facultés dans l'âme : l'intellect et la volonté.
Selon Emmanuel Kant, il y a trois fonctions à l'intérieur de la psyché :
- la sensation,
- l’effort
- et la pensée.
Jean de la Croix tient compte trois puissances de l’âme :
- l’entendement,
- la mémoire
- et la volonté.
Pour ce qui concerne les temps modernes et avant Roberto Assagioli, la classification la plus remarquable des fonctions psychologiques revient à Carl Gustaaf Jung.
Il s'agit fondamentalement d'un classement quaternaire constitué par :
- la sensation,
- le sentiment,
- la pensée
- et l'intuition.
L’objectif visé, c’est l’identification, le classement et la présentation des fonctions psychologiques telles que
conçues et élaborées par le concepteur de la psychosynthèse, tout en plaçant ce sujet dans un certain contexte l’historique et idéologique, de façon à mieux comprendre les fondements, les caractéristiques et la portée de l’approche assagiolienne.
Dans une esquisse de psychologie individuelle présentée en 1932, Assagioli parle de quatre "centres vitaux" correspondant aux quatre fonctions présentées par Jung :
- le centre physique,
- le centre émotif,
- le centre mental
- et le centre intuitif.
Dans un autre document plus élaboré, il tient compte d'un domaine psychologique "amorphe", encore inexploité, et d'un autre "différentié" dont les éléments psychiques se trouvent comme enregistrés.
Assagioli les a ordonné dans les trois séries suivantes :
- Une série cognitive formée par les sensations, les images, les concepts concrets, les concepts abstraits et les idées universelles;
- une série émotive constituée par les passions, les émotions, les sentiments personnels, les sentiments esthétiques et moraux, et les sentiments universels;
- une série active comprenant les instincts, les impulsions, les tendances, les désirs, les aspirations, la volonté personnelle et la volonté spirituelle ou transpersonnelle.
2 - Modèle septénaire
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
En 1958, tout en allant vers un classement plus élaboré, Assagioli commence pour tenir compte de cinq fonctions psychologiques, à savoir :
- Les sensations,
- les émotions,
- la pensée
- et l'intuition,
c'est à dire, les quatre fonctions du modèle jungien, tout en y ajoutant celle de :
- la volonté !
Plus tard et en termes définitifs, il offre un classement constitué par sept fonctions psychologiques gravitant autour du Soi transpersonnel, ou centre de conscience.
C’est le modèle septénaire que l’on passe à considérer selon les désignations et l'ordre indiqués par le diagramme Assagiolien de l'étoile, ou étoile des fonctions illustré.
Il inclut les quatre fonctions de la classification jungienne, (sensation, émotion, pensée et intuition), tout en y ajoutant non plus seulement une, mais les trois fonctions suivantes : impulsion, imagination et volonté.
1. Sensation
2. Émotion
3. Impulsion
4. Imagination
5. Pensée
6. Intuition
7.Volonté
8. Soi
Même si le Soi figure dans le diagramme de l’étoile, il faut bien noter qu'il s'agit là du point de référence et non pas d'une fonction psychologique.
« Les fonctions psychologiques sont des expressions du Soi. »
Celui-ci, quoique distinct de n’importe quelle fonction psychosomatique, n’en n’est jamais séparé.
Roberto Assagioli dit :
« Le Soi est la réalité permanente et sans changement, un centre stable de la vie à son propre niveau; il a des fonctions, mais il n'est pas une fonction. »
Déjà Thérèse d’Avila se montrait convaincue du fait que :
« L'Âme est quelque chose différente de ses facultés ou fonctions [potencias], et que tout n’y est pas la même chose.»
Elle considère les fonctions, les “sens et potentialités naturelles” comme étant les “serviteurs [vassalos] de l’âme !
Les fonctions psychologiques sont ses instruments de perception et d’action plus ou moins aptes à fonctionner ! Il va sans dire que le schéma des sept fonctions n'exclut pas d’autres classifications possibles.
Même chez Assagioli, on rencontre d'autres éléments pouvant conduire à des classements différents ou plus détaillés.
À propos de la sexualité par exemple, il tend à la considérer comme fonction biopsychologique distincte reliée à toutes les autres.
On peut dire de même à propos du rêve, qui induit y voir une activité en termes de fonction onirique.
En plus de celle-ci, on peut alors considérer également fonctions psychologiques, ou bio-psychologiques d'autres facultés :
- comme la fonction du langage,
- la fonction motrice,
- la fonction sexuelle,
- et tout particulièrement celle de la mémoire,
- la fonction mnémonique, qui est plus souvent considérée une fonction psychologique distincte.
Cette faculté semble cependant constituer plutôt une fonction psychologique générale reliée aux sept fonctions habituellement considérées en psychosynthèse.
Jung y voit : la somme des souvenirs et la faculté de reproduire des matériaux antérieurement enregistrés.
« Mémoire et souvenir ne sont pas toujours considérés comme des synonymes. Tandis que la mémoire se limite à des enregistrements du passé, dans le souvenir il y a leur évocation alliée à une nouvelle signification. »
Jean-Claude Breton, Approche contemporain de la vie spirituelle.
Chez Assagioli, elle s’avère parfois au rang des fonctions psychologiques, mais il semble l'identifier plutôt l'imagination reproductrice !
« La mémoire n’existe pas; il existe un centre qui se souvient. » Roberto Assagioli
Il s'agit effectivement d'une opération surtout mentale reliée aux domaines conscient et inconscient, tout en ayant un rapport étroit avec l'imagination.
Selon Bonaventure : la mémoire retient le passé, reçoit le présent et prévoit le futur !
À propos du classement septénaire d'Assagioli, ordinairement adopté en psychosynthèse. Il y est plus clair de faire la distinction des fonction à l'intérieur de la psyché que d’établir l'ordre qui figure dans le diagramme de l'étoile.
Médiatrice entre les autres fonctions et le centre de conscience, la volonté se voit assignée par Assagioli un rôle fondamental.
Assagioli tient que :
« les diverses fonctions psychologiques peuvent s’interpénétrer et interagir” et que la volonté est dans une position permettant de diriger leur interpénétration et leur interaction ».
Cette exposé sera accompagné de quelques pistes d'application pratique.
2.1 Sensation
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Cette fonction biopsychique nous permet de communiquer non seulement avec l'environnement, mais aussi avec nous-mêmes.
Aristote y voit la porte d’entrée pour l’intellect : « Rien n’est dans l’intellect sans être d’abord dans la sensation ! »
Frank Haronian considère la sensation comme une fonction proto-psychologique faisant le lien entre l'environnement physique de l'individu et de sa personnalité, ce qui donne lieu, dans son classement, à placer la sensation au niveau prépersonnel.
Selon la sensation, elle est agréable ou désagréable, il y a de l’aisance ou du malaise, du plaisir ou de la douleur.
Celle-ci, tout en étant synonyme de souffrance, reste compatible avec la joie, de même que le plaisir ne s’oppose pas nécessairement au sentiment de tristesse !
Une sensation ou un sentiment désagréable n’écartent pas la joie dont ils peuvent devenir de vraies sources.
Roberto Assagioli mets en évidence :
« Ce n’est pas la même chose d’avoir de la joie et de se sentir joyeux. Nous ne pouvons nous sentir joyeux tout le temps, mais nous pouvons avoir la joie intérieure sans en ressentir le sentiment ! »
La satisfaction du désir peut être plus ou moins conscient et peut produire le plaisir, mais pas nécessairement la joie.
On exprimerait que la satisfaction est reliée à la modalité « avoir », alors que la joie, à considérer plus loin, traduit celle de « l’être », tout en comprenant celui-ci plus que la sensation.
Contrairement à l’apatheia** de la philosophie stoïcienne en Occident et la virâga de la philosophie orientale qui semblent préconiser l’indifférence totale face autant au plaisir qu’à la douleur ?!
** l'apathie
L’indifférence de l’apatheia opposée au pathos, compulsif et dépendant, est passé au Judaïsme et surtout au Christianisme particulièrement comme idéal éthique souvent fort cultivé par les Pères de l’Église et les Pélagiens.
Roberto Assagioli donne comme exemple que le plaisir sexuel et celui de manger sont loin d'être des poisons, ce sont des "gratifications saines" reliées aux objectifs de la vie et de l'amour et qui ne peuvent pas, remarque-t-il, servir de fondements prétendument objectifs de culpabilité.
Il tient toutefois que :
« la recherche du plaisir et du bonheur comme finalités en eux-mêmes est l'erreur et l'illusion caractéristiques d'une conception hédonistique et égoïste de la vie ! »
Certes, le plaisir et le bonheur sont souhaitables, voire même un droit, mais comme résultat et non pas comme une prémisse inconditionnelle, ni comme maîtrise et non pas comme esclavage . C’est l’attachement au plaisir qui coupe la capacité de jouissance !
Avec Assagioli, il faut noter non seulement l’amoralité du plaisir comme tel, mais aussi le fait que « la jouissance des besoins supérieurs n’exclut pas le plaisir à tous les autres niveaux ! »
Tout en remarquant qu’il relève du sophisme de classifier négativement d’égoïste toute forme de plaisir, il fait la distinction entre :
- ‘égoïsme égoïste’ (le plaisir centré sur l’autosatisfaction)
- et ‘égoïsme altruiste’ (le plaisir de plaire aux autres).
Il dénonce ainsi l’erreur du moralisme qui tend à confondre jouissance et attachement !
Alexander Lowen fait voir que volonté et plaisir peuvent devenir antinomiques :
« Il est dans la nature du plaisir qui plus on le poursuit, plus il déjoue nos poursuites. Il est indissociablement lié à la réalisation : une vie sans réalisations est également dépourvue de plaisir ! »
Autant le refoulement que l'assouvissement nous empêchent de trouver le vrai sens du plaisir !
« Les gens essayent de refouler leurs désirs mais ne réussissent qu’à les nourrir de l’énergie de leur propre abnégation. Après qu’un désir a été étouffé un certain temps, il revient radicalement, émerge sous une forme différente ou semble simplement avoir disparu, mais, de façon inaperçue, il contrôle en réalité l’individu qui a essayé de l’éliminer. »
Piero Ferrucci
« Souvent en vous refusant le plaisir vous ne faites qu’accumuler le désir dans le replis de votre être. »
Kahlil Gibran
De son côté, l’assouvissement névrotique nous dépouille du plaisir trouvé et fait échapper la jouissance que l’on recherche !
Le vrai plaisir est en même temps expression naturelle et gratification spontanée.
Abraham Maslow tient compte d’une certaine désapprobation à l’égard du plaisir qui peut créer :
“un certain embarras, une dissimulation à son propos, ce qui aboutit finalement à l’incapacité d’en faire une expérience authentique.”
Alors, retrouver la capacité de percevoir ses propres plaisirs est le meilleur moyen de redécouvrir la partie de soi que l'on a sacrifiée, même à l’âge adulte.
C’est dans ce sens que Maslow prône la théorie de la croissance par le plaisir. Il s’y sent identifié avec les psychologies dynamiques y incluant explicitement celle d’Assagioli.
Le plaisir est le fruit spontané d’un bien accompli ou reçu, mais il ne doit jamais être le mobile égoïste de nos actions (objectifs).
« le plaisir n’est pas le but de nos aspirations, mais la
conséquence de les avoir comblé ! » Viktor Frankl
Alors, par la voie de conséquence :
« plus on s’efforce pour le plaisir, moins on devient capable de l’obtenir. » Viktor Frankl
Cela porte à découvrir dans l’hédonisme un piège. Au lieu de jouir du plaisir qui provient de la vie, l’hédoniste sacrifie la vie au plaisir. Il aime donc plus le plaisir que la vie !
« Plus on a de plaisir, plus on est capable d’aimer. Et en offrant notre amour, nous augmentons notre plaisir ! »
Alexandre Lowen
Dans le faux plaisir il y a un sens de séparation, alors que le vrai plaisir en augmente le sens.
Comment distinguerons-nous ce qui est bon dans le
plaisir et ce qui ne l’est pas ? Posé par Khalil Gibran
Et il passe à la réponse en ton d’exemple :
« Allez à vos champs et à vos jardins et vous apprendrez le plaisir de l’abeille de butiner le miel de la fleur. Mais c’est aussi le plaisir de la fleur de céder son miel à l’abeille. Car pour l’abeille une fleur est une source de vie, et pour la fleur une abeille est une messagère d’amour, et pour tous les deux, abeille et fleur; donner et recevoir le plaisir sont un besoin et une extase. »
Avec lui, on doit considérer le plaisir comme un moyen et non pas comme un but.
« Le plaisir est un chant de liberté, mais il n’est pas la liberté ! Il est l’éclosion de vos désirs, mais il n’est pas leur fruit. »
Tout le plaisir, y incluant le plaisir sensoriel hors d'une recherche sybaritique², peut dépasser les contraintes du principe hédoniste*, porter de la joie, et atteindre l'extase de la communion de l'amour agapè**.
² Qui a pour but la recherche d'un plaisir raffiné.
* L’hédonisme est une doctrine philosophique attribuée à Aristippe de Cyrène selon laquelle la recherche de plaisirs et l'évitement de souffrances constituent le but de l'existence humaine.
** Agapè est un concept philosophique qui désigne l'amour « divin », « inconditionnel », celui des principes. L'agapè est souvent comparée à la charité chrétienne.
Pour qu’une perception sensorielle, soit-elle plaisante ou non, devienne assez consciente et bien assimilée, elle a besoin du concours et d'une complémentarité de toutes les autres fonctions psychologiques, notamment de la volonté, de façon à demeurer le temps suffisant dans le champ de la conscience, sans quoi elle sera plutôt partiale et imparfaite.
À cette fin, on pourra utiliser l’exercice de désidentification.
Cependant, la formule assagiolienne
« j’ai des sensations, mais je ne suis pas mes sensations ! »
s’avère assez radicale et à saveur dualiste.
Cette autre proposée par John Firman,
« je suis distinct mais non séparé de mes sensations ! »
semble plus adéquate et en conformité avec le processus
psychosynthétique.
Le stress est devenu un terme commun pour exprimer une tension et un malaise au niveau des sensations.
Il faut d’abord et avant tout le prendre comme une expression saine de la vie, en tant qu’alarme sensorielle.
Le caractère biopsychique de la sensation fait appel à une attention toute particulière de notre corps !
Face à la tension, on peut obtenir de la relaxation par le biais de plusieurs techniques :
- la gymnastique,
- la méditation,
- le massage
- et l’entraînement autogène...
Toutes les fonctions psychologiques se trouvant en rapport mutuel, il y faut souligner le rôle de l’acte volitif, ce qui porte Assagioli à remarquer que
« la volonté doit intervenir afin de diriger, de régulariser, et d’utiliser au meilleur avantage la fonction sensorielle. »
Chaque sensation peut créer en nous une expérience de co-existence et l'élargissement de l'être !
« éprouver une sensation, c'est vraiment devenir en quelque manière la chose sentie ! » Gabriel Marcel
En effet, le monde de la sensation concerne et mets en rapport toutes les dimensions et niveaux de conscience considérés par la psychosynthèse, y incluant l’apport de
chacune des autres fonctions psychologiques.
2.2 Émotion
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Il y a une distinction à faire entre l’émotion et la sensation, malgré leurs connotations.
- Si l’on est dérangé par le tabac (la fumée de la cigarette), il y a une sensation. Mais lorsque cela nous rage, il y a une émotion !
Ce ne sont pas les évènements qui causent les émotions, mais les perceptions et les idées que l’on a à leur égard.
René le Senne considère l’émotion comme un ébranlement plus ou moins fort provoqué dans la vie organique et psychologique à partir d'une perception ou d'une pensée !
La vie émotionnelle est aussi, en revanche, une source de pensée(s) !
Henri Bergson qui définit l'émotion comme :
« un ébranlement affectif de l'âme qui tient compte de la teneur active des émotions en tant que "génératrices de la pensée" et d'une sorte d’énergie créatrice. »
Roberto Assagioli place la source d'une émotion dans une sensation, une idée, et aussi dans une autre émotion.
Différents éléments donnent lieu alors à des émotions différentes.
Il voit une action réciproque entre les émotions et les sentiments d'un côté, et les désirs et les impulsions de(s) l'autre(s) !
Il considère en plus l’interaction entre l'émotion et les autres fonctions bio-psychologiques, particulièrement son rapport avec l'imagination, puisque les émotions et les impressions ont tendance à susciter et à intensifier les idées et images correspondantes, ou avec lesquelles elles se trouvent associées.
« Si tu ne croques pas une pomme, tu ne peux pas en connaître l'émotion de croquer cette pomme, tant que tu n'auras pas goûté à ce fruit, tu ne pourras pas vraiment le définir. »
Eddy Vonck
Souvent il y a un rapport direct avec la pensée et l'imagination.
Ainsi, Assagioli considère que les idées et les images tendent à susciter des émotions et des sentiments qui lui correspondent.
Il y là une prise de position contraire à la thèse physiologique reprise par Théodule Ribot qui réduit à la vie végétative la source de tous les sentiments.
Celui-ci, tout en traitant les sentiments dans la perspective de la psychologie expérimentale, distingue les émotions à caractère religieux, moral, intellectuel et esthétique.
Le terme émotion dérive littéralement du latin motus (mouvement) et emovere (déplacer, perturber). Ce terme finit pour remplacer en psychologie moderne le mot passion (passio) avant utilisé, tout en mettant alors en évidence le caractère dynamogène, de façon à éviter ainsi une connotation plutôt passive.
Assagioli considère que les sentiments sont « des forces de vie », et les passions, « le charbon blanc » qui produit les forces motrices, fécondatrices et distributives de la vie humaine.
P.M. Bonacina voit dans l’émotion :
« un signe qui ouvre la voie a un programme psychique et physique, psychologique et somatique, lorsque l’on vérifie des divergences positives ou négatives dans les attentes. »
Il associe la passion à une situation plus ou moins hors le contrôle de la raison et de la volonté, c’est à dire :
« tout ce qui chez l’homme (humain) n’est pas raison calculé, mais une tension irrésistible, un désir où/et une convoitise indomptable. »
La réciprocité entre émotion et sentiment fait que ces deux termes soient parfois présentés comme les deux pôles, l'émotion étant reliée au plexus solaire, et le sentiment au cœur !
En pratique, 'émotion' et 'sentiment' sont pris la plupart du temps pour des synonymes !
Chez Assagioli, il est question parfois d'un terme, parfois de l'autre. Occasionnellement, il emploie le terme 'passion' dans le sens de la dyade émotion-sentiment.
La préférence pour le terme émotion, tout en ayant le but de simplifier, se doit aussi au fait de sa plus grande neutralité, étant donné que le sentiment se trouve parfois allié à l’idée d’un sentimentalisme, portant donc une connotation passionnelle plus ou moins dépréciative.
De toute façon, le sentiment est une sorte de musique dont les notes sont les émotions.
On peut dire que le sentiment se nourrit des émotions comme le corps se nourrit des aliments.
Carl Gustav Jung, au contraire de ceux qui croient que :
« le sentiment n’est qu’une pensée inachevée », considère que « nous ne devons pas mélanger pensée et sentiment ! »
Pour lui, un jugement émis par le sentiment jouit en soi de la même évidence, de la même validité qu’un jugement intellectuel et logique !
Les émotions et les sentiments vont de pair et se complètent, comme les mots et la musique !
Il semble y avoir, généralement une tendance à connecter la vie émotive avec les impulsions physiques, tout en donnant aux sentiments une coloration à caractère spirituel ou plutôt amoureux, ce qui n’empêche pas de considérer l’amour, à la fois, ou en même temps, comme un sentiment et comme une émotion !
Tout en sauvegardant l’utilité des distinctions, il faut noter qu'il n'y a pas d'état affectif isolé, mais toujours relié à des images et représentations, formant un ensemble auquel les psychologues ont attribué la désignation de «complexe" et qu'Assagioli désigne par le terme de "constellation"
Assagioli remarque que la fonction émotion couvre un champ qui va de manifestations destructrices telles que la colère, le rage et la convoitise, jusqu'aux sphères les plus élevées de l'amour altruiste.
C’est à distinguer, avec lui, entre les émotions à caractère dépressif :
- peur,
- méfiance,
- sens d'infériorité,
- jalousie,
- rage,
- angoisse,
- irritation, etc.
et les émotions à caractère dynamogénique, tel que :
- la confiance,
- l'émerveillement,
- la joie...
Les premières sont des éléments corrosifs (toxiques), tandis que les autres constituent le ciment de l'œuvre psychosynthétique.
On parle des émotions négatives de nature corrosive (toxique) au niveau de l’estomac et du plexus solaire, tout en menant à la dépression, alors que les émotions positives réchauffent le cœur et portent à stimuler et embrasser la vie et le monde.
En effet, les aspects négatifs ou positifs concernent non pas les émotions comme telles, mais les réactions à leur égard.
La peur constitue une émotion autant commune que complexe. Elle mérite alors une attention particulière !
Assagioli conçoit la peur comme une réaction biologique et psychologique fondamentalement déterminée par l’instinct de conservation compris dans son sens le plus ample.
« La chose la plus importante est celle de ne pas être effrayé de la peur ! C’est une condition normale des personnalités. » Exprime Assagioli !
La peur, techniquement désignée sous le terme de phobie. Se dire affranchi de toute peur s’avère plutôt une façon d’exprimer la peur de la peur.
Il y a l'illusion et l’apparence d'une maîtrise de soi qui est en même temps l'incapacité d'accepter le fait de nos insécurités et la leçon de nos propres limites (fragilités, vulnérabilités...)
Thérèse d'Avila avertit que « nous ne connaîtrons jamais sur cette terre une sécurité complète ! »
Plus que dans d’autres domaines, il y a tout un nombre de facteurs biopsychiques qui prêtent à la vie émotionnelle des variations d’intensité. Telle que dans l’échelle musicale, l’harmonie peut et doit se faire dans la conjugaison de notes plus en haut ou en bas de l’échelle !
Ce sont les dissonances, comme :
- l’anxiété,
- la colère
- et la peur panique,
que l’on y doit éviter ou traiter.
En effet, la peur représente une partie de nous-mêmes qui prône l’accueil et jamais le rejet (le déni).
Plus on essaie d’éloigner la peur, plus elle devient proche et désagréable. Avouer et embrasser la peur est un moyen de l'apaiser !
Au niveau du Soi il n’y a plus de place pour la peur !
Cela n’empêche pas la conscience de son existence au niveau de la personnalité qui nous pousse souvent à la contrôler, tout en passant des manifestations à ses origines !
Il y a la peur de quelque chose, face à une myriade de dangers, et aussi la peur de quelqu’un en rapport avec le rejet et l’isolement, donnant aussi et parfois le sentiment de d’abandon et de d’insécurité.
« La peur de perdre son travail par exemple, n'a pas le même ressenti qu'un parent autoritaire qui vous maltraite. Ce sont bien deux peurs mais elles sont relativement différentes mais aussi complexes au niveau du ou des traumatismes causés. »
Eddy Vonck
Plus fondamentalement, il y a la peur de ne pas être, laquelle est reliée :
- à toutes les limitations de la souffrance,
- de l’insécurité,
- de la perte d’identité,
- et plus encore à celle de l’anéantissement radical traduit par la perception ordinaire de la mort !
Il y a aussi la peur de la vie (de vivre), ou et un manque de confiance qui tend à réprimer la manifestation de potentialités.
Cette peur est souvent reliée à la conception d’un idéal utopique, non rarement associée à un sentiment de culpabilité fruit d’une éducation sévère, surtout en termes de perfectionnisme qui est souvent le fruit d’un moralisme d'un paire (narcissique) et écrasant.
Le sentiment de culpabilité y est alors très fréquent ou parfois dénié.
Celui-ci peut signifier tout simplement la conscience et le sens de responsabilité face au mal commis ou omis, mais il se trouve souvent allié à la peur basée sur un jugement négatif en provenance de soi-même ou des autres, souvent allié à un excès de sévérité et à de l’intransigeance.
Assagioli mentionne, comme modalité de la peur :
« la préoccupation concernant l’opinion (la vision) des autres »
Tout en remarquant que malgré l’évidence de l’impossibilité de plaire à tout le monde :
« Un grand nombre de gens empoisonnent leurs vies avec l’anxiété tout en essayant d’éviter tout forme de reproche ou criticisme ! »
Fondamentalement il y a le manque de confiance en soi-même, voire la peur de soi-même.
« La culpabilité humaine est plus souvent une culpabilité névrotique qu’une culpabilité réelle. » remarque Abraham Maslow
« Je suis l'antithèse, et si nous apprenions aussi à accepter de n'avoir plus confiance en l'autre et en la société ! N'est-ce pas un début de conscience d'arrêter de nier qu'il y a des personnes en société qui ne nous respectent pas dans notre intégrité d'être nous-mêmes ? » Eddy Vonck
Tel que pour la maladie physique, la peur est contagieuse et commune à tout être humain.
Bien qu'à des degrés différents, "tout le monde a peur", remarque Assagioli.
Mais il n'en demeure pas moins pour autant que la peur est le fruit d'une erreur d'attitude au niveau de la personnalité.
Source de dégradation de l'énergie biopsychologique, cette erreur d'attitude est surtout manifeste dans les différentes phobies qui peuvent prendre les formes et les prétextes les plus variés, tout en ayant leurs racines dans l'insécurité par rapport à nous-mêmes, par rapport aux autres et par rapport à la vie.
La peur provoque parfois l'immaturité, et parfois des états de régression psychologique !
Malheureusement elle peut être cultivée et disséminée
comme un armement de domination, devenant alors un flot socialement fort contagieux qui peut associer obsession, la paralysie et parfois la dépendance.
Sans faire de la peur, une amie, il faut bien éviter de l'observer comme ennemie !
Le besoin d’éviter le danger devient alors si prépondérant qu’il peut neutraliser l’attrait du bien désiré !
La peur crée la dépendance non seulement du réel, mais aussi de l'imaginaire.
« Combien nous nous torturons avec un si grand nombre de malheurs qui n'arrivent jamais !? », s'exclame Assagioli.
Pour lui, la peur est une des causes majeures de la souffrance et des erreurs de conduite dans nos sociétés !
Il parle de la peur "aiguë et concentrée" dont les manifestations sont :
- l’anxiété,
- l'angoisse
- et les tensions psycho-physiques,
tout en voyant l’anxiété comme « une forme aiguë et 'concentrée' de la peur, et en remarquant qu’elle est presque toujours accompagnée d'angoisse, de contraintes (douleurs) psychophysique.
« L'asthme, comme toutes les maladies pulmonaires sont un indice d'un dysfonctionnement, d'une sclérose qui affecte le cœur, en soi, il y a quelques choses en vous, qui sont en colères mais qui ne s'expriment pas. Alors votre corps holistique (corps, âme, esprit) exprime une quinte de toux, une crise jusqu'à ce qu'un jour, comme pour moi, je comprends mon traumatisme et que mes besoins familiaux n'étaient pas respectés ni comblés parce que mon être, à six ans, mon enfant (intérieur) ne pouvaient pas affirmer que quelques choses en moi étaient malheureuses dans ma famille de naissance. »
Eddy Vonck
« Un petit enfant ne peut pas comprendre que son papa est violent avec lui et sa famille, si en plus son papa ordonne et le petit enfant que j'étais, obéissais inconsciemment, le risque est qu'à l'âge adulte, l'enfant n'aura appris que la violence et le non-amour de ses parents et privilégiera une obéissance presque aveugle comprenant plus tard tous les ordres de la société civile ! »
Eddy Vonck
Il s’agit alors de « formes morbides de la peur ».
Assagioli compare cette peur à un "smog" qui envahit la psyché et à un "virus" par rapport auquel nous devons nous désidentifier sous peine des pires ravages intérieurs.
Tout en commençant pour admettre la réalité d'une telle expérience, mais il avertit :
« Ne vous identifiez pas avec la peur; ne la supprimez pas. Surtout, n'ayez pas peur de la peur ! »
Au lieu de combattre la peur, il faut bien la reconnaître et, en plus, l’accueillir, tant qu’elle subsiste, comme un instrument qui perce la personnalité et donne l’accès aux bas-fonds de notre existence !
C’est en passant par la peur que l’on arrive à la surmonter !
La pratique bouddhiste du Tonglen apprend à maîtriser la peur tout en lui manifestant notre estime. Il y a un appel à notre propre vulnérabilité et au fait de l’inter-vulnérabilité !
Assagioli considère la peur comme étant essentiellement une réaction de défense, souvent inadéquate et à effet contraire, de l’instinct de conservation, non exclusivement biologique, mais aussi de la sous-personnalité qui se sent menacée !
Alors, c’est nécessaire de découvrir quelle est la sous-personnalité qui a peur et de quoi ? Et ainsi on pourra la dissoudre graduellement.
Il distingue la « forme morbide de la peur de la “peur ordinaire” d’origine soit innée soit acquise !
Celle-ci tend à tuer la volonté et à paralyser l’action.
Roberto Assagioli y voit « un poison largement répandu » et « la cause principale de la souffrance humaine » comparée à une sorte de paralysie qui arrête le pied du voyageur, à qui ont lui enlève les forces et le courage d'avancer !
La peur panique risque effectivement d’étouffer la volonté et de paralyser parfois la mise en action !
Assagioli croit que la peur est vraiment l'émotion la plus répandue.
Pour moi, la peur peut être subliminale et dangereuse et traumatisante si on ne la conscientise pas ! Notre société moderne en perpétuelle crises économiques et de guerres programmées par nos élites, est le pire crime contre notre humanité ! Ces dominants-là ont des intérêts que nous restons des humains peureux ou et vulnérables qui obéissent aveuglement à des doctrines devenues dictatures. Osez dire le terme "dictature" en ce bas monde, il faut du courage pour le crier haut et fort aux autres citoyens. Moi, j'ai choisis mon camps, c'est la conscience d'observation dualiste des ombres et de la lumière qui font duel en quelques choses en moi qui ne vous souhaite qu'une chose : la paix uni vers elle - vers Nous Tous, Humains et Citoyens de la Terre et du Monde ! Pour cela, l'enjeu sera une nouvelle démocratie à reconstruire autrement. Nous vivons pour certains et certaines ce traumatisme (maux) collectif en essayant de comprendre (conscientiser) ces mécanismes de haines, de guerres, de conflits... par la conscience.
Eddy Vonck
Tout en y voyant un facteur de désintégration de la personnalité et un des obstacles au progrès spirituel, Assagioli considère que la libération de la peur est fondamentale, puisque seulement qui s'est libéré de la peur devient vraiment libre.
Cette liberté, incompatible avec la peur névrotique, va de pair avec ce que l’on considère la peur saine à mieux dire la prudence face aux dangers réels qu’il faut bien craindre et donc éviter et essayer d’éliminer.
Celle-ci provient de l’instinct de conservation.
C’est le rejet de la peur qui nous fait tomber dans le cercle vicieux d’avoir peur de la peur.
Pour s’en sortir, il faut bien reconnaître, voire aimer la peur en tant que dynamisme et partie de nous-mêmes faisant appel
- à l’acceptation,
- à la transformation
- et à l’intégration !
Moins on accepte la peur, plus il y a un besoin exagéré de commande qui conduit au fracas et à la panique. Celle-ci est Pan, associé à Phobos, deux divinités de la mythologie grecque.
Nous sommes tous concernés par la présence de la force émotive et sentimentale.
Il s’agit d’un domaine qui met en évidence notre vulnérabilité, aussi bien que notre potentialité.
Souvent les gens tombent dans l'attitude erronée d'y voir une faiblesse et d'en avoir peur,
- faisant semblant de l'ignorer,
- ou alors cherchant à s'en débarrasser,
sans se rendre compte que l’on est ainsi en train de s'identifier à ce que l’on méprise !
Tout à fait au contraire, Assagioli prône pour l’accueil des émotions et croit qu'il faut les sentir intensément !
Il y a lieu pour un processus qui se prête autant à l’évolution qu’à l’involution, dont l’importance de l’éducation de la fonction psychologique émotion-sentiment.
C’est à remarquer donc qu’il ne s’agit pas de sentir tout court, mais de le faire de façon consciente et contrôlée.
Le soi-disant ‘sang froid’ peut alors signifier la maîtrise d’un potentiel d’abord accepté, identifié et bien utilisé.
En effet, remarque Assagioli : les passions à l'état naturel sont comme des torrents et des fleuves à la fois bénéfiques et néfastes.
Leur utilisation par la volonté est très insuffisante !
L’expérience mystique représente le sommet de la vie émotive qui atteint le niveau transpersonnel.
Il est important d’identifier non seulement ce qui nous arrive, mais aussi quels sont nos sentiments face aux événements. Le vrai courage est compatible avec la peur !
La force de la personnalité ne peut jamais nier un
point faible quelconque, le talon d’Achille toujours exposé.
Il n’y est pas question de nier l’insécurité ni de mépriser l’effroi que l’on peut sentir.
Il s’agit de l’affrontement de la situation avec confiance en soi, tout en invoquant la sérénité du Soi.
Assagioli fait voir comment la peur existe avant tout dans l’entité physique :
c’est l’instinct de conservation biologique qui s’accroche désespéramment à la vie et, en tant que tel, il y a une fonction utile.
Pour contrecarrer ce sens d’insécurité, il conseille d’avoir
toujours présent le principe fondamental que le Soi n’a pas peur !
À l’image de la mer, il est propre au moi superficiel de s’agiter dans la panique, mais au niveau du Moi profond, le Soi, il y a la sérénité permanente caractérisée par :
- l’empathie,
- la bienveillance,
- la solidarité
- et l’amour inconditionnel
qui écartent la crainte et l’hostilité. À ce niveau, nous sommes tous courageux et libres de la peur panique caractérisée par la terreur.
Tel que mentionné plus haut, Robert Desoille a mis en évidence les frustrations généralisées provenant de ce qu'il appelle "la répression du sublime".
Abraham Maslow inclut dans sa psychologie la notion de "complexe de Jonas", signifiant la peur panique de l'être humain devant la grandeur de ses possibilités et de sa mission, et qui cherche à se soustraire à la responsabilité personnelle face aux appels de son âme.
Au niveau du Soi, il peut avoir une sorte de crainte face au sublime.
Cette crainte est plutôt une réaction humblement respectueuse.
Maslow parle alors de “peur agréable” lorsqu’il tient compte de ce sentiment face aux expériences paroxystiques.
Il s’agit plutôt d’un sentiment d’humilité.
L’évocation du Soi favorise la sérénité et la confiance.
Tout en caractérisant le Soi de « spectateur détaché et souriant », Assagioli évoque la figure du Bouddha avec son sourire plein de compassion, un sourire né de la certitude que la voie du salut existe, et que tous les individus du genre humain, tôt ou tard, atteindront la libération et la béatitude.
Une autre émotion difficile à comprendre et dure d’accepter c’est la colère !
Désignée autrefois une “courte folie”, elle ne contient pas nécessairement un aspect négatif, tout en étant une réaction normale y considérant la correspondance et la juste proportion entre cause et effet.
Le sentiment de rage est tout à fait normal comme élément informatif ! Il demande de s’exprimer en tristesse et sans représailles, conduisant ainsi au soulagement.
Une fois refoulé, il y a la dramatisation reliée à l’agressivité qui se traduit en colère qui implique (parfois) de la vengeance. Il y a alors un manque de maîtrise de soi, fruit d'un paroxysme émotionnel où les autres facultés restent éclipsées, ou alors dominées de façon à justifier l'état émotionnel.
Le refus d’une émotion ne fait que l’aggraver.
Cela rend difficile le processus de désidentification et auto-identification, et empêche, par la voie de conséquence, l’intégration ( la reconnaissance en soi ) de l’émotion ressentie.
Lorsqu'il y a des manifestations désagréables à caractère émotif, il est recommandable d'appliquer la technique de l’acceptation, consistant celle-ci à créer un nouveau canal différent de l'énergie éveillée, tout en leur dispensant d’abord le soin d’un accueil empathique !
Chaque émotion constitue autant une manifestation de notre intimité que l’invitation a un abord intimement respectueux.
L’enseignement tantrique fait appel à la colère sans haine celle du vajrayana (adamantine) dont la teneur dynamique est à la fois invincible et accueillante.
Il y a une invitation à la transmutation de l’énergie qui passe par l’observation de nous-mêmes, en termes de désidentification, voire d’humour par rapport à nos sentiments et nos réactions.
Il s’agit de l’accueil bienveillant qui s’oppose à toute forme de refoulement. Chögyman Trungpa remarque :
« Nous sommes agressifs envers nos émotions, nous essayons d’atteindre la paix ou la bonté par la force. Une fois que nous cessons d’être agressifs envers nos émotions, d’essayer de les changer, une fois que nous en avons une expérience correcte, alors la transmutation peu prendre place. »
L’émotion est fondamentalement une information d’abord sur nous-mêmes. Elle mérite toujours l’accueil et le respect !
Le monde des émotions est souvent instable et contradictoire.
William James observe :
« Parfois aucun état émotionnel est souverain, mais plusieurs se mêlent ensemble contrairement les uns aux autres. Dans le cas échéant, on entend tous les deux, les ‘oui’ et les ‘non’, et alors la ‘volonté’ y est appelée pour résoudre le conflit.»
Une bonne intervention de la volonté ne doit rien avoir de combatif ou de dépréciatif.
Le mot grec apatheia a été souvent traduit et utilisé dans le sens d'indifférence et supériorité face aux émotions, ce qui n’est pas non plus la voie recommandable !
Il doit désigner plutôt le détachement, c’est-à-dire la désidentification par rapport à nos émotions.
Un tel détachement n’a rien à voir avec la philosophie stoïcienne qui donne aux émotions une connotation foncièrement négative. L’apathie en tant qu’indifférence engendre la cruauté et constitue une défense par rapport à l’anxiété.
Rejeter notre vulnérabilité c'est détruire notre intégrité !
Nier notre fragilité c'est augmenter nos défenses. Souvent la vie émotive est perçue comme un dérèglement à éviter ou à déguiser !
L’accueil des émotions devient l’attitude fondamentale pour bien les apprécier, les intégrer.
Seulement une volonté accueillante réussit d’apaiser les émotions et sentiments qui s’entrechoquent au niveau du moi personnel.
La plupart de l'humanité semble dominée par la vie émotionnelle, soit elle est caractérisée par un feu sacré, par le mirage des illusions, ou par un conflit entre sentiment et raison. Dans la lutte éternelle contre la raison, le sentiment n’a jamais été vaincu, remarque Gustave Le Bon.
En tant que potentiel humain, il est fort digne de considération. Il y a un danger lorsqu’on est aux prises des jugements portant à les sous estimer.
On doit cependant tenir compte, dans le domaine des émotions-sentiments des attitudes à caractère négatif, comme :
- l'indifférence,
- la jalousie,
- l'intolérance,
- le fanatisme,
- l'orgueil,
- la gêne.
Celle-ci se manifeste souvent dès la première enfance reliée à une image moins positive et manque de confiance en soi-même.
C’est tout une autre chose un malaise ressenti, une fois allié au sens bien fondé de la propre culpabilité, laquelle devient négative une fois refoulée ou rendue obsessive.
Pour le cas échéant, Assagioli fait voir que la solution consiste dans l’acceptation de nos propres imperfections et dans la reconnaissance que toute l’erreur et même le crime peuvent être réparés, neutralisés par le biais d’actions et de comportements contraires.
Ce sont les situations conflictuelles qui conduisent souvent le monde émotif dans une situation chaotique d'ambivalence, de doute, de scrupule, de phobie et de refoulement...
De pair avec les instincts refoulés, les conflits jouent aussi un rôle important en rapport à l'étiologie des troubles physiques, comme l'asthme, l'artériosclérose, l'eczéma, etc..
Malheureusement il y a bien des préjugés au sujet de la vie émotive qui conduisent au mépris, au reproche et au refoulement des énergies lesquelles, au lieu d'être appliquées de façon constructive, se déforment à l'intérieur de la personnalité opprimée.
Un tel refoulement peut atteindre la pathologie d’un blocage émotif désigné alexitymia, caractérisée par l’incapacité d’exprimer ses propres sentiments !
Les émotions semblent souvent s’exprimer hors et contre la raison, d’où l’appel à la dyade rationnel-émotif.
La raison peut donc apporter une forte contribution, pourvu qu’elle ne dépasse pas ses limites et s’abstienne de rationaliser la vie émotive.
Une telle contribution provient d’un accueil bienveillant relié au processus de désidentification, plutôt que d’un contrôle rationnel tel que parfois compris et adopté, faisant l’abstraction de l’intuition, voire en niant même cette fonction, de même que le Soi.
C’est là la tentation d’adopter la rationalisation comme le pivot magique qui prétend de maîtriser la vie émotive.
On peut remarquer avec Martha Crampton que
« les approches comme la psychanalyse, l’analyse transactionnelle et la thérapie Rogerienne mettent l’accent sur le lien mental émotionnel; d’autres comme la Gestalt, la bioénergétique et la thérapie primale utilisent principalement le lien entre le corps et les émotions. »
L’originalité de la psychosynthèse dans l’utilisation éventuelle des techniques mentionnées consiste dans le fait d’y privilégier le rapport de chacun de ces éléments avec le centre de la conscience aux niveaux soit personnel soit transpersonnel !
Bien du monde se sent mal à l’aise avec ses émotions tout en ayant le sentiment de ne pas les exprimer adéquatement.
Il peut y avoir soit une atrophie² de la fonction émotive, soit tout simplement une difficulté de la verbaliser.
²un étouffement
La complexité de la vie émotive se prête à embarras et peut porter regrettablement à mettre de côté sa propre richesse, et de mépriser l’émotivité en la considérant comme une sorte de faiblesse.
Pourtant la vie émotive a un rôle important à jouer dans le processus psychosynthétique individuel et social.
Il s’agit d’un potentiel immense qu’il faut maîtriser tout en évitant cependant la tendance à généraliser, et absolutiser ces états d’âme qui sont effectivement subjectifs et transitoires.
C’est à noter, avec Assagioli, que
« tout sentiment ou émotion pénible éveille le désir et le besoin d’en éliminer la cause. En contrepartie, les émotions heureuses et agréables invitent à perpétuer ce qui les produit. »
Toutes ses forces forment un réservoir de manifestations de l'énergie psychologique !
Celle-ci, comme n'importe quelle énergie, constitue un potentiel moralement neutre.
Il appartient à la volonté d'en faire l'utilisation convenable, et d'abord de la reconnaître.
Il s’agit ainsi des énergies à identifier, à cultiver, à actualiser, parfois à transformer et à sublimer, mais jamais à refouler.
Le fait de les ignorer, de les exclure ou de les réprimer devient source de manifestations pathologiques et un véritable obstacle à l'épanouissement psychologique.
Une des manifestations la plus commune et normale est celle des larmes fruit autant de la joie que de la peine !
Assagioli est d'avis que la plupart des troubles nerveux sont reliés à des situations émotives violentes provenant de conflits entre tendances opposées, souvent entre vie intérieure et vie extérieure.
Il propose donc un traitement éducatif à caractère psycho-spirituel qui tient compte en même temps des fonctions psychologiques et de l'éveil des énergies de l'âme.
Tout au début de sa carrière professionnelle, il proposait à cet égard l'éducation par la maîtrise et jamais par la répression :
« Les émotions et les sentiments sont effectivement les idées-forces les plus puissantes et aussi les plus dangereuses; alors, il est inutile d'insister sur l'importance capitale de les contrôler et de les cultiver. »
Il est aussi dangereux de nier les émotions que d'en être esclave !
Pour le fondateur de la psychosynthèse, sentir une émotion signifie plus que la subir; d'où l'avertissement:
« Tu ne dois pas suivre tes émotions [...]. Ce sont tes émotions qui doivent te suivre. »
Loin donc de concevoir l’émotion comme une fonction spontanée hors de l’hypothèse de contrôle, Assagioli croit au besoin et possibilité d'une maîtrise dans ce domaine.
Un premier pas pour y arriver c’est la désidentification, comme remarque Nella Assagioli Ciapetti, son épouse :
«Nous devons apprendre à nous distancier de nos émotions et de nos expériences, y incluant celles qui sont à caractère spirituel. »
Il n'est pas question d’un éloignement à proprement dire, mais plutôt d’un rapprochement vers le Soi, et la source de la sérénité.
Tel que référé, les émotions-sentiments sont dotés d'un potentiel énergétique qui tend à s'exprimer et à se répandre !
Assagioli classifie ce potentiel de "contagieux" !
Lorsqu'il y a un conflit d'expression entre les états affectives, le plus fort tend à dominer aux dépens des plus faibles.
Pris par la force d'une émotion ou d'un sentiment, nous sommes tentés de nous identifier à l'ébranchement expérimenté et d'oublier ainsi, en les réprimant, toutes les autres expériences affectives.
Certes, comme remarque Piero Ferrucci,
« le fait est qu’il devient dangereux de suivre sans discrimination nos émotions comme si elles étaient des oracles.” Mais, d’un autre côté, nous ne devons pas non plus les nier parce que cela refoulerait une dimension précieuse de notre être. »
« Il nous faut alors trouver la bonne perspective, celle du Soi transpersonnel ce qui nous permet alors de voir un sentiment particulier dans sa dimension réelle. Nous pouvons ainsi constater que les émotions et les sentiments sont les ingrédients nécessaires de la vie de chacun: ils sont la source inépuisable de la joie, ils facilitent la communication, ils ajoutent la couleur à tout ce que nous faisons; ils vivifient nos idées et font intensifier l’activité intuitive. »
Telle est la perspective de l’approche psychosynthétique axée sur le centre de la conscience autant au niveau du moi personnel que du Soi transpersonnel.
L’insécurité et l’anxiété vont de pair et deviennent un obstacle à l’épanouissement et à la créativité.
Elles traduisent un état de mise en garde et représentent un manque d’identification avec le Soi transpersonnel, donnant lieu à une vraie coupure avec soi-même et les autres.
La lutte contre les émotions est toujours déconseillée.
Leur accueil devient condition pour ouvrir un canal permettant la décompression de l’énergie et la possibilité de son utilisation en termes de créativité.
Pour maîtriser les émotions, il est fondamental de les reconnaître et de les distinguer de nous-mêmes !
Il y a donc toute une dynamique reliée autant au drame qu’à la dédramatisation.
Le détachement n'a rien à voir avec l'indifférence et l'opposition n'est pas du tout un rejet.
Accueillir les sentiments sans les juger est un signe de maturité.
Un sentiment fondamental c’est la compassion, laquelle, tout loin d'un simple sentiment de pitié, provient en même temps d’une co-identification existentielle et de la conscience d’une (un besoin) harmonie essentielle.
On comprend alors pourquoi Alberti conçoit le sentiment comme :
« l’expression de la liberté de l’âme », au point d’y voir
« l’essence et la voix de l’âme humaine. »
L’émotion la plus fondamentale et satisfaisante est celle d’être en contact intime avec soi-même, c’est-à-dire : de vivre l’expérience de l’auto- identification qui mène à la co identification avec tout et tous.
La fonction émotion-sentiment nous rend conscients du rapport étroit entre la vie extérieure et la vie intérieure, souvent marqué par des conflits entre l'une et l'autre.
Le monde des émotions et sentiments est plein de manifestations et potentialités, mais la grande majorité des gens semblent à leur merci.
Les domaines émotionnel et sentimental se prêtent aisément autant à des pratiques idolâtres qu’à des exploitations (humaines), soient-elles d’ordre politique, pseudo religieux (sectaires), sportif ou autre...
Pour éviter que l’on soit à la prise de nos émotions et nos sentiments, Assagioli propose l’exercice de désidentification du moi par rapport aux états psychologiques toujours changeants, tout en pouvant utiliser d’abord la formule devenue classique en psychosynthèse :
« J’ai une vie affective, mais je ne suis pas mes émotions, ni mes sentiments ! »
Il y aura encore un pas en avant, dans le sens d’y observer une manifestation de notre identité qui mise sur l’intégration.
Au lieu de subir nos émotions et nos sentiments, il devient passionnant de les mettre au service d'un idéal dans lequel ils ont non seulement leur place mais aussi un rôle effectif.
Parmi les états supérieurs des états émotifs, Assagioli mentionne :
- l'idéalisme,
- l'esprit de sacrifice,
- la générosité,
- le courage et l'audace,
aussi bien que :
- l'appréciation de la beauté, la contemplation,
- le sens de l'honneur.
Plus que de mettre l’accent sur les sentiments négatifs comme :
- l’orgueil,
- l’avarice,
- la jalousie,
il devient alors important de découvrir et de cultiver les vertus opposées de l’humilité, de la générosité et de la magnanimité.
La fonction émotion est d'abord et avant tout une expérience de la rencontre avec nous-mêmes.
Accueillir l’émotion sans la juger est un signe de maturité. La compassion y est le sentiment le plus fondamental.
Bien plus qu'un simple sentiment de pitié, celle-ci signifie la conviction profonde de l’harmonie essentielle.
Le sentiment d’être quelqu’un est plus fondamental que celui de sentir ou d'imaginer quelque chose.
Il conviendra d’insister sur le fait que l’émotion la plus significative est celle d’être en contact intime avec soi-même, c’est-à-dire de vivre l’expérience profonde de l’auto- identification.
Le sentiment d’être quelqu’un est plus fondamental que celui de sentir quelque chose. L’extase y représente le comble de la vie émotive expérimentée au niveau transpersonnel.
2.3 Impulsion
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
La fonction impulsion est constituée par ce que l’on nomme aussi les “ forces vitales ”, distinctes de que l’on a désigné les “ forces aveugles ” existantes dans la nature dite inanimée, telles que l’électricité et l'énergie atomique.
Il s'agit d'énergies biopsychiques, effectivement mal identifiées et dont on ne connaît pas encore ni la nature exacte ni même le nombre.
Au sens le plus large, on partage cette fonction avec tous les êtres vivants y incluant le royaume végétal dans la mesure où il y a des tendances à conserver et à exprimer la propre vitalité.
Par rapport à l’être humain, il y a un caractère ormique, qui regroupe toutes les énergies biopsychiques invitant à l'action, lequel se trouve identifié sous les noms :
- d’attraction,
- de répulsion,
- de tendance,
- d'instinct,
- d'aspiration
- et d'inspiration.
On peut alors parler de pulsions ou impulsions ordinairement considérées comme des tendances ou des réactions biopsychiques en rapport avec quelque chose ou quelqu'un.
Faisant usage d'un terme anglais, on les nomme souvent des "drives" biopsychiques .
Assagioli voit dans les impulsions ou instincts des tendances spontanées qui nous mobilisent ou qui tendent à le faire.
Les termes ‘impulsion’ et 'instinct' portent chez lui une signification plus ou moins synonyme :
« Nous pouvons appeler instinctives les impulsions, les actes, les tendances, les réactions qui éclatent de notre inconscient hors l’action de la volonté, et parfois contre celle-ci. »
Il tient compte de cinq instincts fondamentaux :
- L’instinct de conservation,
- l’instinct de reproduction,
- l’instinct grégaire ou social,
- l’instinct d’auto-affirmation,
- et l’instinct de connaissance.
La classification de l'agressivité comme sixième instinct reste une question controversée .
De toute façon, on doit considérer à l’intérieur de l’impulsion autant l’attraction que la répulsion.
C’est ainsi que Abraham Maslow tient compte :
- de la “pulsion de refus”
- et de la “pulsion d’acceptation.”
Il y a des pulsions à tous les niveaux tant de la conscience que de l’inconscient, et elles se trouvent en rapport avec toutes les autres fonctions vitales.
Les pulsions ou impulsions biopsychiques de teneur sensorielle sont en relation directe avec les besoins physiologiques et l'instinct de sécurité.
Elles semblent avoir leurs racines surtout au niveau de
l'inconscient inférieur.
La philosophie orientale place leur siège à la hauteur des trois premiers ‘chakras’, les centres d’énergie situés au niveau inférieur du tronc.
Quelles que soient ces énergies, il y a lieu de les utiliser ou de transformer, mais jamais on peut les éliminer.
Souvent, les instincts sont considérés primitifs et classés d'inférieurs, quelque chose que l’être humain a en commun avec les animaux.
Henri Bergson soutient que l’instinct est une forme préalable de l’intelligence.
Assagioli tient compte d’une sorte d'énergie à l'état sauvage :
« Il existe en nous tous, des éléments inférieurs à caractère instinctif que nous devons connaître et maîtriser sans nous laisser perturber et troubler. Leur existence ne constitue pas en elle-même un 'mal'; l'important c'est de les reconnaître et d'en faire un usage digne. »
Toutefois, comme il remarque :
« l'instinct n'est 'bon' ni 'mauvais' en soi.»
À son avis, il serait alors un contresens de chasser ou de réprimer n’importe quel instinct :
« Les instincts, les passions et les habitudes que nous essayons de maîtriser résistent ordinairement à nos efforts et échappent facilement à notre contrôle en se cachant dans l'obscurité de l'inconscient d'où ils s'insinuent subtilement en nous ou nous prennent de surprise par assaut violent ! »
En fait, la force attractive ou répulsive de l’instinct qui demande notre attention ne constitue jamais une imposition. Il y a une énergie qui nous confronte avec nous-mêmes.
Les désirs appartiennent au domaine des impulsions à caractère plus ou moins conscient.
Il y a tout un rang de manifestations au niveau des désirs.
Lorsqu'on parle de désir, on pense ordinairement à une attraction en vue d'une possession et jouissance, mais il peut aussi traduire soit l’amour altruiste soit le souhait du mal, ou encore tout simplement la tendance à avouer quelque chose ou à quelqu'un.
Tandis que chez Freud se confondent l'instinct de conservation physique en réaction contre la mort et la tendance à détruire et à tuer !
Chez Assagioli il y a une vraie distinction. Il définit le désir comme : " une force dynamique qui pousse à l'action ".
Selon lui :
« tous les besoins évoquent des pulsions tendant à les satisfaire ! »
Pourtant, une distinction doit être faite entre 'besoins' et 'désirs'.
Ceux-ci, malgré leur dynamisme qui pousse à l’action, ne correspondent pas toujours à de vrais besoins !
Faire disparaître les désirs n’est ni souhaitable ni possible !
L’idée de tuer les désirs doit être comprise métaphoriquement au sens les apaiser, de même qu’on ne tue la faim que l’on apaise, sans pourtant se dispenser d’un bon critère concernant la nourriture choisie, et sans condamner l’appétit.
Ils constituent effectivement des expressions de notre vitalité, faisant appel à un accueil bienveillant.
Alors, si l’on ne peut pas tuer le désir, que l’on ne doit pas ignorer, il nous reste la possibilité de l’accueillir, et alors de le transformer, s’il en est le cas, tout en lui offrant une attraction supérieure.
Plus qu’une réalité à constater et que l’on doit accepter, le désir est là pour être cultivé et intégré jusqu’au niveau transpersonnel.
Au niveau du Soi, le désir individuel n’est plus en compétition avec le désir des autres.
Au comble de la réalisation, la béatitude ou nirvana, la flamme du désir n’est plus nécessaire et s’éteint.
Prendre indistinctement ses désirs pour des besoins à satisfaire est une erreur. Il y a place ici pour un discernement qui peut être facilité par l'exercice de désidentification et par le rôle de la volonté qui doit accueillir et satisfaire ou sublimer les désirs, sans jamais les rejeter ni les refouler.
Ils sont à la fois fruit et source d’énergie faisant appel à être utilisée mais jamais gaspillée !
Bien souvent, le désir et la volonté se trouvent en conflit !
« nous devons considérer la volonté non comme un refus du désir, mais comme une incorporation du désir à un niveau de conscience plus élève. » Rollo May
La volonté donne au désir l'orientation, la liberté et la maturité. Si quelqu'un possède le désir sans la volonté, il est un être humain poussé et tiraillé, non libre, infantile; devenu adulte, et peut devenir homme-robot. Rollo May
Les désirs nous donnent conscience de nos limitations, aussi bien que de nos possibilités vers leur dépassement.
Il y a non seulement la tendance, mais aussi l’exigence d'expression, sous peine de refoulement donnant lieu à des troubles autant psychiques que physiques.
Freud y voit la naissance et prédominance du ‘surmoi’ sur le ‘moi’.
Toutefois, il devient important d’y choisir l’expression adéquate et, en partant, de faire la distinction entre désirer et vouloir !
Le désir en soi n'implique aucun engagement, tandis que l'acte volitif s'attache à un choix ou décision, tout en prêtant attention aux motivations qui nous impulsent à agir, faute de quoi l’on resterait à la merci de nos impulsions.
La répression qui donne lieu à l’inhibition est une impulsion restrictive à caractère négatif.
Ce n’est pas la même chose désirer et aimer !
L’amour exclu toute forme de désir possessif.
En effet, ce n’est pas le désir comme tel que l’on doit éviter, mais l’attachement au résultat allié au désir.
Au niveau de la personnalité, le désir fait appel à l’alignement avec le Soi transpersonnel, source de l’abondance et royaume où la volonté et l’amour se fondent.
Assagioli remarque :
« Ceux qui ont une conception rigidement dualiste et
séparatiste considèrent les instincts et les passions comme étant quelque chose fondamentalement mauvaise et impure et ils tendent donc à les considérer avec horreur, faisant tout effort pour les réprimer et supprimer. Mais cette attitude donne lieu à des graves inconvénients. L'observation
psychologique prouve comment les forces vivantes qui existent en nous ne peuvent pas être supprimées, ni tuées. C’est seulement par l’emploi de méthodes répressives d’intensité équivalente que l’on peut empêcher leurs
manifestations extérieures et les paralyser, mais une telle inhibition forcée ne constitue pas une solution adéquate et satisfaisante. Elle exige un grand gaspillage d'énergie qui épuise et déprime les autres activités, en donnant lieu à une forte tension intérieure qui peut donner origine des crises ou
troubles autant nerveux que psychiques. »
La règle d'or est la maîtrise sans refoulement. Il y a alors de la place pour l'expression de l'énergie identifiée ou éveillée, une fois transmutée et sublimée.
L'impulsion se rapporte habituellement à la vie instinctive bio- psychologique, au niveau de la conscience prélogique, et elle se trouve reliée à des comportements parfois violents !
Cela peut porter à croire qu'il s'agit d'une fonction psychologique primitive à caractère uniquement rudimentaire !
Effectivement toutes les fonctions psychologiques peuvent se trouver et manifester en rapport avec des états de conscience plus ou moins élémentaire, y incluant des situations régressives.
En réalité les impulsions considérées inférieures, peuvent atteindre les plus hauts niveaux d'expression reliés à une conscience fort éclairée.
Au lieu de parler d’impulsions ou d’instincts primitifs, il est préférable de les considérer comme de la matière première faisant appel à la transformation !
Par le fait de reconnaître le caractère spontané de nos pulsions, on ne veut pas dire que la volonté ne puisse pas être effective lors des manifestations instinctives.
Celles-ci comprennent et tendent à se manifester dans toutes les dimensions de l’humain, dès les réactions hormonales jusqu’à l’instinct spirituel. On ne doit pas confondre ces tendances à l’expression avec l'acte volitif.
Il s'agit de deux fonctions psychologiques dont Assagioli souligne la différence, tout en notant cependant que l'équilibre psychologique s'opère par une sorte de contrat permanent entre l'une et l'autre.
Chez l’être humain, l’impulsion-désir concerne directement la vie instinctive présente à tous les niveaux de l'inconscient et dont l'inconscient moyen est ordinairement, mais pas toujours la première porte d'accès.
On peut y voir la généralisation d’une réaction négative pour ce qui concerne les instincts, donnant lieu, une fois maintenue, à un processus régressif vraiment regrettable.
La théorie pavlovienne des réflexes conditionnés véhicule une conception de la vie qui tend à réduire les pulsions instinctives à des tropismes mécanistes soumis au binôme stimulus-réaction.
Il y a certainement des vrais conditionnements à considérer, mais sans jamais oublier le libre-arbitre et l'intervention de la volonté.
L’opposé de l’impulsion : l’incitation ou l'excitation, ou dans d'autres termes : l’inhibition où les stimulations sont contrôlées par les préjugés, et surtout par la peur qui engendre la difficulté et de la méfiance !
Cela peut se manifester en termes d’opposition à la nature instinctuelle.
Il y a alors de la résistance qui mène (parfois) au refoulement qui engendre des tensions face aux manifestations pulsionnelles.
« Refouler une impulsion, c’est la condamner ! » Exprime Roberto Assagioli
Dans la mesure où le désir est refoulé, il n’existe plus comme tel au niveau conscient et la volonté de le combler disparaît, tout en donnant place à de la répression à teneur névrotique.
Lorsque la volonté se soumet au désir, il a les comportements compulsifs d’ordre instinctuel qui peuvent aller aussi jusqu’à la névrose obsessionnelle.
Que conseiller face aux instincts ?
Assagioli prône pour une expression modérée et harmonieuse, fruit de leur transformation et de leur sublimation, particulièrement en ce qui concerne les instincts combatifs !
C’est à noter qu’il peut y avoir un mécanisme de refoulement dans la rationalisation des impulsions instinctives, lorsqu'il y a un sophisme mental masqué par l'illusion d'une victoire de la raison. C'est un mécanisme de défense utilisé dans la structure d'un symptôme psychopathologique porté à nier et refouler les instincts au lieu de les accepter.
Ce que l’on vient de dire se trouve en rapport avec la loi psychologique suivante présentée plus loin dans le chapitre consacré à la volonté :
« Les instincts, les impulsions, les désirs et les émotions tendent à s’exprimer et demandent que leur expression ! »
Les énergies du supraconscient peuvent descendre et éveiller les impulsions les plus élémentaires qui sont encore endormies, tout en donnant lieu à des situation conflictuelles, en absence de leur maîtrise.
Assagioli tient compte d'une loi psychodynamique selon laquelle :
« les impulsions, les besoins, les mobiles et les désirs tendent à soulever les images, les idées et les émotions correspondantes ! »
Il y a une interaction apte à la créativité, mais aussi la possibilité du conflit et d'un esclavage**. (**routines, une mauvaise habitude par exemple.)
Assagioli souligne en particulier le danger de la rationalisation accompagnée de "pseudo-raisons", face auxquelles doivent intervenir le discernement et la volonté !
Il tient compte aussi de la « fascination de l'horreur » en provenance « l'attraction vers les bas-fonds » des aspects et manifestations instinctuelles de la nature humaine à l’état primitif, attraction qu’il considère clairement révélée dans la diffusion des écrits, des films et des spectacles qui expriment la violence avec des états/ scènes morbides.
Tout en admettant le besoin d'explorer les bas-fonds de l'inconscient et de laisser ses éléments affleurer à la conscience, Assagioli considère une erreur d'arrêter le processus à ce niveau de l'analyse psychologique sans le contrecarrer avec des aspects supérieurs qui donnent lieu à ce qu’Hermann Keyserling nomme l‘irruption de l'Esprit !
Ces aspects supérieures il les voit parmi les impulsions, désirs et aspirations les plus élevés, reconnus par de nombreux psychologues, tout en y considérant :
« l'impulsion de l'expression de soi; le besoin de connaître ou comprendre le sens de la vie; l'amour dans ses aspects les plus hauts de compassion et d'altruisme; l'aspiration de communion avec des réalités plus larges et plus élevés; la prise de conscience et expression de valeurs supérieures de nature éthique, esthétique et religieuse. »
La psychosynthèse postule l'existence d'une catégorie d'instincts supérieurs qui ne sont pas seulement le fruit de la sublimation des instincts inférieurs.
Ces instincts supérieurs sont considérés par Assagioli, lorsqu'il tient compte de l'instinct de transcendance.
Il y considère aussi le danger de leur refoulement : Il y a une répression claire des impulsions supérieures qui est tout à fait semblable à celle des instincts inférieurs découverts par la
psychanalyse.
Il fait encore la remarque suivante :
« Les hommes ont peur du sublime, parce qu'ils ne le connaissent pas; s'ils admettaient la réalité de valeurs supérieures, ils seraient tenus de se conduire plus noblement ! »
« l'impulsion vers le sublime exige de nous l'intérêt pour les autres, le besoin de communiquer avec eux à travers le meilleur de nous-mêmes, tout en trouvant notre satisfaction la plus profonde dans le service rendu. » observe Frank Haronian.
Il y est alors question d’identifier et de donner suite au désir altruiste !
Dans l'éducation de la fonction impulsion, la volonté joue un rôle capital.
En plus de la reconnaissance de nos tendances spontanées, elle est appelée à les maîtriser et à les conduire vers un but qui les valorise.
C’est toutefois l'amour qui catalyse et qui porte au sommet du vrai sens toutes les impulsions, désirs, tendances, aspirations et inspirations de l'être humain.
L'amour vrai est le fruit de tous ces éléments sublimés.
Puisque l'impulsion peut provenir autant des instincts élémentaires que des instincts supérieurs, il tient compte de ce qu'il appelle "l'action inspirée" provenant du Soi transpersonnel en tant qu'impulsion déterminante d'action et de communication !
La psychosynthèse propose une dynamique évolutive qui peut conduire, dans les domaines de l’impulsion, n'importe quelle énergie biopsychique à une vraie floraison de l'esprit !
2.4 Imagination
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Il y a une sorte de culte de l’imagination déjà dans les civilisations anciennes, soit en Orient (en Chine et aux Indes), soit en Occident (Égypte et Grèce).
Déjà Platon et les néo-platoniciens, tels que Plotin, se sont particulièrement intéressés à l'imagination ou fantaisie.
L’on trouve chez les tribus amérindiennes des techniques ancestrales à teneur chamanique reliées à l’évocation symbolique de l’animal totem surtout accolées à des pouvoirs de guérison.
De nos jours, depuis Théodore Ribot, et plusieurs psychologues ont mis en évidence le pouvoir de l'imagination, notamment en rapport avec la suggestion et l'autosuggestion.
Assagioli a pris l'imagination au sérieux, au point de la considérer expressément une authentique fonction psychologique :
« Nous estimons que l'imagination, ou fantaisie, représente une fonction distincte. »
La Fantaisie en provenance du grec 'phantasia', plutôt alliée à l’irrégularité des désirs et aux caprices de la volonté, se réfère, tout particulièrement chez Aristote, à l’imagination reproductrice des images déjà perçues.
Tout en remarquant que la plupart des psychologues n'ont pas consacré assez d'attention et d'étude à cette fonction, oubliant ainsi l'importance de son rôle dans la vie psychique, Assagioli trouve tout à fait étrange que cette fonction psychologique ne soit pas considérée comme telle par Jung, surtout en sachant qu’il accorde aux images et aux symboles une grande importance !
Il faut cependant reconnaître, pour les temps modernes, le fait d’une pléiade de pionniers traitant spécifiquement de la fonction imaginative, en tenant en compte notamment les travaux de Pierre Janet, Francis Galton, Alfred Binet, Pierre Clark, Anna Freud, Carl Happich, Marc Guillerey, de même que Théodule Ribot, déjà référé, Virel et Frétigny, et encore Carl Jung avec la méthode de l’ « imagination active »
Il y a aussi la contribution de Robert Desoille , auteur du « rêve éveillé dirigé. »
L'imagination est la fonction psychologique qui a pour rôle soit de reproduire les images captées par les sens, soit de créer de nouvelles images.
Elle est ordinairement la fonction la plus active et dont l’activité, loin de se limiter à l’état de veille, s’avère plus fort et plus libre pendant le sommeil.
C’est une fonction psychologique par laquelle l'inconscient directement s'exprime, notamment au cours de l'activité onirique.
Loin de se limiter à subir des influences, elle est à la fois active et activatrice, tout en ayant un rôle important en tant que stimulateur des autres fonctions, étant donné l'efficacité de sa force propulsive.
Assagioli remarque :
« L’imagination est une fonction qui peut opérer simultanément à différents niveaux : les niveaux des sensations, des impulsions et des désirs, des sentiments, de la pensée et de l'intuition. En un certain sens, elle combine toutes ces fonctions en proportions variées. »
Le potentiel latent de l’imagination semble inépuisable et ses manifestations ont l’air incontrôlables, mais il n’y a rien à craindre !
Comme le remarque Assagioli :
« l'imagination est en elle-même neutre ! »
Selon lui, il admet aussi l’imagination vaine et illusoire, cette fonction psychologique constitue une activité normale du mécanisme psychologique humain, tout en étant notoirement active chez les enfants.
Assagioli croit que, chez les enfants, l'imagination peut couvrir jusqu'à 90% de la vie psychologique, un fait réel rarement considéré par les mamans. Des recherches récentes vont jusqu'à découvrir l'activité imaginative dans la vie intra-utérine.
Toutefois, étant donné son interférence apparemment indisciplinée sur les autres fonctions comprenant la volonté, il y a une tendance à la considérer comme "la folle du logis".
Effectivement, l’imagination est une force intérieure aussi précieuse que difficile à maîtriser !
« Je vous demande de fermer les yeux et d'observer un éléphant rose, l'avez-vous vu ? Si Oui, qui à observer en vous cet éléphant rose ? » Eddy Vonck
L'imaginaire n’est pas le synonyme d'une abstraction.
Selon l'expression de Goethe, reprise par Gabriello Cirenei :
« l'image mentale d'un château est aussi réelle que le château lui-même ! Elle est réelle en tant qu'expérience subjective, et aussi au sens où elle constitue la condition préliminaire pour la construction du château. »
L'on trouve chez Georges Duby et Guy Lardreau un lieu assez parallèle :
« La trace d'un rêve n'est pas moins 'réelle' que celle d'un pas, ou d'un sillon d'une charrue dans la terre. Je crois que l'imaginaire a autant de réalité que le réel ! »
L’imaginaire n’est pas non plus synonyme de fiction, ni de stérilité. Il tient compte des souvenirs et elle les dépasse.
Comme le fait noter Pier M. Bonacina :
« l’imagination non seulement apporte les souvenirs du passé, mais aussi elle annonce et construit le futur. »
L’imagination puise des images des archives de la mémoire tout en étant aussi un laboratoire soit de transformation soit de création de nouvelles images.
La porte de l’imaginaire s’ouvre alors sur la révélation du réel !
Ce sont en plus des réalités à la porté d’un contrôle effectif et d’applications concrètes !
Tel que signalé par Assagioli :
« il ne s'agit donc pas de quelque chose d'arbitraire comparable au rêve, mais d'un procédé bien défini qui peut être appliqué volontairement et avec méthode. »
Il remarque que cette fonction psychologique n'opère pas dans le vide. La créativité de l'imagination se manifeste par de nouvelles combinaisons d'éléments présents.
L'imagination créatrice est un assemblage, la création de nouvelles combinaisons à partir d'éléments existants.
Elle est donc imagination reproductrice qui puise des mémoires des archives autant du conscient que de l’inconscient, et de l'imagination créatrice qui produit des données nouvelles à partir du monde des virtualités.
L’imagination est la mère de la créativité !
Assagioli fait alors voir que :
« l’imagination créatrice précède toujours l’expression créatrice. »
Dans l'imagination reproductive, il y a une sorte d'activité automatique faisant passer les images de l'inconscient au conscient.
L’aspect créateur peut se manifester spontanément, autant dans l'état de veille que dans les rêves.
Il peut bien aussi être cultivé en utilisant des exercices adéquats, comme l'imagination guidée ou rêve éveillé dirigé.
Comme le remarque Assagioli :
« quand on parle d'imagination, on se rapporte généralement aux images visuelles. Mais l'imagination comprend aussi d'autres sortes d'images :
- auditives,
- tactiles,
- olfactives,
- gustatives,
- kinesthésiques, etc..
Dans l'exercice de l'imagination et son usage, on doit tenir compte de toutes ces variétés, séparément ou combinées entre elles.»
Penser mal de l’imagination devient un contresens. Elle est une auxiliaire des autres fonctions psychologiques, surtout de la pensée. Le mot idée provient du mot grec 'eidos' qui signifie image.
L'imagination et la fantaisie sont tenues ordinairement comme synonymes par Assagioli.
Toutefois, il semble parfois tenir à une certaine distinction, tandis que l'imagination se limite à l'évocation et à la réception des images, la fantaisie coordonne ces images à partir d'éléments nouveaux en provenance du monde des impulsions, des émotions et de la pensée.
De toute façon, il s'agit de deux termes habituellement complémentaires, l’imagination étant ainsi une fonction évocatrice et créatrice !
Assagioli spécifie le rôle à la fois passif et actif de l'imagination par les lois psychologiques suivantes :
- Les besoins,
- les instincts,
- les impulsions et les désirs tendent à produire des images, des idées et des émotions correspondantes"; à leur tour, les images et les idées suggèrent les actions correspondantes.
Assagioli place l'imagination en relation étroite avec l'intuition !
Tellement dans leur rapport il y a un lien étroit, que souvent les gens les prennent l’une pour l’autre !
L’imagination révèle un potentiel de vie, pouvant en même temps signifier le processus de croissance et promouvoir l’équilibre de la santé.
Sans imagination, il n’y a pas de créativité !
Par la fantaisie, l'imagination créatrice est reliée à la fois à l'inconscient et aux différentes fonctions psychologiques, y incluant l'intuition !
L'imagination évocatrice, par l'intermédiaire de la volonté ou alors spontanément, peut présenter à la conscience des images déjà connues puisées aux archives de la mémoire.
Il s'agit alors de l'imagination reproductive. (ce qui est connu par soi !)
L'imagination créatrice donne en plus l’origine à des images nouvelles.
Comme l'observe Assagioli, il est plus facile d'évoquer une image assez complexe que de créer une image nouvelle, même la plus simple.
L'objectif de l'imagination n'est pas de remplacer la réalité mais de la créer, d'où l'importance qui est accordée par Assagioli à l'imagination créatrice !
C'est pour cela qu’il considère que l'imagination au sens précis de fonction évocatrice d'images, est une des fonctions les plus importantes et les plus spontanément actives, sous les deux aspects conscient et inconscient.
La psychosynthèse, basée sur les lois de la psychodynamique, admet que chaque image contient une énergie créatrice et voit dans l'imagination la source des symboles.
Il arrive que les gens se sentent conduit / (éconduit) par l'imagination. Parfois, ils craignent cette fonction plus ou moins anarchique comme d'un hôte fou (où quelques choses d'inconfortables physiques ou et matérielles) qu'il faut faire semblant d'ignorer ! (pour moi le terme 'ignorer' devrait être remplacer par 's'en débarrasser' ou 'faire comme si rien n'y était' surtout lors de rêves confus ou de cauchemars.)
Pourtant, au lieu d'être méprisée ou tolérée, l'imagination doit être aimée !
Pour Assagioli : l'imagination doit être réhabilité si elle a été refoulée, elle doit être développée si elle n'est pas suffisante, elle doit être disciplinée si elle est exubérante !
Il appartient à la volonté de la contrôler et de la rendre efficace, ce qui n'est possible que par le biais d'une volonté sage, et jamais par la force d’une confrontation.
Quoi qu’il en soit, l’imagination reste une fonction précieuse et puissante à considérer dans tous les domaines de l’expression et de l’éducation.
Que l’on pense par exemple :
- à la peinture,
- à la musique,
- au théâtre
- et surtout à la littérature...
dans les domaines de la mythologie,
- des légendes,
- des fables
- et du roman...
Le grand obstacle dans la vie psychologique c'est souvent que l'imagination semble perçue abusivement omniprésente et envahissante.
Pourtant, elle ne doit pas être considérée comme une sorte d’enfant sautillant et rebelle toujours à surveiller et à contrôler, mais comme fonction psychologique à prendre au sérieux, de pair avec les autres !
En remarquant combien le manque de contrôle de l’imagination peut nous rendre prisonniers de la rêverie et nous faire perdre le sens de la réalité, Pier M. Bonacina commence par relever la portée de son rôle à la fois passif et
actif :
« Elle intègre, elle collabore, elle guide les autres fonctions et d’elles reçoit le guidage. »
La bonne ou mauvaise utilisation de l’imaginaire n’affecte pas la fonction comme telle.
L’imagination est en même temps un écran, une lumière, et un miroir de l’âme.
Dûment acceptée, valorisée et utilisée, elle peut atteindre la sphère du supraconscient et apporter à la conscience ordinaire l'inspiration et les "insights" (visions pénétrantes) venus du Soi transpersonnel, plus ou moins proches de l’intuition et sûrement en rapport étroit de complémentarité et d’égalité avec n’importe quelle autre fonction psychologique.
La psychosynthèse privilégie les exercices conduisant à l'imagination créatrice et en ouvrant cette fonction psychologique à l'influx du Soi transpersonnel.
Les exercices les plus souvent utilisés dans l'éducation de l'imagination sont :
- ceux de l'observation,
- du dessin libre,
- des mots évocateurs,
- du modèle idéal,
- de la satisfaction symbolique,
- de la concentration,
- de l’imagerie mentale,
- du rêve éveillé dirigé,
- de l'épanouissement de la rose,
- et de la méditation.
Les techniques de méditation s'avèrent particulièrement efficaces pour calmer, rendre silencieuse et intégrer harmonieusement la faculté imaginative.
La lecture peut aussi à stimuler l’imagination !
La visualisation due à l’évocation d’images est par excellence le fruit de l’imagination.
La vie quotidienne est pleine de suggestions que l'on peut utiliser avec un peu d'imagination et de bonne volonté !
Celle-ci lui peut rendre service tout en essayant d’arrêter l’œil mental sur l’image choisie.
Au lieu de se laisser aller dans la fantaisie, on peut s’en servir comme fables qui, de par son caractère dynamique et synthétique, peuvent faire le pont avec une réalité intérieure.
Lorsqu’il y a la tendance à survaloriser le raisonnement et que celui-ci se montre incapable d’arriver à une situation satisfaisante, notamment dans un travail de groupe, il y a le recours à la technique du « brain storming » où l’imagination peut prendre la relève. La visualisation et la concentration de la pensée y offrent un cadre où l’imagination peuvent habilement être utilisées et effectivement appréciées.
2.5 Pensée
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
- pensée,
- raison,
- intellect,
- esprit,
- intelligence,
- mental,
reste assez arbitraire et se prête à des confusions.
Surtout les termes 'mental' et “intellect” varient de sens d’une école à l’autre.
Parfois, il y a chez des auteurs, tels que Maître Eckhart, un élargissement dans leur application qui dépasse le rationnel, tout en signifiant plutôt une saisie immédiate à caractère intuitif.
C’est à noter qu’au Moyen Âge, on considère le mental comme le sommet de l’âme et le siège de la pensée.
Dans la philosophie médiévale, l’intellect est utilisé comme synonyme soit de l’esprit ou vision spirituelle, soit de la raison (ratio) ou de son discours, alors que le terme mental y est utilisé comme synonyme de l’âme, notamment chez Bonaventure dans son Itinerarium.
Antoine de Lisbonne le conçoit comme la maison des pensées.
Tel est aussi la conception bouddhiste qui voit dans les émotions et dans les pensées l’expression du mental, prise alors comme synonyme du centre de la conscience. C’est dans ce sens que le Bouddhisme est considéré et désigné comme étant une « science du mental ».
En Orient, autant le bouddhisme que le taoïsme semblent en même temps valoriser et relativiser le raisonnement intellectuel.
Assagioli considère que le grand pionnier de l’utilisation du mental a François Bacon, qu’il voit comme le précurseur de la sémantique moderne.
Celle-ci tend à identifier le mental avec le raisonnement ou discours de la pensée qui essaye de tout expliquer, sans même pouvoir offrir l’explication d’elle-même.
L’axiome cartésien : « je pense donc je suis » constitue l’exemple d’une appropriation au détriment des autres fonctions psychologiques, tant qu’il fait de la pensée le pivot par excellence de l’identité humaine.
Assagioli remarque :
« L'intellect a de la difficulté à admettre l'existence de réalités et valeurs non rationnels; il est porté à confondre le supra-rationnel avec ce que l'on considère irrationnel, ou même antirationnel ! »
Il met en cause la définition : d’animal rationnel, par rapport à l’être humain, tout en considérant qu’il s’agit plutôt d’un animal qui parfois raisonne.
La pensée, fruit du mental, est reliée à l'action, de sorte qu'on peut dire que l'on pense quand le mental devient en même temps raison et intellect, lumière et lecture.
Il y a, simultanément, l’introspection et la réflexion, permettant de penser au sujet de nos propres pensées !
Assagioli compare le mental au lit d'un fleuve, tout en voyant dans la pensée l'expérience psychologique de ce courant mental.
Mais il ne semble pas que tout le monde utilise effectivement ce flot de la pensée. En tenant compte du vrai caractère de cette fonction, il commente :
« Certaines personnes au développement psychologique limité ne pensent jamais, au vrai sens du terme ! »
Bien sûr, penser est plus que d'avoir un mental.
Selon sa remarque :
« une grande partie de notre activité mentale ordinaire ne mérite alors pas le terme de ‘pensée’. Ce n’est que lorsqu’un intérêt dominant appuyé par une volonté décidée et ferme est capable de maintenir l’esprit concentré sur une idée qu’il s’agit vraiment de ‘pensée’, et nous pouvons dire que l’esprit réfléchit, qu’il médite. »
Qu’il soit le singe, le lac ou le fleuve..., le mental demande d’être maîtrisé, soigné et libéré de la poussière qu’il même tend à fixer et catalyser, de façon à devenir le miroir transparent et l’objet, plutôt que le sujet révélateur de l’identité humaine.
Il n’est pas le point de départ, ni le terme concernant le saisissement de la réalité. Il en a les propriétés d’un récepteur, mais il n’est pas le générateur.
Il n’est pas question de dévaloriser la raison, mais de dénoncer le rationalisme qui en fait constitue un accaparement déraisonnable d’une fonction psychologique qui le dépasse.
En plus de ne pas utiliser le raisonnement, ou de ne pas s’en servir jusqu’au bout, il y a le danger de le croire au sommet de toutes les fonctions psychologiques, ce qui constitue une façon mauvaise de l’utiliser.
Ce n’est pas raisonnable de toujours donner le primat à la raison !
Assagioli remarque :
« C’est tors de croire que la raison est tout. Elle est une valeur supérieure à la passion, à l’impulsion, mais inférieure par rapport au superconscient, et au spirituel. »
Tout en faisant voire que le critère de la raison n’est pas toujours le plus rassurant, il cite ainsi Stacchini :
« L’âge supposée d’être l’âge de la raison est celle où on commence à commettre de graves bêtises. »
Comme remarqué par Larry Dossey,
« nous ne pouvons pas échapper à l’utilisation de la raison, de même que nous ne pouvons pas échapper à notre propre ombre. Nous devons employer la logique, dans un certain degré, en chaque essai de comprendre en notre vie les évènements, même en concluant que tels évènements peuvent être compris seulement de façon intuitive et non-logique. »
Le monde du Soi transcende le domaine de la raison. Celle-ci y est pour collaborer et non pas pour diriger.
Comme le reconnaît Assagioli :
« La raison donne seulement une connaissance partielle, et schématique de la réalité ! »
Il parle soit de la fonction psychologique de la pensée, soit de la fonction mentale, soit du mental comme fonction psychologique en rapport avec les autres fonctions de la psyché.
Il emploie aussi l'expression "vie mentale' pour signifier l'ensemble de la conscience !
En d’autres termes et selon Francesco Brunelli, il s’agit de :
« la somme de l’activité psychique consciente et inconsciente ! »
Parfois Assagioli donne au mental un sens plus large relié à une sorte d'atmosphère psychologique comprenant non seulement les idées, mais aussi les images, tout en faisant, par exemple, la distinction entre « les idées et les images ou les figures mentales.»
On peut voir ici le fondement de sa distinction entre imagination et pensée.
Puisque dans le langage commun, les termes :
- 'mental',
- 'raison',
- 'idée',
- 'intellect',
- 'réflexion',
- ‘pensée'
- et ‘prise de conscience’
sont employés souvent dans un sens plus ou moins équivalent, il y a une clarification sémantique à faire en vue de préciser le sens des termes utilisés.
La conscience est plus que la pensée !
Celle-ci est une forme d’énergie vitale exprimée soit par la conscience en état de veille ou non.
Il faut bien la distinguer de la prise de conscience et de la connaissance.
La pensée est un outil de la conscience parmi d'autres: la connaissance provient de la raison, mais aussi d'autres sources.
'La pensée' est synonyme de l'idée, tandis que 'les pensées' sont synonymes des idées.
Celles-ci sont considérées comme des entités vivantes, étant donné leur caractère dynamique
En tenant compte de leur caractère énergétique, Alfred Fouillé emploie l'expression : "idée-force"
Si la pensée est le fruit de l’activité mentale, il ne semble pas adéquat de les prendre comme des synonymes.
La pensée est mentale, mais tout le mental ne fait pas partie de la pensée.
Celle-ci est un genre de mental canalisé et dirigé en fonction de la réflexion et de l'examen d'un argument dans ses ramifications, ou distinctions et implications.
La pensée ne se limite pas à l'activité et au potentiel conscients. Elle y est à la fois un récepteur, un créateur et un transformateur !
Comme le note Luisa Lunelli à la suite d'Assagioli :
cette fonction psychologique a pour rôle non seulement d'accueillir les données de l'expérience personnelle et de celle de l'humanité, mais aussi de réfléchir sur ces données en fonction de nouvelles élaborations, synthèses et applications.
Cette activité réflexive et créatrice de la pensée fait partie tout autant du processus onirique que de l'état de veille; d'où l'importance de considérer le discours réflexif tant au niveau inconscient qu'au niveau conscient.
Les grandes idées à caractère génial proviennent du niveau transpersonnel et arrivent au domaine mental par l’entremise de l’intuition. La pensée n’est qu’un des piliers du pont qui donne l’accès au niveau transpersonnel où la fonction intuitive semble prédominante !
Il y a toujours de la complémentarité entre les différentes fonctions psychologiques, pourvu qu’elles ne s’annulent mutuellement, dû au fait de mauvaises appropriations et de conjugaisons.
On trouve chez Carl Jung la remarque suivante :
« Comme on le sait, la nature n’est pas tellement prodigue de ses dons, et il est rare qu’elle ajoute à une haute intelligence les dons du cœur. »
En règle générale, là où l’un est donné, l’autre manque, et là où une faculté s’est développée, c’est le plus souvent au détriment de toutes les autres.
« Dans cette perspective, un point particulièrement délicat est la disharmonie qui existe souvent entre le secteur de la pensée et celui du sentiment chez un être; car l’expérience a montré que ces fonctions s’entendent mal et se contrecarrent ! » C. G. Jung
L’intellect risque de limiter et de distordre la réalité, surtout dans la mesure où il est absolutisé et se remet aux prises des illusions.
Parmi les dangers d'une pensée mal orientée, il y a la rationalisation égoïste qui tend à justifier les tendances inférieures !
Le recours au sophisme constitue un abus de la raison.
C'est dans ce sens que l'on peut accepter la remarque de Karl
Rahner en disant que :
« La raison raisonnante trouve toujours des arguments nécessaires pour justifier ce qu'elle a secrètement déjà décidé. »
Assagioli en tient compte lorsqu'il écrit :
Utilisons notre raison, mais ne nous en rendons ni esclaves ni victimes !
Tout en regrettant que la pensée soit si souvent appliquée à la créativité en vue de buts d'ordre personnel, tels que ceux de la richesse et du succès, il propose une éducation de cette fonction en la mettant au service de l'humanité !
L'impact du rationalisme cartésien sur la pensée moderne est traduit autant par l’intérêt dûment consacré à la fonction pensée que par la prépondérance d'une suprématie acquise aux dépens des autres fonctions psychologiques.
Il y a alors un déséquilibre psychologique.
Le médecin Sergio Bartoli classifie d' "artériosclérose existentielle" la situation de quelqu'un dont le mental soumet à la rigidité d'une programmation intellectuelle toutes les manifestations de la vie, du sensoriel jusqu'au spirituel !
Quiconque réduit la psyché à la raison, pratique le réductionnisme psychologique et risque de passer à côté de l’essentiel par rapport à la perception de la réalité.
« La raison saine reconnaît elle ? ses limites » , note Assagioli.
Elle cherche aussi ailleurs l’information à acquérir la/ les réponse(s) à ses problèmes.
Une pensée vraiment éclairée tient toujours compte de la complémentarité de lumières autres que la sienne.
Les adeptes du Zen vont jusqu'à répéter des phrases absurdes à fin de contrarier la pensée rationnelle.
Souvent les mystiques font appel à la nudité intellectuelle comme condition préalable à la contemplation.
Il y a là le sens non pas du mépris de la pensée, mais de la relativisation et du détachement par rapport à nos idées.
Le rationalisme tend à se placer non seulement au-dessus, mais outre les phases de conscience à caractère magique et mythologique, et donc à les exclure au lieu de les reconnaître tout en essayant d’en faire une lecture plus appropriée et de les intégrer.
La réalité transcende toujours la pensée logique.
La conscience dépasse la raison !
Pourtant elle ne l’exclut pas. Assagioli considère que :
« le rôle de la raison est de coordonner, de systématiser, d'éclairer, d'interpréter, de diriger, et d'aider dans le travail de la maîtrise des instincts, des passions et des émotions. »
En effet, ce rôle appartient plutôt à la volonté, mais la pensée raisonnante y est appelée à collaborer, dans le sens de la spécificité et de la complémentarité propres à toutes les fonctions psychologiques !
Un grand piège pour la pensée, c'est une sorte d'autosuffisance de la raison qui s'isole dans le narcissisme de ses propres lumières, sans tenir compte ni des autres fonctions psychologiques ni de la valeur de la pensée des autres.
L'arrogance intellectuelle et le criticisme démolisseur en sont des fruits.
La Bhagavad Gita va jusqu’à considérer la pensée ou fonction mentale comme l’assassin du Réel.
Ce n’est pas la réalité que nous pouvons adapter à notre forme de penser, mais le contraire.
Rien de négatif s’attache à l’adjectif ‘rationnel’ fruit du raisonnement logique, et non plus à l’attitude ‘raisonnable’ fruit d’un comportement considéré adéquat.
Mais le fait de ‘rationaliser’ est dans la terminologie freudienne, l’indicatif d’une mauvaise utilisation de la raison contre elle-même.
La raison, comme telle, n’est pas à dénigrer ni à absolutiser, mais tout simplement à valoriser.
Elle est précieuse en tant que fonction intégrative du vécu, y incluant les expériences à teneur spirituelle.
La réalité outrepasse la pensée logique !
Celle-ci a besoin des mots pour s'exprimer, mais une telle expression, comme remarque Kahlil Gibran, n'est jamais adéquate :
« La pensée est un oiseau de l'espace. Une fois dans la cage des mots, elle peut en effet ouvrir ses ailes, mais elle ne peut pas voler. »
La désignation « âge de la raison » est devenu un lieu commun pour signifier le stade où l’enfant atteint un raisonnement critique qui traduit en même temps une première désidentification par rapport à la collectivité et la prise de conscience de sa propre identification comme individu.
Il y a le passage de la phase pré-critique à la phase critique !
Mais, dans ce processus évolutif, il y aussi la possibilité et l’appel à la phase post-critique, celle-ci nommée par Paul Ricœur la :
« deuxième naïveté »
apparemment semblable, mais foncièrement différente de la « première naïveté », celle du stade pré-critique !
Une telle deuxième naïveté traduit l’état vraiment adulte, où la raison compte toujours, mais à l’intérieur de sa spécificité et de ses bornes, ayant ainsi contribué pour une synthèse qui la dépasse.
Admettre le mystère, c’est avoir conscience des limites de la raison jamais capable d’épuiser le contenu et le sens de la réalité.
Le mental constitue une manifestation de l’énergie vitale reliée à la conscience de laquelle il est une manifestation et un outil, mais il ne doit pas se confondre avec la conscience en elle-même !
Tout en y distinguant les aspects concret et abstrait, Assagioli considère le mental comme étant un "sixième sens" ou le "sens commun" qui synthétise et interprète les messages des cinq sens.
C’est face à l'attachement aux idéologies fausses, unilatérales et sclérosées, qu’il fait appel à " la purification du monde mental. "
Loin de dévaloriser l'énergie mentale de la pensée, et en tenant compte du dynamisme énergétique des idées, il y voit un pouvoir plus puissant pour modifier le monde extérieur que l'activité musculaire.
Cette énergie a la tendance à s'exprimer, y incluant le rapport avec la dimension physique, d'où le principe ou loi psychodynamique ainsi présentée dans son système :
Les images ou représentations mentales et les idées tendent à produire les états physiques et les actes qu’y correspondent !
Selon Assagioli, la cybernétique et la sémantique en voie de développement pourront rendre de grands services dans l'intensification de l'activité mentale qui, d'après lui : exige une connaissance plus éprouvée et plus vaste du mental lui-même, et une meilleure capacité de contrôler, de diriger et de s'en servir de façon adéquate !
Avec Sebastiano Tilli, on peut concevoir la psychosynthèse comme étant, avant tout, l'analyse du dynamisme de la vie mentale, analyse articulée autour d'un pivot central constitué par l'idée d'un principe vital portant à l'éveil, la croissance et l'accomplissement.
Cet élément propulsif à l'intérieur de la psyché, nous pouvons le cultiver et l'éduquer.
N’importe quelle idée représente un potentiel psychique jamais destiné à sa suppression !
Pour ce qui nous semble une pensée négative, la bonne attitude est le remplacement par une idée positive, selon la loi de substitution, au lieu d'une tentative de l’éliminer où même de la nier !)
En plus de l’occurrence spontanée de la pensée, il y a la pensée active fruit de l’acte volitif !
Penser par nous-mêmes est à la fois un droit et un besoin.
L’autonomie va de pair avec la capacité et l'indépendance corrélativement à la pensée.
Toutefois, tant en théorie que dans la pratique, il faut éviter de trop axer la psychosynthèse sur le mental, sous peine d'un réductionnisme appauvrissant.
Rien ne doit pas nous empêcher de cultiver une science du mental, mais il devient dangereux de faire du mental le pivot de toutes les sciences !
Malgré l'importance de son rôle, le mental n'est qu'une partie de la psyché. Le mental est un organe de connaissance du monde soit intérieur soit extérieur, et un instrument à la fois de recherche et d'expression !
Pourtant il ne doit pas être identifié à la conscience dont il constitue une expression parmi d’autres.
Le mental sert à nous éclairer, mais il se borne à la surface de nos problèmes existentiels, sans atteindre leurs racines et moins encore la totalité de l’être !
C’est au niveau du Soi que l’on atteint le cœur de la réalité !
Il n’est pas question d’y exclure le mental, mais à ce niveau, il devient plus adéquat de parler du supra-mental.
Sri Aurobindo nous fait voir que :
« les forces fondamentales de la vie humaine, ses causes profondes, sont, au-dessous irrationnelles, et au-dessus supra-rationnelles. »
Cela ne veut pas dire que l’aspect rationnel soit mis de côté dans le processus psychosynthétique. Il y reste toujours comme un pilier fonctionnel et jamais comme un élément à considérer superflu et dispensable.
Dans l'éducation de la pensée en tant qu'activité mentale, il n'est pas moins important de considérer la qualité des idées que leur quantité !
L'abondance des idées peut faire de quelqu'un un savant, mais c'est leur qualité qui fait de lui un sage !
Tant que l’on n’arrive pas à bien utiliser la faculté de penser, on peut être à la merci d’un courant de pensée qui nous conduit.
En d’autres mots, dans le cas échéant ce n’est pas nous qui pensons, mais la pensée qui pense en nous !
L’objectif de bien penser est donc plus important que celui de beaucoup penser. En plus de ne pas penser du tout, il y a le danger de mal penser, où de penser au mal !
En fait, remarque Assagioli :
« tout le monde croit qu'il sait penser; en réalité, cependant, penser est un art que l'on apprend ! »
Il distingue l'activité mentale :
- positive,
- organique,
- concentrée
- et créative,
de l'activité mentale automatique, confuse, dispersée !
N’importe quelle pensée représente une forme de concentration mentale, mais il y faut faire la distinction entre la pensée spontanée qui se développe à sa guise, et la pensée dirigée qui est le fruit de l’acte volitif offrant des motivations capables de retenir et d’orienter le processus mental.
Le monde des idées est à la fois immense, riche, varié, souvent contradictoire, tout en allant :
- de la rigidité à l’arbitraire,
- de la révélation à l’absurdité,
- de la simplicité à la multiplicité,
- de l’ordre a la confusion,
- du concret à l’abstrait,
- de la pondération à la superficialité,
- de l’efficacité à la nullité,
- de la créativité au ravage,
- du bon sens à la sottise,
- de l’éducation à l’insanité.
Pier M. Bonacina offre à propos la caricature des déviances dans ce domaine qui semblent encore prédominer, et peut-être plus que jamais dans la vie actuelle :
« La fonction mentale, quoiqu’elle soit la fonction la plus utilisée par l’homme moderne, est aujourd’hui celle qui est moins contrôlée et contrôlable. Des idées négatives, répétitives, ou insignifiantes prolifèrent comme des petits insectes ou parasites, tout en se transformant, non
rarement, en authentiques blattes répugnantes, cause de viscosité inconfortable. »
Comme le feu, l’énergie mentale doit être mise en valeur, mais toujours en contrôle et dans un climat d’hygiène mentale.
Mais il faut aller encore plus loin.
L’expression ou l’adhésion au monde des idées peut donner lieu à une doctrine abstraite, voire à un dogme étouffant.
C’est seulement quand et dans la mesure où chaque idée correspond à l’expérience du vécu qu’il y a lieu pour faire de la pensée une fonction psychologique bien intégrée.
Dans la pensée, il faut tenir compte et distinguer notre monde, et celui des autres en particulier, et encore le monde de la pensée anonyme, étant celui- ci constitué par toutes sortes de pensées plus ou moins programmées en fonction d'une société automate où, on dispense les gens de penser, ou bien on les encourage d’adopter et de suivre une pensée dictée/ directive de l’extérieure.
Tel est la fixité paralysante de l’endoctrinement dogmatique,
quel qu’il en soit, lequel en plus de nous dispenser de l’effort de penser s’oppose même à la liberté de le faire. Il y a là une dictature du savoir qui alimente et s’alimente de la paresse intellectuelle !
Comme Assagioli le note :
« en réalité, rares sont ceux qui 'pensent' vraiment; penser est quelque chose d'inconfortable et de fatigant, qui force à la concentration et exige donc une volonté persistante. »
Il cite, à ce propos, cette phrase de Lamartine :
« Ce n'est pas moi qui pense; ce sont les idées qui pensent en moi ! »
La pensée a le pouvoir de toujours percer des frontières de nos limites, d’élargir le champ de la conscience et d’accroître le potentiel humain, d’où le principe selon lequel l’énergie suit la pensée.
Le fait de penser constitue à la fois un droit universel, une obligation commune et une responsabilité inaliénable. La pensée produit une sorte d'irradiation qui produit ses effets dans l'espace autant intérieur qu'extérieur !
Ce fait est relié à la loi psychologique présentée par Assagioli dans les termes suivants :
« Les images ou figures mentales et les idées tendent à produire des conditions physiques et des actions extérieures correspondantes. »
Le pouvoir de la pensée permet l'utilisation d'idées-forces pour toute sortes d'objectifs, dès la formation du caractère jusqu'à la manipulation idéologique la plus aliénante !
Le discernement devient donc nécessaire face au monde de la pensée, en y incluant la nôtre.
Sans que l’on justifie à cet égard l’adoption d’une attitude défensive, il y a lieu cependant pour la mise en garde et l’avis venus de Piero Ferrucci :
« Dans un monde rempli de préjugés et d'irrationalités, de manipulations d'opinion et d'attitudes standardisées, d’endoctrinements et de persuasions occultes, rien n'est plus important qu'un esprit doué de capacité critique, ouvert et indépendant ! »
À l'intérieur du mal-penser, il y a le fait de 'trop-penser', lorsqu’on est mentalement trop stimulé.
Avec l'agrément de l'acte volitif, les excès de la pensée se manifestent dans l’obstination et le dogmatisme portant à des extrêmes de fanatismes et d’absolutismes.
Les écoles ou systèmes doctrinaux connus par les noms de Science du Mental et Penser, tout en valorisant la pensée, tendent à le faire en termes aux risquent de l’absolutiser comme étant une fonction psychologique douée / égotique d'une suprématie plus dogmatique, sectaire et parfois dangereuse pour celui qui est en recherche ou en quête !
Certes, il est fort important de cultiver la pensée !
Une pensée primitive ou mal éduquée est source d'équivoques au niveau personnel, et la proie facile d'influences dépersonnalisées (voire sectaires).
Comme le note Luce Sannangelatonio :
« pour une personne ou un groupe peu évolué et mal éclairé, de même que pour un schizophrène, il est difficile ou même impossible d'établir la différence entre le subjectif et l'objectif, entre le particulier et le collectif, entre la partie et le tout; en d'autres termes, de passer du monde prélogique au monde logique ! »
Tout en suivant les appellations de Paulo Freire :
« il y a ici le rapport direct avec les états de "conscience intransitive" à caractère magique qui contraste avec la conscience transitive critique ! »
Il faut bien distinguer entre nos idées fruit d’une expérience propre, ayant ainsi un caractère existentiel, et celles simplement empruntées aux autres.
Ceux qui pensent en deuxième main sont comparés par le Bouddha à des bergers qui soignent les vaches des autres !
Une idée-force à retenir à l'intérieur du processus éducatif est celle du besoin et de la possibilité de l'éducation de la pensé !
Dans le processus éducatif visant à l'équilibre psychologique, il est important que la pensée soit ouverte à l'intuition et en rapport étroit avec toutes les autres fonctions psychologiques, sans les envahir par la voie du raisonnement.
Trop rationaliser rend la vie irrationnelle !
L'être humain identifié à son mental devient un robot programmé !
Le danger est là aussi en ce qui concerne la psychosynthèse. Toute en valorisant la pensée en tant que fonction psychologique, le créateur de l’approche psychosynthétique fait la remarque suivante :
Nous ne sommes pas - et j'espère nous ne le serons jamais - une école de pensée !
La pensée ou fonction rationnelle, une fois mal appropriée ou absolutisée, peut devenir une pierre d’achoppement sur la voie du Soi.
Cette voie peut bien être éclairée et interprétée par la raison, mais c’est le Soi et non pas la pensée qui constitue la voie de la libération.
La fonction mentale est tout à fait importante, pouvant elle-même constituer une voie vers la transcendance.
Le danger persiste lorsque l’on en fait un absolu, sans l’ouvrir a toutes les autres, notamment à la fonction intuitive.
Jung fait là-dessus le commentaire suivant :
« Comme l’État tente de ‘saisir l’individu', ainsi l’individu s’imagine aussi avoir ‘saisi’ son âme; oui, il en a fait même une science, en admettant absurdement que l’intellect, qui n’est cependant que partie et fonction de la psyché, suffirait pour saisir la totalité bien plus étendue de l’âme. En réalité c’est la psyché qui est la mère, qui est le sujet et la condition même du conscient. »
Tout en valorisant la pensée, Assagioli voit dans l'intuition une fonction cognitive supérieure, la seule capable d'atteindre une compréhension directe et plus intime de la réalité.
Cela signifie non pas, quant à lui, que l'intuition soit anti-rationnelle, mais qu'elle est supra-rationnelle !
Il fait la même considération lorsqu'il s'agit de la dimension spirituelle proprement dite :
Le spiritualisme n'est pas anti-rationnel, mais supra-rationnel !
Notre pensée n’est pas adéquate à ce qui va au-delà de la pensé.
La pensée humaine est limitée aux catégories de temps et d’espace et donc n’a pas de voix au sujet de ce qui est illimité, infini et éternel !
Le mystère reste toujours un défi pour la pensée, dans la mesure où il lui impose des frontières.
Le Soi transpersonnel peut servir d’exemple en tant que réalité toujours plus ou moins mystérieuse pour cette fonction psychologique qui n’as pas le rôle de dévoiler le mystère qui la dépasse, mais qui, à la lumière du Soi, peut mieux identifier ses propres lumières et bien d’autres, tout en gardant le sens de leur complémentarité.
Assagioli va jusqu’à considérer que le Soi a toujours raison !
Bien penser n’est pas toujours facile, et trop penser peut devenir inconfortable, lorsqu’on a le sentiment d’être à la merci d’une agitation frénétique qui semble nous mettre à la merci de tout un tourbillon d’idées.
Il y a alors un appel à la discipline intérieure, non pas dans le sens d'une répression, mais de rendre effectif l’acte de penser et d’en faire un art !
L’exercice d’observation portant à la visualisation d’une série d’objets suivie de leur description constitue un exemple de la pensée dirigée.
Le mental a autant besoin de repos que d’exercice.
Les auteurs mystiques parlent du « silence mental », où le flux de la pensée s’arrête pour donner lieu aux manifestations supérieures de l’âme humaine, telles que :
- l’intuition,
- l’illumination
- et la contemplation.
Le silence y est d’une efficacité plus remarquable que le sommeil !
La méditation peut à la fois constituer le perfectionnement de la pensée dont l’importance du détachement.
Dans l'éducation de l’intellect ou pensée, la psychosynthèse valorise la méditation thématique réflexive. Elle privilégie l'exercice de désidentification par rapport au courant des pensées pouvant y inclure celles qui échappent à la volonté.
On peut utiliser alors la formule assagiolienne :
“J’ai un intellect, mais je ne suis pas mon intellect.”
Ou : " J’ai un intellect, mais je suis plus que mon intellect ".
Il y a un processus de désidentification, dans la mesure où nous avons la capacité de penser au sujet de nos pensées !
Le fait de localiser la pensée dans le cerveau et d’y distinguer des caractéristiques et traits dominants dans l’un et les autres de ses hémisphères, ne doit pas mener à la conclusion que soit seule la tête est le lieu de la pensée, ni même à la conviction de pouvoir la localiser n’importe où.
L’organe de la pensée est la conscience dont les manifestations incluent et dépassent les propriétés d’ordre physique.
La psychosynthèse y voit une fonction du corps et de l’âme tout en ayant son pivot au niveau de l’esprit, le Soi humain.
Celui-ci, que l’on peut imaginer à deux visages tels que Janus, le dieu romain, inclut et dépasse les polarités, tout en faisant leur synthèse.
Ainsi, la pensée fait appel non seulement à la concentration mais aussi à une démarche vers le Soi, le noyau de la conscience !
La volonté y a un rôle important à jouer, particulièrement pour garder la pensée à l’intérieur de ses limites afin de la rendre perméable aux données de toutes les fonctions psychologiques, notamment à celles de l'intuition.
2.6 Intuition
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Très tôt, autant dans ses recherches que dans sa carrière professionnelle, Assagioli tient compte des conceptions les plus globalisantes et spiritualistes, soit de l'Occident (les psychologues chrétiens et les "newthinkers" anglo-américains), soit de l'Orient (les écoles psychologiques hindoues, brahmanique et bouddhiste).
« une nouvelle et merveilleuse faculté nommée différemment :
- 'intuition spirituelle',
- 'conscience mystique',
- 'conscience cosmique',
- 'vision spirituelle',
- 'vision intérieure',
- 'foi',
et ainsi de suite. »
Tout en remarquant que dans un passé plus lointain l'intuition a mérité une place spéciale en Occident comme en Orient, Assagioli déplore que dans les temps modernes, la psychologie soi-disant scientifique ait mis de côté cette fonction si importante !
Il s’agit d’une faculté qui a été effectivement négligée et non rarement méconnue, ou encore niée, surtout par un certain positivisme.
On doit d'abord à Carl Jung en psychologie, de même qu'à Henri Bergson et Henri Keyserling en philosophie, le mérite d'avoir contré la tendance positiviste en revalorisant l'intuition et en reconnaissant le rôle de cette véritable fonction psychologique !
En 1994, Assagioli se réjouit alors du fait que l'intuition devient reconnue et distinguée en tant que véritable fonction psychologique, un moyen direct d'accès à la connaissance.
Il place Henri Bergson parmi les grands avocats de l'intuition.
Il y a chez Bergson, un des auteurs proche d’Assagioli, une perspective plutôt philosophique qui revalorise l’intuition et fait face au rationalisme dominant.
Carl Gustaaf Jung a eu le mérite de proclamer l’existence et de mettre en évidence cette fonction psychologique à la fois analytique et synthétique.
« Mon expérience de psychologue – témoigne-t-il - m’a montré toujours à nouveau que certains contenus proviennent d’une psyché plus complète que le conscient. Fréquemment, ils font preuve d’une puissance d’analyse, d’introspection ou de connaissance que le conscient correspondant n’était pas capable de fournir. Nous possédons un mot adéquat pour désigner ces phénomènes : l’intuition. »
Tout en suivant de très près la pensée de Jung à ce sujet, Assagioli lui attribue le mérite de réaffirmer l'existence et la validité de l'intuition en tant que fonction psychologique spécifique et autonome.
Avec Jung, il considère l'intuition comme une vraie fonction cognitive spécifique et autonome qui correspond à une perception intérieure immédiate de la nature de la réalité, dans son essence.
Elle peut se manifester en rapport avec n'importe quelle outre fonction psychologique.
Il tient que la connaissance intuitive est celle qui est à la fois la plus directe et la plus rassurante, de telle façon que l'activité logique lui doit être subordonnée .
Assagioli apporte des précisions et aussi des divergences qu'il importe de relever.
Tandis que pour Jung : l'intuition offre une sorte de produit fini, parfait, complet et instantané tant au niveau personnel qu'au niveau transpersonnel de l'intuition platonique.
Pour le théoricien de la psychosynthèse, même si l'intuition est aussi une fonction synthétique et directe, il faut tenir compte du fait que son produit ne se présente pas toujours complètement au niveau de la personnalité !
Sa source reste au niveau du Soi transpersonnel, d’où le caractère compréhensif et synthétique de cette fonction psychologique considérée par Sebastiano Tilli comme « une fonction typiquement spirituelle ! »
La mentalité analytique a souvent mis de côté l’intelligence intuitive. On a déjà remarqué la tendance moderne à faire de la raison le pivot du fonctionnement psychologique.
Néanmoins, comme le reconnaît Albert Einstein, la raison reste bien limitée par rapport à l’intuition, tout en étant celle-ci l’organe de connaissance le plus parfait :
« Il y a certaines lois dans la nature et dans le cosmos lequel l'homme ne peut pas comprendre avec la raison, mais seulement avec l'intuition ! »
À l'instar d'Einstein, Assagioli reconnaît que l'intuition :
est un moyen de connaissance supérieur à l'intelligence !
Il en donne la raison :
« Tandis que celle-ci nous porte à connaître surtout les caractéristiques extérieures d'une chose en vue de l'utilisation pratique, l'intuition fait pénétrer dans la nature intime de la réalité. »
Et Baruch Spinoza lui attribue alors le caractère de « science divine ».
Tout en accordant place aux distinctions, Assagioli insiste sur la complémentarité de leur rôle :
« L'intuition représente l'aspect créatif de la connaissance, le contact direct avec la réalité. »
Au contraire, l'intellect a avant tout la fonction d'interpréter, c'est-à-dire de traduire en termes mentaux les données de l'intuition; ensuite d'en contrôler et vérifier la validité; enfin; de coordonner et d'inclure ces données dans le corps des connaissances déjà acquises.
Assagioli se réjouit du fait que l’on débute à admettre que l’intuition soit un moyen direct et génuine de connaissance et que l’illumination spirituelle et l’inspiration proviennent d’un niveau supérieur de l’inconscient : le superconscient !
Une fois comprises dans leur complémentarité, on pourra vérifier avec Francesco Racanelli : la raison ne tue pas l'intuition mais peut s'y approfondir.
Assagioli se réfère au pouvoir discriminatoire de la raison capable de reconnaître et d’interpréter correctement les intuitions lorsque appariée dans le champ de la conscience.
On tend à situer le raisonnement dans l’hémisphère gauche du cerveau et l’intuition dans l’hémisphère droit.
La tendance à localiser et faire de l’intuition une propriété exclusive de l’hémisphère cérébral droit, portant à la thèse psychologique du doublement cérébral, est loin de conquérir l’unanimité des experts.
Quoi qu’il en soi, le plus important c’est de cultiver harmonieusement touts les deux et de souligner leur complémentarité.
C’est fondamental de ne jamais placer les fonctions psychologiques en situation de compétition ou en contradiction.
En ce qui concerne le rapport raison-intuition, c’est à considérer que le caractère méta-logique de la deuxième ne s’oppose ni dispense pas l’apport logique de la première Loin de nier ou de faire de l’intellect table rase, l'intuition favorise l’acuité et la clarté mentales accrues de la simplicité qui provient de l’esprit de synthèse.
Jung attribue à l’intuition un caractère irrationnel !
Mais le terme ultra-rationnel ou spirituel semble plus adéquat.
La raison prend ses racines dans le conscient, alors que l’intuition les plonge dans l’inconscient !
Elle constitue la vision au niveau de l’esprit, où il y a la perception supra rationnelle, non médiatisée, synthétique et compréhensive de la réalité.
Il s’agit effectivement d’une compréhension suprasensible et d’une perception para-sensorielle dépassant les données des cinq sens, ainsi que le raisonnement logique.
Cela déborde le raisonnement logique, plutôt analytique, ainsi que les limites d’espace et temps.
Il s’agit d’une prise de conscience à caractère transpersonnel, synthétique, ordinairement passagère, quoique permanent dans ses effets, en provenance directe du Soi transpersonnel !
C’est une vision intérieure, dite aussi la connaissance infuse.
Il y a une saisie directe de la réalité qui dépasse autant la connaissance sensible que la connaissance rationnelle.
Assagioli y voit une compréhension 'supra-rationnelle' de la réalité et une forme de vision plus élevée comparée à un 'rayon de lumière' qu'illumine momentanément, ou dans un espace de temps plus ou moins long, la conscience de veille !
Il faut bien y tenir compte que l’intuition ne se dispense d’aucune fonction psychologique, nommément la raison. Son caractère trans-rationnel n’est jamais antirationnel.
L’intuition est l'organe de la vision supérieure, celle de la connaissance directe permettant une compréhension immédiate, intégrale et trans-rationnelle de la réalité et de son essence, à ne pas confondre avec la télépathie ou la clairvoyance.
Celles-ci sont plutôt en rapport respectivement avec la sensibilité et avec la vision intérieures, alors que l’intuition est la fonction psychologique synthétique par excellence, reliée à la contemplation.
Elle est la source et la dispensatrice de la révélation.
Tout en y considérant le caractère d’une 'fonction synthétique' dans le sens que, par elle, on perçoit la totalité d’une situation ou d’une réalité psychologique.
Assagioli remarque l'intuition ne procède pas selon la logique inductive de la partie au tout, mais elle perçoit une totalité directement en tant que réalité existante en soi.
À l'intérieur de cette fonction, il y a encore des distinctions à faire :
une intuition mathématique a des caractéristiques différentes d'une intuition mystique, par exemple.
Il en est de même pour les intuitions scientifiques, philosophiques, mystiques, artistiques et autres.
Assagioli fait la distinction et voit "une grande différence" entre l'intuition des philosophes et celle des mystiques, étant la première plutôt reliée à la raison, tandis que la deuxième semble avoir un caractère plus spirituel !
Comme pour toutes les autres fonctions psychologiques, il y a lieu pour des manifestations de l’intuition, soit au niveau de la personnalité, soit au niveau transpersonnel.
Les intuitions supérieures à caractère transcendant élèvent et intègrent la personnalité au niveau du Soi transpersonnel !
L’intuition fait partie de l’expérience ordinaire à ne pas confondre avec les états altérés de conscience.
Il s’agit de la fonction psychologique ordinairement la plus proche du centre de la conscience, tant au niveau du moi personnel que du Soi transpersonnel, la source de l’inspiration et de la créativité.
Son expression la plus haute est l'illumination.
Tandis que l'intellect, faisant une sorte de lecture intérieure, suit la voie indirecte de la logique inductive et déductive :
l'intuition se tourne vers l'intérieur, y regardant, contemplant, et manifestant la réalité, sans les écarts du raisonnement qui donnent place à l'interprétation et au doute.
Il y a clairement le savoir de quelque chose, même sans comprendre le comment.
Elle ne s’explique pas; elle échappe à tous les concepts.
Carl Gustaaf Jung offre à ce commentaire :
« En le prononçant [ce nom] la plupart des gens éprouvent l’agréable sentiment d’avoir réglé une question épineuse. Ils ne tiennent jamais compte du fait qu’on ne fabrique pas à volonté une intuition ! » « Au contraire, c’est l’intuition qui vient vers vous : vous avez une idée, née d’elle-même, et vous ne la saisissez que si vous êtes assez prompt pour l’attraper. »
Une des caractéristiques de l’intuition est sa spontanéité qui ne dépend pas de la réflexion, sans pourtant la mettre de côté !
Elle peut constituer une réponse au questionnement de la raison, mais elle peut aussi offrir des solutions préalables au questionnement !
Il faut distinguer la fonction de son produit. Souvent on parle indistinctement de mon intuition ou de mes intuitions.
Celles-ci ne sont pas nécessairement un fruit de la fonction intuitive !
Il s'agit ordinairement d'inspirations plus ou moins proches de ce que l'on désigne en anglais par "insights", sorte de vision et communion avec la réalité, ayant cependant un caractère plus ou moins fragmentaire et passager.
L'inspiration représente une descente des énergies du supraconscient à l'intérieur du champ de conscience ordinaire, ce qui peut arriver par le biais de l'intuition ou d'une autre fonction psychologique.
L’intuition est différente aussi des pressentiments ou impressions psychiques concernant des gens ou des évènements.
Dans l'acte purement intuitif, c'est l’ouverture à la lumière du centre de conscience qui se manifeste, tout en donnant l'expérience et de la vision, de l'union et de l'identification.
Comme l'observe Assagioli :
« l’intuition conduit effectivement à l'identification avec ce que est vu et contemplé, et à la reconnaissance de l'unité intrinsèque entre l'objet et le sujet ! »
Il s’agit d’une fonction psychologique qui saisit la réalité immédiatement et dans son essence.
Du mécontentement face à l’intellectualisme aride est né au dix-neuvième siècle le transcendantalisme américain faisant appel à l’intuition désignée alors la “raison transcendantale”.
Mais cette transcendance est la voie de communication directe avec toutes les fonctions psychologiques, en termes de complémentarité plutôt que de dépassement.
C'est ainsi que l'on peut avoir aussi des intuitions sensorielles, de même que des intuitions spirituelles .
Cela n’affecte pas la fonction intuitive comme telle.
Assagioli remarque que : « l'intuition, dans sa manifestation la plus pure, est dépourvue de sentiment, de réactions émotionnelles, positives ou négatives, envers l'objet appréhendé ! »
Il y a effectivement une complémentarité de rôle entre toutes les fonctions psychologiques, y compris l'intuition.
L'important est de distinguer le rôle spécifique de chacune, de respecter leur domaine d'action, et de promouvoir leur interaction.
Il peut arriver, par exemple, que des sensations et des réactions émotives envahissent le champ de la conscience et empêchent l'accès aux lumières de l'intuition.
Celle-ci constitue une sorte d'antenne psychologique permettant à l'être humain de dépasser les lieux communs de son existence, tout en mettant à la portée des autres fonctions des réalités qui les transcendent.
Tel que pour l’eurêka (j’ai trouvé) d’Archimède, chaque intuition constitue une lumière grâce à laquelle il y a une révélation quelconque immédiatement saisie par la conscience.
Au dire de Carl Gustaaf Jung :
« les rêves prémonitoires, les télépathies et tous les faits de cet ordre sont des intuitions. »
Face à cette fonction psychologique qui dépasse toute conception intellectuelle, Jung avoue :
« ne pas savoir au fond comment l’intuition opère ? »,
tout en ajoutant que :
« nous devons être très reconnaissants au ciel de posséder une fonction qui nous octroi certaines lumières sur ce qui est 'par-delà des choses' ! »
Il la considère cependant :
« une fonction très naturelle, parfaitement normale et nécessaire. »
L'intuition est une fonction normale à la fois réceptive et créatrice.
Il s’agit d’une sorte d’œil spirituel ou d’antenne transpersonnelle qui capte et transmet synthétiquement de l’information.
L’intuition est considérée le sens synthétique tandis que le mental est le sens commun.
La faculté intuitive est plus proche de l’instinct que l’intention, quoiqu’il n’y a pas d’incompatibilité et d’exclusion entre l’un et l’autre !
Tout en étant hors de contrôle direct de la volonté, elle nous révèle non pas l’information que nous voulons avoir, mais celle dont nous en avons besoin.
Cette information à caractère immédiat est donnée plus en fonction de l’ici et maintenant que du futur.
En d’autres mots, elle est plus vision qu'une prophétie !
Il faut toujours se rappeler que l'intuition n'est pas un produit de la volonté, bien qu'elle soit en rapport avec elle aussi.
Une des caractéristiques de l'intuition est d'être foncièrement spontanée, libre et imprévue.
Assagioli est péremptoire là-dessus :
« La volonté n'a aucun pouvoir direct sur la fonction intuitive; celle-ci échappe à toute action volitive laquelle produirait l'effet contraire ! »
Il y a cependant une action indirecte très utile qui peut être exercée de la part de la volonté : elle peut créer et maintenir libre le 'canal de communication' par lequel descendent les impressions intuitives, pouvant aussi freiner ou empêcher temporairement les activités perturbatrices des autres fonctions psychologiques.
Le rôle de la volonté consciente par rapport à l'intuition doit être alors celui d'une action indirecte, qui lui prépare le chemin en éliminant les obstacles, en faisant monter l'état de conscience et en invoquant l'action de l'inconscient supérieur qui est le siège du sens intuitif.
L’intuition demeure alors une faculté gratuite qui ne provient pas de la volonté, est une fonction spontanée qui ignore les contraintes, sans cependant nous dispensez de l’identifier et d’offrir notre collaboration volontaire.
Au dire d’Assagioli : « au cœur de chaque homme/ humain se cache la fleur de l’intuition. »
Le premier pas c’est d’accepter son existence chez nous et chez les autres !
Tout en considérant les intuitions comme des messages du Soi à la personnalité, Assagioli veut que l'on donne une place centrale et une grande valeur au développement de l'intuition !
L'éducation de cette fonction psychologique ne constitue pas en soi un problème.
À proprement parler, elle ne fait l'objet direct d'une action éducative.
L'intuition est une sorte d'échelle de Jacob de la psyché qui s'en sert soit pour la descente des énergies supérieures, soit pour faire monter toutes les facultés jusqu'au niveau du supraconscient.
Éduquer l'intuition, ou mieux dit s’éduquer à l’intuition, c'est prendre soin de cette échelle !
Alors le problème de l'éducation vise dans la pratique un contrôle de toutes les autres fonctions psychologiques, comportent le danger d'envahir ou de prétendre remplacer la voie de l'intuition.
Toutefois celle-ci ne peut pas se dispenser des autres fonctions psychologiques.
Il serait donc une erreur de se remettre à l’intuition en termes de lui attribuer complète autonomie ou une certitude absolue.
Il se peut que les mystiques ont tendance à privilégier l’intuition, alors que les savants donnent leur préférence à la connaissance intellectuelle.
Mais le vrai mystique estime le discours de la pensée, de même que le vrai savant garde place pour le concours de l’intuition.
Quoique l'intuition ne constitue pas un fruit de la volonté et échappe à son contrôle de même qu'à celui des autres fonctions psychologiques, elle reste cependant conditionnée au niveau de son acceptation et de ses
manifestations !
On ne peut pas la programmer, mais on peut toujours la favoriser et l’entraîner !
Tout en admettant qu'il s'agit d’une des fonctions les moins reconnues et appréciées, Assagioli croit que pour cette raison, elle est généralement peu développée ou refoulée.
Même si l'intuition a un caractère libre et spontané, cela ne nous exempte pas de la collaboration dans l'exploration de l'inconscient.
Cette exploration opère l'élargissement de la conscience et facilite ainsi les manifestations de la fonction intuitive et l'accueil de ses données.
L'évocation symbolique et l’invocation des énergies supraconscientes sont des exercices particulièrement recommandés en vue de favoriser la fonction intuitive.
Le langage de l’intuition est plutôt symbolique.
L’utilisation de la symbolique est la voie royale de liaison à l’intuition.
Alors la lecture au sujet du symbolisme et l'effort pour
comprendre le langage symbolique constituent une des principales méthodes pour le développement de l'intuition.
Les mantras utilisés dans le contexte de la méditation sont sensés avoir le pouvoir d’éveiller la conscience humaine en l’ouvrant à la compréhension intuitive !
Au niveau des manifestations intuitives, il semble y avoir un lien étiologique avec la psychologie différentielle :
Il y a des individus plus ou moins disposés à valoriser, ou alors à mettre de côté le facteur intuitif.
Selon Assagioli :
« l'intuition en tant que fonction se trouve derrière et au-dessus de chaque différence typologique, mais elle agit différemment selon les types psychologiques ! »
Tout en tenant compte du fait que l'intuition ne constitue pas l'objet direct de l'éducation, la psychosynthèse s'attarde cependant non seulement à reconnaître son rôle, mais aussi à en faciliter la tâche !
Elle est, selon Assagioli :
« L'intuition est une fonction normale de la psyché, et son activation est produite principalement par l'élimination des divers obstacles empêchant son fonctionnement ! »
Il y a une sorte de feu que l'on ne peut pas allumer à partir d'un acte volitif, mais que l'on peut apprécier, accueillir et activer.
L’intérêt plus récent porté en Occident pour ce qui regarde l’idéologie orientale véhiculée notamment par l’hindouisme, le taoïsme, le bouddhisme, ainsi que pour le soufisme et les arts martiaux, font preuve de la recherche d’une approche à caractère plutôt intuitif.
Un moyen important de donner place à l'intuition est celui de faire taire les autres fonctions psychologiques, notamment celle de la raison, tout en créant ainsi le silence intérieur.
Einstein affirme que les grandes découvertes scientifiques arrivent lorsque la raison se tait, et que l’on fait confiance à l'intuition !
Assagioli est d'avis que :
« les personnes qui ont le plus grand besoin de développer et d'employer l'intuition sont les intellectuels, tout spécialement ceux dont l'activité mentale est très intense et qui sont très fiers de leur intelligence brillante, avec laquelle ils s'identifient ! »
Il ajoute la remarque suivante :
« Ces intellectuels ont souvent un développement unilatéral et par là, ils ont grand besoin d'une psychosynthèse ainsi que de l'activation des autres fonctions qui ne sont pas chez eux, généralement, suffisamment développées ! »
Il faut bien revenir au fait que l'intuition ne remplace pas, exclue ni dévalorise les autres fonctions psychologiques, y compris la raison et l'imagination.
C'est d’ailleurs son rôle de les inclure, de les intégrer et de faciliter leurs tâches particulières.
L'action de l'intuition devient donc indispensable pour atteindre une vraie psychosynthèse autant :
- individuelle,
- qu'interindividuelle,
- ou sociale,
surtout au niveau transpersonnel !
Assagioli considère alors cette fonction psychologique comme étant : « l’organe de perception de la vérité. »
Selon lui : seule l'intuition apporte une véritable compréhension psychologique, aussi bien de soi-même que des autres !
À cette perception de la vérité, il ne donne pas pourtant l’apanage de l’infaillibilité !!
En effet, quelle que soit la valeur de l’intuition, elle ne devrait être employée qu’en concomitance et harmonie avec les autres fonctions psychologiques.
Douglas Russell, à la suite d'Assagioli et de F. Clark, tient compte de cinq stades ou éléments reliés au processus intuitif :
- l’alignement (syntonisation du moi personnel avec le Soi transpersonnel);
- l'élévation (montée et élargissement de la conscience);
- la réception (ouverture et accueil);
- l'enregistrement (annotation, surtout par écrit);
- la vérification (examen,distinction et discernement par rapport à chaque message reçu.)
Assagioli propose la méditation, avec la pratique du "silence mental", en vue de purifier le champ de la conscience, et de le vider de tous les contenus qui empêchent les manifestations intérieures à caractère intuitive.
Il évoque une phrase tirée d’un hymne des mystères grecs :
« Soyez silencieuses, cordes, pour qu’une nouvelle mélodie circule en moi. »
Lorsqu’en terminologie mystique on parle de la "contemplation négative", on y considère le vide intérieur où il y a de la place pour des révélations supérieures.
Le silence et la prière sont souvent présentées comme des moyens privilégiés pour créer la syntonie intérieure qui favorise l’éclatement de l’intuition.
C’est à considérer aussi le service socialement rendu, tout en tenant compte l’aspect inclusif et altruiste qui caractérise cette fonction psychologique.
Personne n’est dépourvu de l’intuition, laquelle doit être considéré en termes de qualité et non pas de quantité.
L’intérêt voué à l’intuition doit donc viser non pas son augmentation, mais l’amélioration au sens de sa reconnaissance et de son accueil !
Faire de l’intuition un alibi pour la raison reste un écartement paresseux face au besoin de coordonner et valoriser toutes les fonctions psychologiques.
Il faut bien remarquer leur importance en termes d’égalité, aussi que leur interpénétration, tout en évitant de les concevoir l’une à l’intérieur de l’autre en guise d'exemple de la poupée Babouchka russe.
Ce qui donne la qualité à n’importe quelle fonction psychologique c’est l’état de conscience !
Au niveau du Soi il y aura :
- leur accueil inconditionnel,
- la transparence de l’âme,
- l’humilité face à nos limites,
- et une attitude de souplesse, sans attachements ni contraintes.
Un rappel avant le prochain sujet de cette partie 4
C’est le modèle septénaire que l’on passe à considérer selon les désignations et l'ordre indiqués par le diagramme Assagiolien de l'étoile, ou étoile des fonctions illustré.
Il inclut les quatre fonctions de la classification jungienne, (sensation, émotion, pensée et intuition), tout en y ajoutant non plus seulement une, mais les trois fonctions suivantes : impulsion, imagination et volonté.
1. Sensation
2. Émotion
3. Impulsion
4. Imagination
5. Pensée
6. Intuition
7.Volonté
8. Soi
Même si le Soi figure dans le diagramme de l’étoile, il faut bien noter qu'il s'agit là du point de référence et non pas d'une fonction psychologique !
« Les fonctions psychologiques sont des expressions du Soi. »
3 – Carrefour de l’étoile
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
📌 Avant que l’on passe à de réflexions finales sur le rapport et la complémentarité des sept fonctions psychologiques que l’on vient de présenter, il sera question de considérer la sexualité humaine. Cela dû au fait qu’il y a dans ce domaine un rapport et un apport importants mis en évidence non seulement par la psychanalyse, mais aussi et de façon
éloquente par l’approche assagiolienne.
3.1 Apport de la sexualité
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Assagioli relie l'impulsion sexuelle non seulement aux instincts, mais aussi à toutes les autres fonctions psychologiques !
Là où Freud fait du réductionnisme, Assagioli découvre un sens d'élargissement.
Il s’agit d’un domaine sacré sûrement important et souvent mal comprit !
Il fait noter combien le thème de la sexualité est un sujet :
- ample,
- complexe
- et délicat !
Tout en étant lui-même un médecin, il considère la médecine naturaliste incompétente en matière de l’éducation sexuelle !
C’est pourquoi il fait un appel dans le sens de donner aux étudiants de la faculté de médicine « une préparation psychologique et morale au sujet des questions sexuelles. »
La sexualité est en même temps une caractéristique individuelle et un don de la vie !
À partir de 1910 et de ses études psychanalytiques reliées à la pensée de Freud, le fondateur et théoricien de la psychosynthèse accorde, dans ses écrits, une attention particulière à l'éducation sexuelle.
Bien que loin du pansexualisme freudien, il se trouve proche de Freud en reconnaissant et dénonçant les vieux tabous reliés à une fausse conception de la sexualité, lorsque pureté et ignorance, pudeur et hypocrisie sont devenues presque synonymes.
Assagioli distingue entre :
- instruction sexuelle,
- et éducation sexuelle !
La première tombe souvent dans l'erreur de réduire la sexualité à un simple instinct physique et de la séparer des autres composantes de la personnalité, notamment l'affection.
En contrepartie, il y a aussi le danger de tomber dans une sorte d'éducation abstraite qui se réfugierait dans le rêve d'un monde idéalisé et ferait abstraction du réalisme cru et nu de certains aspects de la vie instinctive.
Alors qu'en psychanalyse freudienne toutes les fonctions psychologiques semblent être sous la dépendance de la sexualité, en psychosynthèse, c'est la sexualité qui est au service des fonctions biopsychologiques et en constitue une de leurs expressions !
On peut dire qu'il s'agit d'une fonction spécifique à caractère généralisé.
En fait, la sexualité mérite d'être considérée comme une super fonction vitale, dans la mesure où elle comprend les dimensions :
- physique,
- psychologique,
- et spirituelle.
Malheureusement, cette triple dimension n'est pas toujours harmonisée.
Au dire d'Assagioli : une des erreurs les plus graves souvent commises par ceux qui s'occupent de la question sexuelle est celle d'étudier le côté instinctif et psychique de la sexualité séparément de ses aspects émotif, mental et spirituel !
Assagioli fait appel à la pureté du cœur en disant :
« pour les purs tout est pur ! »
Ni l’activité sexuelle ni l’alimentation sont en elles-mêmes des poisons. Ce sont des fonctions naturelles et elles sont en soi nécessaires à la préservation de l’individu et à la vie même de l’humanité !
Le plaisir découlant de leur saine gratification est bon, et l’on peut en jouir de bon cœur, sans aucun sentiment de culpabilité !
Lorsque je parle de ‘poison’, je parle d’un attachement qui
conduit aux excès, et par-dessus tout de l’exploitation relevant de fins commerciales qui peuvent conduire à de tels excès.
Le fait de prendre la sexualité au sérieux n’exclut pas la gaieté. Notamment au niveau des rituels amoureux, la joie y est un élément spontanément partagé.
Assagioli avertit au sujet de l’erreur fondamentale de considérer l’aspect physique et instinctuel de la sexualité de façon séparée et indépendante des nombreux aspects psychologiques qui la caractérisent, parmi lesquels les aspects affectifs !
L'apologie des instincts peut devenir une épée à deux tranchants.
Comme l'observe Sergio Bartoli, la valorisation exagérée et des instincts suscitées par l'école freudienne peuvent donner prise à un processus régressif conduisant à des comportements primitifs traduit par l'homicide, et l'instinct sexuel, par la violence !
Tout en regrettant le même fait, Abraham Maslow considère qu'il a eu non pas 'sacralisation', mais 'désacralisation' du sexe. Il propose donc la re-sacralisation de cette fonction par l'attribution de toutes les valeurs dont elle a été dépouillée.
Comme facteurs d’une telle situation, Abraham Maslow identifie la réaction aux facteurs répressifs, le matérialisme dominant et le cynisme de la commercialisation de la sexualité.
Il revient donc à l'éducation de faire accéder au niveau dit supérieur tous les instincts, de les intégrer, de les transformer et de les sublimer.
Assagioli offre à propos, la considération suivante :
« Quant à l’insistance exagérée sur la sexualité, l’antidote le plus efficace est l’amour véritable. Il s’agit non pas de ne pas aimer ou d’aimer moins, mais d’aimer mieux ! »
La sexualité ne se limite pas au domaine des pulsions et non plus à celui des besoins physiques !
Avec Piero Ferrucci, on doit souligner le rapport existant entre la sexualité et le besoin d’aimer et d’être aimé !
Victor Frankl remarque combien une sexualité vidée d’amour conduit à une dépersonnalisation !
C’est au niveau transpersonnel, autant chez nous-mêmes que chez les autres, que l’on doit chercher la pleine signification sur la portée de la sexualité !
Il va dans ce sens l’affirmation d’Assagioli en disant que :
« le Soi tient compte de l’identité essentielle de tous les autres Soi ! »
Il y a là le sens et le respect autant de l’individualité que de l’altérité.
De pair avec la désidentification concernant l’élan sexuel, on doit toujours revenir à l’identification, dans le sens que le sexe n’est pas quelque chose que l’on a, mais quelqu’un que l’on est !
Assagioli propose une conception intégrale de la sexualité y considérant simultanément les dimensions physique, émotionnelle, mentale et spirituelle, sans quoi il y aura un appauvrissement, voire une perversion et la dégradation de l’humain !
Puisque l’information n’est pas synonyme d’éducation, Assagioli remarque le besoin d’adapter les enseignements au degré de l’évolution : «Souvent, quoiqu’en ayant de bonnes intentions, on peut faire beaucoup de mal en donnant des enseignements précoces. »
L'éducation psychosynthétique choisit une méthode d'intégration et non pas d'exclusion y compris en matière sexuelle !
La règle d’or est celle de la voie du milieu, tout en considérant les dangers autant de débauche que de la suppression !
Assagioli fait la distinction entre la stimulation exagérée et artificielle du désir sexuel et de l’instinct naturel, spontané et sain, ceci donnant lieu à “une saine gratification.”
En tant qu'instinct de reproduction, la pulsion sexuelle tend naturellement à la création d'un être nouveau !
Le surplus est utilisé pour la satisfaction sensuelle ou affective plus ou moins légitime !
Malheureusement, comme le remarque Erich Fromm :
« les partenaires sont souvent si narcissiques, si égoïstes et si possessifs que l’on ne peut pas parler toujours d’un plaisir simultané mais non partagé ! »
La désidentification est fondamentale par rapport à n’importe quel désir, soit-il d’ordre sexuel ou d’un autre. On peut alors utiliser la formule assagiolienne suivante :
« J’ai des désirs, mais je ne suis pas mes désirs ! »
Les désirs sont éveillés par des incitations et d’autres influences physiques et émotives. Ils sont souvent changeants et contradictoires, en alternance d’attraction et répulsion; ils ne sont pas vous !
Ou encore la formule suivante :
‘J’ai des désirs, ils sont une partie de moi, mais je suis plus que mes désirs ! ’
Il y aura alors une certaine désidentification non pas biaisée par le dualisme et la rupture, mais ouverte à l’accueil, sans quoi l’intégration de la sexualité reste impossible, ainsi que l’entièreté de notre vraie identification.
D’où l’avis d’Assagioli :
« Ne séparez pas le sexe des autres parties de la nature humaine ! »
La sexualité regarde l’ensemble des fonctions psychologiques, et englobe, sans exclusion ni discrimination, toutes les dimensions de l’humain.
Conclusion, dans la vraie éducation sexuelle, le tabou donne place à la spontanéité, la cupidité est remplacée par le respect, la peur est enlevée par l’amour, la particularité est intégrée dans le tout.
3.2 Sens de la complémentarité
Sources : Joao D'Alcor - La Psychosynthèse de Roberto Assagioli
Carl Jung remarque :
« certaines fonctions sont en nous particulièrement développées et différentiées, particulièrement en honneur,
particulièrement actives et productives, tandis que d’autres ne dépassent pas le stade embryonnaire de leur développement ! »
Dans la démarche psychosynthétique, il devient fondamental de tenir compte de chaque fonction psychologique en particulier et de lui dispenser toute l'attention adéquate, sous peine de laisser l'une ou l'autre s'atrophier.
Assagioli note comme un fait évident celui du peu de maîtrise que nous avons sur nos fonctions psychologiques !
En termes pratiques, il conseille alors de développer toutes les fonctions de façon équilibrée et de donner plus d'attention à celles moins développées, et jamais le contraire, sous peine de provoquer ou d’accentuer un manque d'équilibre.
Il reconnaît le besoin d ‘analyser quelles sont les fonctions déficientes et quelles sont celles qui sont en excès, de façon à apporter l’harmonie entre elles !
Un des buts fondamentaux de la psychosynthèse selon lui :
« l'organisation harmonieuse des différentes fonctions psychologiques ! »
À l'intérieur de chaque fonction, il énumère encore quatre facteurs :
- la direction,
- la modalité active,
- la modalité passive
- et la qualité.
Une fonction psychologique bien utilisée se perfectionne et nous perfectionne. Une fois arrêtée ou refoulée, elle se détériore et nous déforme !
Alors, toute fonction humaine qui n’est pas utilisée s’atrophie et toute fonction mal cultivée se dégrade.
Le développement harmonieux de toutes les fonctions psychologiques constitue une condition préalable et fondamentale de l'œuvre psychosynthétique !
Il faut bien tenir compte autant de nos potentialités que de nos limites.
Tel que l’on a mentionné plus haut, Carl Jung fait voir que :
« la nature n’est pas tellement prodigue de ses dons, et qu'il est rare qu’elle ajoute à une belle intelligence les dons du cœur. »
En règle générale, là où l’un est donné, l’autre manque, et là où une faculté s’est développée, c’est le plus souvent au détriment de toutes les autres.
C’est important de tenir compte du sens de la complémentarité et de la coordination en vue de la synthèse des différentes fonctions psychologiques !
Plus concrètement, Assagioli observe que cette œuvre reste axée sur le centre de la conscience qui agit par le biais de la volonté !
C’est à noter et à ne pas oublier que la place du Soi est au cœur du diagramme de l’étoile !
Assagioli explique :
Le Soi, à travers la volonté, atteint, utilise, joue, contrôle, met en action ou place dans le réfrigérateur** une fonction donnée !
Selon son propos :
Ça c’est de la psychosynthèse : l’attitude qu’il y a un Soi, c'est qu'il veut/ peut contrôler toute la dynamique spontanée ou pas des fonctions et des énergies psychologiques.
**je remplacerais ce mot par par PLACARD (mettre quelque(s) chose(s) ou quelqu'un à l'écart, ou même écarter ou s'écarter de quelques(s) chose(s) qui dérange(nt)!
Tout en faisant voir que la volonté n’a pas le rôle d’imposer mais bien de réguler et de guider, ce qui ne confère aucune suprématie à l’acte volitif.
l’erreur, est celle de chercher d’imposer la volonté aux autres fonctions psychologiques, lesquelles justement se rebelleront !
Assagioli souligne en plus que c’est toujours au niveau du Soi que les fonctions psychologiques expriment idéalement le potentiel humain :
« Qui n’admet pas ce Soi, ce Centre spirituel, non seulement ne reconnaît pas l‘homme en ce qu’il a de vraiment humain, au sens le plus haut de la parole, mais qui ne peut pas non plus comprendre la vraie nature des faits et des fonctions psychiques. »
Il y a différents niveaux de fonctionnement pour chaque fonction psychologique en correspondance avec les états de conscience.
C'est ainsi que, par exemple, Assagioli fait la distinction entre :
- imagination inférieure,
- imagination moyenne,
- et imagination supérieure,
reliant celle-ci à l'activité supraconsciente !
À l'intérieur de chaque fonction, il y a une échelle de manifestations, des plus primitives ou/ au plus élémentaires jusqu'aux plus élevées et plus raffinées.
L'objectif de l'éducation est de les faire atteindre le niveau supérieur d'expression.
Il faut noter, en plus, qu'à tous les niveaux de chaque fonction, il peut y avoir des tendances opposées.
Ainsi au niveau le plus haut de la pensée, il y a place pour l'humilité du saint de même que pour l'orgueil d’un pervers !
Si l'on considère le niveau le plus élémentaire des instincts, il y a la possibilité de la dépravation, mais aussi celle de révéler le mystère et les merveilles de la nature !
Les instincts comme tels sont neutres.
Leurs classifications, en termes d’inférieurs, supérieures ou autres n’ont rien à voir avec un système moral de valeur.
Il convient remarquer que les fonctions psychologiques, que l’on considère siégeant au niveau conscient, ont des racines et appartiennent, en grand partie, au monde mystérieux de l'inconscient qui échappe à tout contrôle direct.
Assagioli observe :
« En général, nous ne sommes pas directement conscients des fonctions psychiques qui se déroulent en nous; nous pouvons seulement intervenir sur elles à partir de leurs produits conscients. »
Il fait voir que toutes les différentes fonctions et leur multiples combinaisons en complexes et de sous-personnalités tendent à la réalisation de leurs buts en dehors de notre conscience, indépendamment et même parfois contre notre volonté consciente.
Il y a donc lieu de tenir compte de deux sortes d'intentionnalité ou champs de volonté :
- l'une consciente,
- l'autre inconsciente.
Les orientations et objectifs de cette dernière ne sont pas toujours univoques; leurs forces s'opposent et se neutralisent même, parfois, et peuvent être à l'origine de conflits plus ou moins manifestes.
L’harmonisation et la bonne utilisation des sept fonctions psychologiques caractérisent, selon Assagioli, la psychosynthèse au niveau personnel !
Souvent, un travail de rééducation et de réajustement des fonctions psychologiques doit d'abord être effectué.
Mais l'éducation de la psyché ne se limite pas, en psychosynthèse, à des moyens de prévention et à des applications thérapeutiques.
Il y a tout un ensemble de potentialités à découvrir, de conquêtes à faire qui mènent au-delà de la prise en considération du pathologique !
En plus de valoriser chaque fonction psychologique en particulier, il est important de toujours tenir compte de la psyché comme un tout.
On peut séparer théoriquement chaque fonction psychologique, mais dans la pratique elles sont toujours inséparables.
La psychologie devient nécessairement réductionniste, lorsqu’elle perd de vue leur ensemble.
Les rapports ou interactions entre les fonctions psychologiques s'établissent soient spontanément soit intentionnellement.
Au niveau du Soi, toutes les fonctions se conjuguent.
Antoine de Lisbonne, mystique du Moyen-Âge explique :
« Malgré ses diverses fonctions, l'âme est une; elle prend divers noms selon les effets qu'elle produit :
- âme, elle anime le corps;
- volonté, elle commande;
- esprit, elle vit;
- raison, elle juge;
- souffle, elle pousse;
- sens, elle éprouve plaisir et douleur ! »
"Saint Antoine de Padoue"
Il y a l'expérience existentielle qui mène Assagioli à s'exclamer avec Sainte Hildegarde :
Symphonica est anima
l'âme est symphonique !
Il appartient au centre de la conscience, par le biais de la volonté, autant d'accueillir et d'harmoniser les fonctions psychologiques que de les faire jouer la vraie symphonie de la vie.
C’est grâce au centre de la conscience, que nous pouvons les identifier et harmonieusement les conjuguer dans le kaléidoscope de la conscience.
À la lumière du Soi se manifeste et monte alors, dans le champ de la conscience, toute la beauté, l’arc-en-ciel des sept fonctions psychologiques.
Un rappel des fonctions psychologiques en Psychosynthèse
C’est le modèle septénaire que l’on passe à considérer selon les désignations et l'ordre indiqués par le diagramme Assagiolien de l'étoile, ou étoile des fonctions déjà illustré.
Il inclut les quatre fonctions de la classification jungienne, (sensation, émotion, pensée et intuition), tout en y ajoutant non plus seulement une, mais les trois fonctions suivantes : impulsion, imagination et volonté.
1. Sensation
2. Émotion
3. Impulsion
4. Imagination
5. Pensée
6. Intuition
7.Volonté
8. Soi
Même si le Soi figure dans le diagramme de l’étoile, il faut bien noter qu'il s'agit là du point de référence et non pas d'une fonction psychologique !
« Les fonctions psychologiques sont des expressions du Soi. »
Pour ce qui concerne la complémentarité, tout en considérant l’identité biopsychique, Matilde Santandrea remarque :
« Alors que les fonctions physiques tendent à diminuer progressivement, suivant une parabole descendante, les fonctions psychiques, au contraire peuvent continuer à évoluer, dans la direction ascendante, et nous donner le sens
d’une conquête pérenne et d’une progression qui transforme notre vie et lui donne une signification profonde, jusqu’au dernier jour ! »
La volonté, que l’on passe à considérer, tient un rôle
stratégique, en rapport avec l'intentionnalité qui porte toutes et chacune de ces fonctions à se déployer harmonieusement dans la synthèse de la vie !
À SUIVRE !
📌(partie 2) - (niveaux de conscience / sur la voie du centre)📌(partie 3) - (Ouverture à l’inconscient)
Fin de la retranscription de la partie 4, la partie 5 suivra mais patience...
💫 Là, je prends le relais en tant que blogueur, le travail de recherche personnelle que je vous partage à un but, aussi, c'est le « partage et la collaboration », il est clair, que ces concepts ne sont pas simples à intégrer, un conseil, prenez le temps de digérer le contenu sans le mentaliser. Ce Blog comme d'autres, ont un but premier, « votre participation », en laissant des commentaires ou en posant des questions sur le lien où en bas du blog par le biais du formulaire, ainsi vous participez aux travaux, cela prend du temps que j'offre gratuitement parce que pour le moment, sur Psycho'Logiques, je ne vous vends rien, merci.
Eddy Vonck - Fondateur du Blog Psycho'Logiques


































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