𝐋'𝐞𝐱𝐩𝐨𝐬𝐢𝐭𝐢𝐨𝐧 𝐚𝐮 𝐭𝐫𝐚𝐮𝐦𝐚𝐭𝐢𝐬𝐦𝐞 𝐩𝐚𝐫 𝐥𝐞 𝐃𝐨𝐜𝐭𝐞𝐮𝐫 𝐁𝐞𝐬𝐬𝐞𝐥 𝐯𝐚𝐧 𝐝𝐞𝐫 𝐊𝐨𝐥𝐤
Extrait et prologue ( partiel)
Du Livre LE CORPS N'OUBLIE RIEN - Bessel van der Kolk
L'exposition au traumatisme
Il n'est guère besoin d'être soldat, ni de visiter un camps de réfugiés au Congo ou en Syrie, pour être confronté au traumatisme !
Tout un chacun est concerné, ses amis, sa famille, ses voisins.
Une recherche menée par les centres de contrôle et de préventions des maladie a montré qu'un Américain sur cinq avait été sexuellement agressé dans son enfance, un sur quatre battue par un parent au point d'en garder la cicatrice, et un tiers des couples se livre à des violences physique.
Aux États-Unis (idem probablement en Europe), un quart des adultes a grandi avec des proches alcooliques, et un sur huit a vu sa mère battue !
L'espèce humaine est extrêmement résiliente. Depuis des temps immémoriaux, les hommes ont mené des guerres sans merci, sur-monté d’innombrables catastrophes, des violences et des trahisons intimes. Mais, que ce soit à grande échelle (sur l'histoire et sur la culture) ou dans les familles où de sombre secrets se transmettent à travers les générations, les expériences traumatiques laissent bel et bien des traces !
Elles marquent aussi les émotions et les esprits, l'aptitude à l'amour et à la joie, et même l'organisme et le système immunitaire !
Le traumatisme affecte ceux qui en souffrent directement, mais aussi les proches. Les crises de rage et l'absence émotionnelle des soldats revenus des combats peuvent effrayer leur famille. Les épouses des traumatisés sont souvent déprimés, et les enfants de mères dépressives risquent de manquer de confiance en eux et devenir anxieux !
L'exposition très jeune à la violence familiale vient souvent entraver ultérieurement l'établissement de relations sociales et de confiance.
Le traumatisme est par définition insupportable !
La plupart des combattants, des victimes de viol et des enfants qui ont été agressés sexuellement sont si bouleversés quand ils pensent à ce qu'ils ont subi qu'ils tentent de chasser cette expérience de leur esprit, et de faire comme si de rien n'était et de passer à autre chose !
Il faut énormément d'énergie pour continuer à vivre en gardant le souvenir de la terreur, avec la honte d'avoir été si faible et vulnérable !
L'homme a beau vouloir dépasser le traumatisme, la zone cérébrale chargée d'assumer sa survie, profondément enfouie sous l'aire rationnelle du cerveau, n'est pas très douée pour le déni !
Longtemps, après la fin d'une expérience traumatisante, le moindre signe de danger peut la réactiver, mobiliser les circuits cérébraux perturbés et provoquer une sécrétion d'hormone de stress. Cela engendre des émotions pénibles, d'où des sensations très vives et des impulsions agressives.
Ces réactions post-traumatiques semblent incompréhensibles et irrépressibles. Incapable de se contrôler, les rescapés d'un traumatisme craignent souvent d'être profondément atteints et incurables !
Je me suis attiré par la médecine pour la première fois à quatorze ans pendant un camp d'été. Mon cousin Michael m'avait tenu éveillé toute la nuit en m'expliquant les subtilités du fonctionnement des reins, comment il secrètent les déchets corporels, puis réabsorbent les substances chimiques qui maintiennent l'équilibre de l'organisme.
Mais au début de mon stage en psychiatrie, j'ai été frappé par le contraste entre la complexité incroyable de notre esprit, de nos modes de communication et d'attachement, et le peu de connaissances des psychiatre quant à la cause des problèmes qu'ils avaient à traiter !
Mais la naissance de trois nouvelles branches de la science a fait exploser le savoir sur les effets du traumatisme psychologique, des mauvais traitements et de l'abandon.
Ces disciplines récentes sont les 'Neuroscience' qui étudient la manière dont le cerveau traite les processus mentaux; la 'Psychopathologie' du développement qui étudie l'impact des mauvaises expériences sur le développement de l'esprit et du cerveau, et la 'Neurobiologie interpersonnelle' qui étudie l'influence du comportement sur les émotions, la biologie et les attitudes de l'entourage !
Les recherches dans ces jeunes disciplines ont révélés que le traumatisme crée de réels changements physiologiques, parmi lesquels un recalibrage du système d'alarme du cerveau, une augmentation de la sécrétion d'hormones du stress, et des variations dans la structure qui filtre les informations, retenant celles qui sont pertinentes.
Nous savons aujourd'hui que le traumatisme affecte l'aire cérébrale qui donne la sensation physique d'être en vie !
Ces dégradations expliquent pourquoi les traumatisés deviennent hypervigilants à la menace, au lieu de s'impliquer totalement dans leur vie quotidienne.
Elles nous aident aussi à comprendre pourquoi ils se heurtent sans cesse aux mêmes problèmes et ont tant de mal à tirer des leçons de l'expérience.
Il est maintenant établi que leurs comportements ne sont pas le fruit de défaillances morales, ni des signes de manque de volonté ou de mauvais caractère, mais sont causés par de vraies altérations cérébrales.
Un tel accroissement des connaissances sur les processus en arrière plan du traumatisme a aussi permis de trouver de nouveaux moyens d'apaiser le mal, ou même de le soulager complètement.
Grâce à la découverte de la placidité naturelle du cerveau, nous pouvons mettre au points des méthodes qui aident les patients à se sentir pleinement vivants dans le présent et d'avancer.
En gros, trois types de traitements s'offrent à eux :
La Thérapie - de haut en bas - qui consiste à parler, à s'ouvrir (à nouveau) aux autres, et à s'autoriser à comprendre ce qui se passe en soi, tout en travaillant sur les souvenirs du traumatisme.
La prise de médicaments qui bloquent les réactions d'alerte inadéquates, ou modifient par d'autres moyens la façon dont le cerveau organise l'information.
et l'Approche de bas en haut qui revient à permettre au corps d'avoir des expériences qui contrarient viscéralement l'impuissance, la rage ou l'effondrement liés au traumatisme.
Quelle est la méthode qui convient le mieux à un patient est une question empirique ! La plupart de ceux que j'ai suivis en associent plusieurs !
La compréhension, la parole et les rapports humains peuvent aider, et les médicaments arrivent à freiner l'hyperactivité des systèmes d'alarme.
Mais nous verrons aussi que l'on peut transformer les empreintes du passé via des expériences physiques qui contrecarrent directement la rage, l'impuissance et l'effondrement causés par le traumatisme, ce qui permet de retrouver la maîtrise de soi.
Je n'ai pas de préférence quant au mode de traitement, car aucune approche n'est bonne pour tout le monde !
Et je pratique l'ensemble des thérapies abordées dans ce livre !
Chacune est susceptible d'amener des changements profonds, selon la nature du problème et le caractère du patient.
J'ai écrit ce livre à la fois comme un guide et comme une invitation à affronter une réalité du traumatisme, à explorer les meilleures façons de le traiter. Mais aussi pour qu'au plan de la société, on s'engage à mettre en œuvre tous les moyens possibles pour le prévenir !
Bessel van der Kolk
Autres sujets du livre :
𝑳𝒆 𝒑𝒔𝒚𝒄𝒉𝒊𝒂𝒕𝒓𝒆 𝑩𝒆𝒔𝒔𝒆𝒍 𝒗𝒂𝒏 𝒅𝒆𝒓 𝑲𝒐𝒍𝒌, 𝒕𝒉𝒆́𝒓𝒂𝒑𝒆𝒖𝒕𝒆 𝒂 𝒑𝒂𝒔𝒔𝒆́ 𝒒𝒖𝒂𝒓𝒂𝒏𝒕𝒆 𝒂𝒏𝒔 𝒂̀ 𝒔𝒐𝒊𝒈𝒏𝒆𝒓 𝒅𝒆𝒔 𝒔𝒖𝒓𝒗𝒊𝒗𝒂𝒏𝒕𝒔
Autres sujets :
Le sujet est vaste, je vous invite si vous avez lu cet article, jusqu'au bout, de débattre et de commenter ci-dessous, merci !
Eddy Vonck
Rédacteur bénévole de Psycho'Logiques


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